Neurologie
AVC et prévention secondaire : la double antiagrégation plaquettaire en question
L’ajout de ticagrelor à l’aspirine dans les 24 heures suivant un accident ischémique cérébral (AIC) mineur ou un accident ischémique (AIT) à risque, d’origine non cardioembolique, s’accompagne d’une réduction du risque d’AVC à 30 jours comparativement à l’aspirine seule. Un bénéfice qui se fait toutefois au prix d’une augmentation des hémorragies graves.
Les patients qui ont eu un accident ischémique cérébral (AIC) ou un accident ischémique transitoire sont à haut risque de refaire un accident vasculaire cérébral (AVC) dans les semaines et mois qui suivent. Un risque estimé entre 5 et 10% et qui motive la prescription d’un traitement antiagrégant plaquettaire, historiquement à base d’aspirine.
Ces dernières années, d’autres stratégies ont été évaluées : monothérapie par clopidogrel ou ticagrelor et surtout double antiagrégation plaquettaire. Deux études, CHANCE et POINT, ont souligné les bénéfices de l’association aspirine-clopidogrel. L’étude THALES, étude multicentrique internationale randomisée qui a inclus plus de 11 000 patients et dont les résultats viennent d’être publiés dans le NEJM, a de son côté évalué le ticagrelor chez des patients victimes d’un AIC mineur (score NIHSS <5) ou un AIT à risque (score >6 sur l’échelle ABCD), d’origine non cardio-embolique, ne bénéficiant pas d’une thrombolyse.
Réduction significative des AVC
Cet essai montre que l’association ticagrelor-aspirine, débutée dans les 24 premières heures, fait mieux que l’aspirine seule sur le risque d’événement du critère primaire d’évaluation, combinant AVC et décès dans les 30 jours : 5,5 % dans le bras bithérapie antiplaquettaire versus 6,6% sous placebo (HR 0,83 : IC 95% 0,71-0,96, p = 0,02).
Le bénéfice est surtout tiré par la baisse des AVC ischémiques : 5% vs 6,3% (HR 0,79 ; IC 95% 0,68-0,93, p = 0,004). Il n’y a pas de différence entre les deux bras thérapeutiques sur le risque de handicap.
En revanche, le risque d’hémorragies graves (notamment hémorragies fatales et intracrâniennes) est plus élevé dans le bras ticagrelor : 0,5% vs 0,1% (p = 0,001).
L’aspirine seule encore parfois oubliée
Si globalement la bithérapie antiplaquettaire marque des points, la question de la meilleure stratégie, entre l’association aspirine-clopidogrel et aspirine-ticagrelor ne pourra trouver de réponse que dans un essai comparatif direct.
Dans l’éditorial qui accompagne la publication de l’étude THALES, Peter Rothwell souligne que cette dernière étude a porté sur des patients à haut risque, qui ne sont pas les plus nombreux en pratique. Ainsi, chez les sujets à faible risque, le surrisque hémorragique pourrait faire défavorablement pencher la balance bénéfice/risque.
Enfin, au-delà du débat sur la meilleure bithérapie antiplaquettaire, Peter Rothwell rappelle qu’une marge de progrès existe déjà en termes de prescription de la monothérapie par aspirine, qui devrait concerner tous les patients (sauf contre-indication à l’aspirine), ce qui est loin d’être le cas.











