Psychiatrie
Dépression : fréquence de l’inflammation au cours de la maladie
Les personnes souffrant de dépression auraient un taux d’inflammation dans le corps plus élevé que celles qui n’en souffrent pas.
- Marcos Calvo/iStock
Traiter l’inflammation pour mieux traiter la dépression ? Des chercheurs britanniques du King's College de Londres suggèrent que les personnes qui souffrent de dépression ont un taux d’inflammation plus élevé que les autres.
Dans des résultats présentés le 14 mai dans l’American Journal of Psychiatry, ils confirment une hypothèse déjà évoquée dans des études antérieures : certaines formes de dépression, en particulier.
Une présence détectable dans le sang
Les chercheurs ont mené leur étude sur une large cohorte de malades, comportant les données de 26 894 personnes qui ont été diagnostiquées souffrant d'une dépression. Ils les ont comparées avec celles de 59 001 volontaires qui n’ont eu aucun antécédent de cette maladie au cours de leur vie. Ces données ont été récupérées dans la UK Biobank, qui contient les données de santé de plus d'un million de personnes suivies sur le long cours en Grande-Bretagne. Les chercheurs ont étudié des échantillons sanguins, des données génétiques ainsi que des questionnaires sur la santé mentale des participants afin d'ajuster ces résultats sur les différents facteurs de risque d'inflammation.
L’analyse détaillée révèle que les personnes qui ont reçu un diagnostic de dépression ont des niveaux plus élevés de protéine C-réactive (CRP) dans le sang. Par ailleurs, ces niveaux élevés ont été retrouvé aussi bien chez ceux qui souffraient de symptômes dépressifs au moment de l’étude que chez ceux qui étaient déclarés guéris au moment du prélèvement sanguin. En moyenne, les personnes dépressives ont 2,4 mg par litre de CRP contre 2,1 pour ceux qui ne présentent pas cette maladie. Plus d’une personne dépressive sur cinq (21,2%) a même des taux supérieurs à 3 mg/L. Dans l’autre groupe, 16,8% des personnes non diagnostiquées affichaient des niveaux aussi élevés.
Des chercheurs pas unanimes
Les chercheurs ont conclu qu’il existe une association entre dépression et inflammation. “Ces analyses ont montré que la CRP était associée à la dépression. C'est une découverte importante. La différence de CRP entre les personnes déprimées et non dépressives est cliniquement significative”, a déclaré Sherwood Brown, chercheur à l’université du Texas, au New Scientist. Les facteurs confondants ont été analysés tels que l’hygiène de vie des participants a également été examiné par les chercheurs qui ont regardé l’indice de masse corporel (IMC), leur consommation de tabac ou d'alcool. Ils ont constaté que ces facteurs peuvent partiellement contribuer à augmenter l'inflammation. La question est désormais de savoir si le taux d’inflammation a une origine génétique, induisant une prédisposition à la dépression, ou au contraire si c’est la dépression qui mène à des comportements qui favoriseraient des taux élevés d'inflammation.
Ces résultats n’ont pas conduit à une unanimité chez les chercheurs sur l’association entre dépression et inflammation. “Il existe un certain nombre de raisons possibles à l'association, a détaillé estime David Curtis, professeur honoraire à l'UCL Genetics Institute de Londres. Des maladies particulières ou des situations indésirables pourraient par exemple augmenter le risque de dépression et conduire à une inflammation accrue : cette étude ne permet pas vraiment de tirer des conclusions définitives concernant de telles relations. Je doute que l’inflammation ait un rôle clé dans la cause de la dépression et je ne suis pas sûr que la présente étude ajoute beaucoup à notre compréhension de la dépression.”
D’autres études sont nécessaires avant de mettre en place de nouveaux protocoles de traitements, avec des médicaments anti-inflammatoires par exemple. “En plus de n'avoir aucun effet prouvé sur la dépression, ces médicaments ont des effets secondaires dangereux tandis que les antidépresseurs sont sûrs et efficaces. Les médicaments anti-inflammatoires seraient responsables de plusieurs milliers de décès chaque année aux États-Unis”, estime David Curtis. Un risque très exagéré pour les AINS, sachant qu'ils ne sont probablement pas à mettre en place dans toutes les dépressions mais peut-être dans les dépressions résistantes et prolongées.











