Lombalgie aiguë : bénéfice relatif des manipulations rachidiennes

Chez les patients souffrant d’une lombalgie aiguë, différentes techniques de manipulation rachidienne sont associées à une modeste amélioration de la douleur et de la fonction à court terme. Ce bénéfice s’exprime au prix d’inconvénients musculo-squelettiques mineurs et temporaires, selon une méta-analyse publiée dans le JAMA.

Une large méta-analyse

Sur 26 essais cliniques randomisés identifiés, 15 avaient le minimum requis pour être intégrés dans l’analyse de la douleur (n = 1 711 patients). Celle-ci objective une association statistiquement significative des manipulations rachidiennes avec une amélioration d’environ 10% de la douleur lombaire (amélioration moyenne à l’EVA de 100 mm, -9,95 mm [IC 95%, -15,6 à -4,3]), et ceci par rapport à des manipulations simulées, aux soins habituels ou à d'autres traitements.

Douze essais cliniques randomisés (n = 1 381 patients) qui avaient le minimum requis pour être intégrés dans l’analyse de la mobilité rachidienne permettent d’apporter des preuves d’une association statistiquement significative des manipulations et de l'amélioration de la fonction rachidienne (amélioration moyenne pondérée à -0,39 [IC 95%, -0,71 à -0,07]).

Une bonne tolérance

Aucun événement indésirable grave n’est objectivé dans ces essais randomisés, même s’ils sont rapportés dans la littérature.

Des événements indésirables transitoires et mineurs tels qu’une augmentation de la douleur, une raideur musculaire et des maux de tête ont été rapportés chez 50 à 67% des lombalgiques traités par manipulations dans ces 26 essais.

Une hétérogénéité des essais

Une forte hétérogénéité des essais est observée sur les résultats concernant les méthodologie (double aveugle avec « sham procedure », simple aveugle… Il existe de même une dispersion des résultats qui ne peut cependant pas être expliquée par les différences observées entre les médecins, le type de manipulations, la qualité des études ou le type d’étude (manipulations rachidiennes réalisée seules ou dans le cadre d'un ensemble de traitements).

En pratique

Dans cette méta-analyse, les manipulations rachidiennes apportent un bénéfice identique à celui des anti-inflammatoires non stéroïdiens ; tel qu’il est rapporté dans une analyse Cochrane récente dans la lombalgie aiguë .

De nombreux traitements sont utilisés dans la lombalgie aiguë sans qu’aucun n’ait de bénéfice très supérieur aux autres. Les manipulations rachidiennes seraient très utilisées par les lombalgiques (jusqu’à 30% selon certaines études aux USA) et les patients s’en déclarent très satisfaits.

Une revue systématique des études de bonne qualité avait déjà été réalisée et avait trouvé un bénéfice à court terme, mais pas à long terme. Dans cette méta-analyse des essais randomisés publiés sur la lombalgie évoluant depuis moins de 6 semaines, les auteurs ont essayé de bien analyser les biais et ils objectivent également un bénéfice modeste sur la douleur et la fonction à court terme. Cependant, on manque de données objectives comme l’éventuelle réduction associée de la consommation de traitements ou un retour au travail plus précoce. Ceci est embêtant dans la mesure où la majorité des lombalgies guérit spontanément. L’absence d’aveugle dans la plupart des études induit aussi un biais majeur du fait de la forte anticipation d’efficacité des manipulations de la part des malades volontaires dans ce type d’étude et de la déception en cas de randomisation dans le groupe témoin sans manipulation.

Au final, le plus embêtant est l’absence de diagnostic précis de la cause de la lombalgie aiguë qui fait miroir à l’absence de rationnel scientifique démontré sur le mode d’efficacité des manipulations.

Au final, cette analyse est rassurante car les manipulations semblent marcher et ne semblent pas dangereuses au rachis lombaire, mais elle est intellectuellement gênante dans la mesure où cela marche quelle que soit la cause de la lombalgie aiguë et quel que soit le type de manipulation.