Cardiologie
DAPT après angioplastie : chez les patients à haut risque hémorragique, un mois suffit
Chez des patients à haut risque hémorragique après angioplastie coronaire, une double anti-agrégation plaquettaire (DAPT) de courte durée permet de réduire le risque d’hémorragies majeures ou cliniquement pertinentes, sans accroitre le risque ischémique, selon les résultats de l’étude MASTER-DAPT.
- Pitchayanan Kongkaew/istock
La durée idéale de la double anti-agrégation plaquettaire (DAPT) après angioplastie chez les patients à risque hémorragique élevé reste débattue. A la lumière de plusieurs études antérieures, une durée réduite à un mois parait diminuer le risque hémorragique sans augmenter le risque thrombotique, mais ces essais étaient, soit non randomisés, soit avaient exclus les sujets à risque élevé de saignements ou de thrombose.
Et c’est sur la base d’un consensus d’experts que les recommandations de la Société européenne de cardiologie (ESC) préconisent de raccourcir la durée de la DAPT de 6 mois à un mois chez ces patients à risque.
Une étude spécifiquement dédiée
Dans ce contexte, les résultats de l’étude MASTER-DAPT, présentés lors du congrès virtuel 2021 de l’ESC et publiés simultanément dans le NEJM, apportent un éclairage intéressant puisque cet essai a porté spécifiquement sur des sujets à haut risque hémorragique.
Chez ces patients, qui ont quasi-tous bénéficié de l’implantation d’un ou plusieurs stents actifs biodégradables (de type Ultimaster), l’arrêt de la double anti-agrégation plaquettaire un mois (en moyenne 34 jours) après l’angioplastie est non inférieur à une durée prolongée (en moyenne 193 jours) quant au risque net d’événement indésirable, d’événements majeurs cardiaques ou cérébraux et s’accompagne d’une réduction des saignements majeurs ou cliniquement significatifs.
Des critères de risque hémorragique
Les patients inclus dans l’étude avaient un syndrome coronaire aigu ou chronique pour lequel ils ont eu une angioplastie percutanée de toutes les artères coronaires sténosées. Ils répondaient à un ou plusieurs critères de risque hémorragique élevé, telles qu’une anticoagulation orale depuis au moins 12 mois, un saignement récent, ou encore un âge ≥ 75 ans.
Entre 30 et 44 jours après la procédure percutanée, à condition qu’aucun événement hémorragique ou ischémique ne soit survenu, ils ont été randomisés en deux groupes : arrêt de la DAPT et poursuite d’une monothérapie pendant encore 11 mois (ou 5 mois en cas de traitement anticoagulant associé), ou poursuite de la DAPT pour jusqu’à 5 mois supplémentaire (2 mois pour ceux sous anticoagulants) puis monothérapie jusqu’à 11 mois après la randomisation.
Trois critères de jugement
Ce sont ainsi 4579 patients recrutés dans une trentaine de pays qui ont été randomisés en moyenne 34 jours après l’angioplastie. Il s’agissait majoritairement d’hommes (69%), âgés en moyenne de 76 ans.
Plus d’un tiers recevaient un anticoagulant oral, près d’un sur deux avait eu un syndrome coronarien aigu.
Pas plus d’événements ischémiques majeurs….
Au terme du suivi de l’étude (335 jours après la randomisation), un événement clinique indésirable « net » (premier critère de jugement, composite des décès toutes causes, infarctus du myocarde, accidents vasculaires cérébraux et saignements majeurs ou cliniquement pertinents) est survenu chez 165 (7,5%) patients du groupe DAPT courte et 172 (7,7%) patients du groupe DAPT standard (différence d’incidence cumulée de -0,23 point ; p < 0,001 pour la non-infériorité).
Un événement cardiaque ou cérébral indésirable majeur (deuxième critère de jugement, composite des décès toutes causes, des IDM et des AVC) a été rapporté chez 133 (6,1%) patients du groupe DAPT courte et 132 (5,9%) patients du groupe DAPT standard (soit une différence d’incidence cumulée de 0,11 point ; p = 0,001 pour la non-infériorité).
…et moins d’événements hémorragiques
Enfin, les saignements majeurs ou non majeurs cliniquement significatifs (3ème critère de jugement) ont été moins fréquents dans le groupe DAPT courte que dans le groupe DAPT standard :148 (6,5%) vs 211 (9,4%) (soit une différence d’incidence cumulée de -2,82 points ; p < 0,001 pour la supériorité).
« Cet essai confirme ainsi bien les bénéfices d’une DAPT de courte durée chez les patients à risque hémorragique élevé, et ce même s’ils avaient un SCA ou des lésions complexes », a souligné le Pr Marco Valgimigli (Suisse), principal investigateur de l’étude. Toutefois, la question de l’applicabilité de ces résultats à d’autres types de stents reste entière, tout comme celle de la durée et du type de monothérapie AAP.











