Rhumatologie

Goutte : le traitement hypouricémiant aux objectifs sans toxicité cardiovasculaire.

Chez les personnes souffrant de goutte, l'allopurinol est non inférieur au fébuxostat lorsqu'il est prescrit dans le cadre d'une stratégie de traitement aux objectifs (« Treat-to-Target »), c’est-à-dire une uricémie inférieure à 60 mg/l, et ce même en cas d'insuffisance rénale.

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  • 12 Novembre 2021
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    La goutte est une arthrite microcristalline très douloureuse et potentiellement invalidante qui survient lorsqu'un excès d'acide urique s'accumule dans l'organisme et que des cristaux d'urate se déposent dans les articulations. Le traitement hypouricémiant est donc la pierre angulaire de la prise en charge de la goutte, mais on manque de données sur l'efficacité et la sécurité comparatives des deux hypouricémiants oraux, l'allopurinol et le fébuxostat, lorsqu'ils sont prescrits dans le cadre d'une approche de traitement aux objectifs (« Treat-to-Target »).

    Une nouvelle étude randomisée, présentée au congrès annuel de l'American College of Rheumatology (ACR 2021), montre que l'allopurinol et le fébuxostat peuvent baisser les taux d’acide urique en dessous de 60 mg/l lorsqu'ils sont utilisés dans une approche de traitement aux objectifs. Les deux traitements hypouricémiants ont été très efficaces selon cette stratégie « Treat-to-Target », 90% des patients atteignant des taux d’acide urique voisins des taux cibles. De plus, les deux traitements sont bien tolérés, sans preuve d'une quelconque toxicité cardiovasculaire dans cette étude (Abstract 1900).

    Large étude en double-aveugle

    L'essai randomisé en double-aveugle comportait trois phases : phase 1 de titration de l’hypouricémiant de la semaine 0 à 24, phase 2 de traitement d'entretien de la semaine 25 à 48 et phase 3 d’observation avec maintien du traitement hypouricémiant stable de la semaine 49 à 72.

    Pour la phase 3 de 49 à 72 semaines, 940 malades souffrant de goutte et ayant une uricémie de 68 mg/l ou plus ont été randomisés pour recevoir soit de l'allopurinol, soit du fébuxostat. Les malades avec une hyperuricémie persistante, malgré un traitement par allopurinol de 300 mg/jour ou moins étaient éligibles. Plus d'un tiers des malades souffraient d'une insuffisance rénale chronique stade 3.

    Obtenir une uricémie inférieure à 60 mg/l

    Cette large étude randomisée multicentrique et en double-aveugle est la première à comparer l'allopurinol au fébuxostat en utilisant l'approche recommandée de traitement aux objectifs, avec pour cible une uricémie inférieure à 60 mg/l. Les malades ont reçu des doses initiales quotidiennes, soit de 100 mg d'allopurinol avec une titration maximale à 800 mg, soit de 40 mg de fébuxostat avec une titration maximale à 120 mg (réduite à 80 mg en 2019 à la demande de la Food and Drug Administration américaine). Les patients ont également reçu des traitements anti-inflammatoires selon le choix des investigateurs jusqu'au début de la troisième phase.

    Le critère principal est le pourcentage de patients ayant eu une ou plusieurs poussées de goutte au cours de la troisième phase de l’étude. L'efficacité et la tolérance des deux hypouricémiants chez les patients atteints d’insuffisance rénale chronique de stade 3 ont été examinées, de même que les effets secondaires graves et la proportion de patients ayant atteint un taux d’uricémie inférieur à 60 mg/l à la fin de la deuxième phase de l'essai.

    80% de malades aux objectifs

    Dans l'ensemble, 80% des patients de l'essai atteignent un taux d’uricémie inférieur à 60 mg/l, et 92% ont atteint un taux inférieur à 68 mg/l au cours de la deuxième phase, sans différence entre les deux traitements. Au cours de la troisième phase, 35% des patients sous allopurinol ont eu une ou plusieurs poussées de goutte, contre 42% des patients sous fébuxostat.

    Il n'y a pas non plus de différence entre les deux hypouricémiants en ce qui concerne les effets secondaires graves, notamment le pourcentage de patients avec des événements cardiovasculaires chez les personnes atteintes ou non d'une maladie rénale chronique. Ce dernier résultat est critique, car près d'un patient sur deux souffrant de la goutte souffre d'insuffisance rénale.

    Deux hypouricémiants équivalents

    L'allopurinol est non inférieur au fébuxostat lorsqu'il est prescrit à une dose efficace dans le cadre d'une approche de traitement « Treat to Target », et jusqu’à plus de 600 mg/jour, chez les personnes souffrant de goutte. Ce médicament ancien offre ainsi une autre option thérapeutique pour gérer les hyperuricémies sévères sur le long terme.

    Cet essai démontre que les deux hypouricémiants oraux testés sont très efficaces et sûrs lorsqu'ils sont utilisés selon une stratégie « Treat-to-Target » et c'est également vrai chez les malades souffrant d’une insuffisance rénale chronique.

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