Rhumatologie

Ostéoporose : prendre en compte le risque de fracture avant d’interrompre traitement

Chez les patients à risque élevé de fracture et traités sur le long terme, l'interruption du traitement anti-ostéoporotique peut entraîner une augmentation du risque de fracture.

  • Dr_Microbe/istock
  • 09 Juillet 2019
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    L'impact de l'interruption du traitement anti-ostéoporotique chez les patients traités par des bisphosphonates ou du denosumab sur le long terme est considérée comme risquée dans certains cas. Ces conclusions sont énoncées dans un nouveau document du groupe de travail de l'International Osteoporosis Foundation (IOF) intitulé « Fracture risk following intermission of osteoporosis therapy » publié dans la revue Osteoporosis International.

    Concept des vacances thérapeutiques

    La pratique actuelle de recommander des « vacances thérapeutiques », d'un à deux ans après 5 ans de traitement antirésorbeur en continu, a émergé suite aux constatations que l'utilisation à long terme des bisphosphonates est associée à de rares effets secondaires liés à une mauvaise qualité osseuse, notamment une augmentation du risque de fractures atypiques de l’extrémité supérieure du fémur et d’ostéonécrose de la mâchoire.

    Toutefois, les données disponibles suggèrent que, pour les patients qui ont un risque élevé de fracture, le rapport bénéfices-risques est clairement en faveur de la poursuite du traitement, avec environ 100 nouvelles fractures de fragilité évitées pour un seul de ces événements osseux indésirables.

    Risque de récidive fracturaire à l’arrêt

    Peu d'études se sont penchées sur l’intérêt de la poursuite du traitement anti-ostéoporotique au-delà de 5 ans en cas de risque fracturaire élevé. Toutefois, en se fondant sur les données disponibles dans les études prospectives et rétrospectives disponibles, les experts de l’IOF ont constaté qu'après l'arrêt du traitement par les bisphosphonates, le risque de nouvelles fractures cliniques (vertébrales et non-vertébrales) est augmenté de 20 à 40% chez les femmes dont le T score au fémur total est inférieur à -2,5. Parallèlement, le risque de fractures vertébrales est presque doublé. Parallèlement, une perte osseuse rapide peut être observée après l'arrêt du traitement par le denosumab, avec une incidence de fractures vertébrales multiples qui serait d'environ 5%.

    A l’inverse, les études portant sur la poursuite du traitement bisphosphonate sur le long terme dans cette population à haut risque n'ont pas identifié d’augmentation du risque de fractures vertébrales et non-vertébrales et n'ont signalé que des taux très faibles d'événements indésirables osseux tels que des fractures atypiques.

    Individualisation de la stratégie

    Le professeur Serge Ferrari, co-auteur de l’étude et président du Comité du conseil scientifique de l'OIF, conclut : « Cette analyse souligne la nécessité d'une approche beaucoup plus nuancée des vacances thérapeutiques. Les fractures ostéoporotiques peuvent mettre en danger la vie des malades et avoir un impact dévastateur sur leur qualité de vie ».

    « Les médecins et les malades doivent donc être conscients que, chez les personnes à risque élevé de fracture de fragilité, les avantages du maintien du traitement l'emportent nettement sur le risque d'effets secondaires osseux qui sont rares ».

    Particularité du traitement par le denosumab

    Il ajoute : « En outre, il est important de comprendre que les bisphosphonates et le denosumab sont des traitements fondamentalement différents qui nécessitent des approches différentes car l'arrêt du denosumab s’accompagne d’une perte osseuse accélérée, du moins chez les sujets qui n'ont jamais été exposés à des bisphosphonates de longue durée ».

    Les recommandations actuelles conseillent désormais de relayer un traitement par le denosumab avec un traitement bisphosphonate de 3 à 6 mois afin d’éviter le rebond ostéoclastique, probablement lié à l’accumulation d’ostéoclastes bloqués sous denosumab, mais toujours actifs et prêt à reprendre une activité.

    Prendre en compte le coût de l’ostéoporose

    Le fardeau des fractures ostéoporotiques est lourd et coûteux, entraînant une invalidité et une perte d'autonomie chez des millions de femmes et d'hommes âgés dans le monde. L'efficacité des traitements anti-ostéoporotiques validés est bien établie avec une possible réduction des fractures de l'ordre de 50%. Plutôt que d'appliquer aveuglément les vacances thérapeutiques, l’IOF suggère une prise de décision plus éclairée chez les patients à risque élevé de fracture et d’envisager les bénéfices individuels de la poursuite du traitement par rapport à l'arrêt du traitement.

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