Diabétologie

Statines : réalité et relativité des effets secondaires musculaires

Les statines sont largement prescrites et leur bénéfice n’est plus à démontrer. La méta-analyse présentée ici se penche sur le risque d’effet indésirable de type douleurs musculaires. Ces douleurs apparaissent fréquentes (chez près d’1/4 des patients) mais attention, les statines n’en sont pas systématiquement la cause. Attention donc à ne pas arrêter automatiquement les statines, surtout si la douleur apparait plus de 3 mois après l’introduction du traitement.

  • Istock/Roman Didkivskyi
  • 28 Octobre 2022
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    Les statines sont des traitements très prescrits, avec toujours une arrière-pensée pour de possibles effets secondaires musculaires. Une méta-analyse d’études randomisées en double aveugle a inclus 19 essais comparant une statine à un placebo, pour un total de 123.940 individus, avec un suivi médian de 4,3 années. L’interrogatoire retrouvait une symptomatologie musculaire chez 27,1% des individus sous statines, comparé à 26,6% des individus sous placebo, soit une augmentation de 3% (risque relatif (RR) = 1,03 [1,01-1,06]).

    Les statines augmenteraient le risque d’une symptomatologie musculaire de 7% la première année (RR 1,04-1,10, soit un excès de 11 évènements pour 1.000 personnes traitées), sans augmentation dans les années suivantes.

    Augmentation réelle, mais dans une minorité des cas rapportés

    Le RR de 3% est similaire quel que soit le type de symptôme : myalgies, douleurs des membres, autres douleurs musculo-squelettiques, crampes musculaires ou spasmes, toute douleurs musculaires, et fatigue musculaire ou faiblesse. L’augmentation du risque de symptôme musculaire est déjà présente dès les 3 premiers mois de prescription d’une statine (EE 1,08 [1,02-1,15]).

    La méthode de recherche de ces symptômes était très hétérogène d’une étude à l’autre, conduisant à des incidences de symptomatologie musculaire entre 1% et 61% selon les études, mais sans argument pour un effet de ce risque absolu sur le risque relatif lié à la statine.

    Une myopathie, définie par le codage, a été rapportée chez 0,08% des individus sous statines, contre 0,04% sous placébo, soit un RR de 1,74 [1,11-2,74], correspondant à 0,08 cas pour 1.000 individus-années. Ce risque était présent uniquement lors de la 1ère année de prescription.

    Une augmentation plus marquée chez la femme

    Les patients avaient en moyenne 63 ans à l’inclusion, dont 28% de femmes. Plus de 48% suivaient une prévention cardio-vasculaire secondaire. Un diabète était présent chez 18 % des individus.

    Le RR de symptômes musculaires variait selon le sexe, avec une augmentation plus importante chez les femmes pour les statines à doses faibles et moyennes : RR 1,09 [1,03-1,16] chez les femmes, comparé à 1,00 [0,97-1,04] chez les hommes. Les autres caractéristiques, dont le diabète, n’influençaient pas ce RR. Enfin, aucune différence liée au type de statine n’a été identifiée.

    Des cas réels, à ne pas surestimer

    La conclusion de cette étude est à double tranchant. Les auteurs concluent que, dans ces études randomisées, 93% des cas de symptomatologies musculaires « rapportées » ne sont pas dues à la statine. La présence d’une symptomatologie musculaire ne doit donc pas, à juste titre, conduire systématiquement à l’élimination de la statine. Perdre le bénéfice cardio-vasculaire de ce traitement, ce d’autant que le risque est élevé, ne doit être décidé qu’après avoir augmenté la probabilité d’une causalité : préciser l’interrogatoire, et par exemple tester un arrêt-réintroduction du médicament.

    D’un autre côté, il ne faut pas conclure que 93% des patients se plaignant de douleurs musculaires sous statine ont en fait une autre cause. La prévalence importante d’une symptomatologie musculaire dans cette méta-analyse (un quart des patients) est le fruit d’un interrogatoire plus ou moins systématique, et n’est pas le reflet d’une plainte des patients. En revanche, il est important de noter que le risque réellement lié aux statines apparaît dès les trois premiers mois, et devient inexistant après la première année.

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