Rhumatologie
Méralgie paresthésique : une sensation désagréable de la face externe de la cuisse
Toutes les sensations désagréables de la cuisse ne sont pas liées à une coxarthrose, une cruralgie ou une tendino-bursite du moyen fessier. La « méralgie paresthésique » est une souffrance du nerf fémoro-cutané, un nerf purement sensitif de la cuisse, qui s’améliore sous traitement.
- Marc Bruxelle/istock
La « méralgie paresthésique » est plus une sensation désagréable de la face externe de la cuisse qu’une douleur, et est causée par une compression du nerf fémoro-cutané (ou nerf cutané latéral de la cuisse). Il s’agit en effet surtout d’une sensation désagréable, avec un engourdissement marqué (« sensation de peau cartonnée ») sur une zone typiquement « en raquette » à la face externe de la cuisse.
C’est la pathologie nerveuse périphérique compressive la plus fréquente des membres inférieurs et bien qu’étant purement sensitive, elle peut être à l’origine d’une gêne importante. Ce nerf est, en effet, uniquement sensitif et sa compression n’entraîne jamais de déficit musculaire.
Une anatomie favorisant la compression
Le nerf fémoro-cutané (ou nerf cutané latéral de la cuisse) est un nerf sensitif, issu du plexus lombaire (L2-L3). Il émerge latéralement sous le muscle grand psoas pour cheminer dans le bassin, à la surface du muscle iliaque, et il quitte le bassin en passant en dessous, en dessus ou au travers du ligament inguinal, en général à moins de cinq centimètres de l’épine iliaque antéro-supérieure.
Le nerf peut décrire un angle droit à sa sortie du bassin ce qui peut compromettre sa vascularisation. Des études anatomiques ont montré que cet angle et la compression du nerf cutané fémoral latéral augmentent lors de l’extension de la hanche et diminuent lors de la flexion.
Un syndrome canalaire du bassin
La méralgie paresthésique traduit donc la compression du nerf fémoro-cutané, le plus souvent à sa sortie du bassin, sous l’épine iliaque antéro-supérieure, dans la traversée de l’arcade fémorale (ou arcade crurale). Dans près d’un cas sur 3, le problème est dû au trajet anormal de ce nerf. Dans d’autres cas, il n’est pas possible de trouver une origine précise.
Les facteurs favorisants sont classiquement l’obésité, le diabète et le port de vêtements (ou d’une ceinture) trop serrés. Certaines positions comme l’extension de la cuisse sur le bassin, peuvent aggraver les symptômes, de même que la marche.
Un diagnostic purement clinique
Le diagnostic est clinique devant une diminution de la sensibilité (« dysesthésie »), des fourmillements ou une sensation de brûlure (« paresthésies »), de topographie en raquette à la face externe de la cuisse (entre l’épine iliaque antéro-supérieure et le bord supérieur de la rotule). Il n’y a aucun déficit musculaire dans la cuisse.
Il est possible de déclencher la sensation désagréable en mettant la cuisse en hyperextension (« Lasègue inversé »), et éventuellement à la percussion/compression de l’arcade crurale (« signe de Tinel »). Il n’y a aucun trouble moteur ou reflexe, à la différence des radiculalgies L3 ou L4.
Le diagnostic peut aussi s’aider d’une infiltration-test du nerf fémoro-cutané avec de la Lidocaïne à 1% : le test est considéré comme positif si le patient a un soulagement immédiat ou très rapide.
Diagnostics différentiels
L’examen clinique exclura d'autres affections pouvant causer des douleurs proches, comme une tendino-bursite du moyen fessier, une compression des racines nerveuses crurale ou une arthrose de la hanche.
Le plus souvent, aucun examen complémentaire n'est nécessaire. Dans les cas difficiles, un électromyogramme peut être demandé mais sous réserve d’une interprétation correcte. En effet, L’examen ne teste pas, comme cela est habituellement la règle dans les syndromes canalaires, la conduction au niveau de la zone de compression, mais au-delà.
On ne recherche donc pas une diminution de la vitesse de conduction nerveuse, mais uniquement la perte axonale sensitive distale, évaluée par la perte d’amplitude du « potentiel d’action sensitif » (PAS). C’est cette étude EMG distale qui permet d’affirmer un diagnostic de méralgie paresthésique délicat.
Traitement essentiellement médical
Il y a peu d'essais contrôlés randomisés publiés sur le traitement de la méralgie paresthésique selon une revue Cochrane. Dans tous les cas, un amaigrissement et l’éviction des ceintures trop serrées sont nécessaires et peuvent suffire.
Des études observationnelles rapportent des améliorations de ce syndrome canalaire après injection locale de corticoïdes. En cas de symptomatologie invalidante, ce nerf peut donc être infiltré à l’aveugle. La visualisation échographique de ce nerf permettrait cependant un meilleur contrôle de la bonne localisation de l’infiltration
L’intérêt de la chirurgie (décompression du nerf ou neurectomie) est également rapporté dans des études observationnelles. Mais, la méralgie paresthésique s'améliorant dans la majorité des cas, spontanément ou sous traitement médical, la neurolyse chirurgicale est exceptionnellement nécessaire.











