Ophtalmologie
Myopie : le score DUCK validé pour le traitement du kératocône
Le kératocône, une des formes de myopie invalidante, peut bénéficier d’un traitement de réticulation de la cornée s’il progresse, or il n'y a pas de consensus sur les paramètres à utiliser pour définir la progression. Un nouveau score améliore les indications de traitement.
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Dans la revue JAMA Ophthalmology, Wisse et al ont validé un nouveau système de notation, appelé le score DUCK (Dutch Crosslinking for Keratoconus), pour identifier les myopes ayant un kératocône évolutif. En plus des facteurs de risque classiques de progression, comme les lectures kératométriques et l’évaluation des erreurs de réfraction, le nouveau système de cotation tient également compte de l'acuité visuelle, de l'âge et de l'évaluation de la qualité de la vision du patient.
Pour évaluer la robustesse du système de cotation, les auteurs ont utilisé des données rétrospectives tirées de leur base de données de malades, qui comprenait 504 yeux avec kératocône, et ils ont comparé la performance du score DUCK avec l'évaluation clinique des changements de la kératométrie maximale. Ils ont constaté que l'utilisation du score DUCK est associée à une réduction du nombre total de cas nécessitant un traitement sans augmenter le risque de progression de la maladie non-traitée. Les résultats de cette étude sont prometteurs, mais elle comporte encore des limites qui devront être vérifiées dans les essais ultérieurs.
Myopie et kératocône
Le kératocône est la dystrophie cornéenne la plus fréquente dans le monde occidental, fréquemment à l’origine d’une déficience visuelle grave. Il évolue le plus souvent de la fin de l'enfance au début de l'âge adulte. Jusqu'à 25 % des personnes atteintes de kératocône atteindront un stade de la maladie où l'acuité visuelle ne peut plus être compensée avec une correction de la vue et où une chirurgie est nécessaire (greffe de cornée).
Au cours des dernières années, la réticulation de la cornée, une combinaison de rayonnements UV locaux et de collyre photosensibilisant à la riboflavine, est devenue un traitement validé pour réduire la progression du kératocône, évitant ainsi à terme la nécessité d'une greffe de cornée. Ceci souligne l'importance d'une identification précoce des patients à risque.
Le paradigme clinique actuel stipule que l'indication de la réticulation de la cornée et son moment optimal dans le processus pathologique sont principalement basés sur les changements de la kératométrie au fil du temps. Il est cependant bien connu que le taux de progression de la maladie est très variable et que d'autres facteurs de risque, dont l'âge et le sexe, jouent un rôle essentiel. Par exemple, les patients plus jeunes atteints de kératocône sont plus susceptibles de progresser plus rapidement que les personnes plus âgées. Trouver le bon moment pour une intervention reste donc difficile.
Une étude rétrospective
L’équipe de chercheurs a comparé les scores DUCK à l'augmentation conventionnelle de 1,0 dioptrie du critère de kératométrie maximale, au cours des 12 derniers mois, dans un suivi longitudinal et une cohorte de validation. Le score DUCK (Dutch Crosslinking for Keratoconus) est basé sur les changements de 5 paramètres cliniques qui sont régulièrement évalués : âge, acuité visuelle, erreur de réfraction, kératométrie et expérience subjective du patient. Le score DUCK est obtenu en marquant de 0 à 2 points par item, et les seuils ont été déterminés sur l'expérience clinique.
Au total, 504 yeux de 388 patients étaient disponibles pour l'analyse de l'évolution de la maladie au cours des 12 et 24 derniers mois. Le suivi du score DUCK, plutôt que de la kératométrie maximale, est associé à une réduction du taux global de traitement de 23% (IC 95 %, 18 %-30 %), sans pour autant augmenter le risque de progression de la maladie.
Du travail reste à faire
Dans cette étude rétrospective, l'évaluation subjective de la qualité de la vision par les patients peut être sujette à des biais. Par ailleurs, il peut être difficile de généraliser les résultats de l'étude en raison de la taille relativement petite de l'échantillon et du court suivi et on ne sait pas comment les patients traités auraient progressé sans traitement.
Le score DUCK semble être supérieur à la seule valeur kératométrique maximale pour identifier les patients qui n'ont pas besoin du traitement de réticulation cornéenne. Le fait d'éviter les interventions chirurgicales inutiles peut réduire les coûts de traitement dans la population. A ce titre, l'introduction du score DUCK est une étape vers une prise de décision plus personnalisée pour le traitement du kératocône.
Des études prospectives dans des cohortes plus importantes et sur des périodes d'observation plus longues sont cependant nécessaires pour valider définitivement ce nouveau système de notation et, éventuellement, découvrir de nouveaux facteurs de risque de progression.











