Rhumatologie
Goutte : augmenter l’allopurinol au-delà de 300 mg/jour pour atteindre les objectifs
L'augmentation de l'allopurinol à des doses au-delà de 300 mg/jour est une option valide pour atteindre les taux cibles d’acide urique chez les patients souffrant de goutte.
- Thamkc/epictura
Dans un essai randomisé, 69% des 90 patients atteints de goutte qui n’étaient pas aux objectifs, et dont la dose d'allopurinol a été augmentée au-delà de 300 mg/jour atteignent un taux d’acide urique cible inférieur à 60 mg/l au cours d'une période de 12 mois, comparativement à 32% des 93 patients atteints de goutte qui sont restés à la même dose.
Ce sont les résultats d’une étude très intéressante parue dans Annals of the Rheumatic Disease.
Une étude randomisée
Avant la randomisation, les patients avaient tous pris au moins une dose d'allopurinol et avaient des taux d’uricémie de 60 mg/l ou plus.
Chez les patients dans le groupe augmentation de dose, l'allopurinol a été augmenté tous les mois de 50 mg/jour si la clairance de la créatinine était inférieure à 60 ml/min et de 100 mg/jour pour ceux avec une clairance de la créatinine supérieure ou égale à 60 ml/min. L'augmentation de la dose s'est poursuivie jusqu'à ce que les taux d’acide urique soient inférieurs à 60 mg/l au cours de trois visites consécutives ou que des effets indésirables se soient produits.
Un gain d’efficacité sans majoration des effets indésirables
Les taux d’acide urique chez ces patients ont diminué en moyenne de 15 mg/l, passant de 71,8 mg/l au départ à 57 mg/l après l'augmentation de la dose. Il s'agit d'une amélioration significative de 12 mg/l par rapport aux patients qui sont restés sur la même dose d'allopurinol, dont les taux d’acide urique ont diminué de 3,4 mg/l, en moyenne, en passant de 71,3 mg/l à 69 mg/l.
Il y a eu un certain nombre d'événements indésirables graves, les troubles cardiaques étant les plus fréquents : 35 sur 22 patients ayant eu une augmentation de la dose versus 43 sur 25 témoins. Cependant, seul un seul cas d'augmentation chez un patient du groupe progression de dose a été jugé lié à l'allopurinol. Par contre, aucun des 10 décès observés (cinq dans chaque groupe) n’a été lié au médicament.
Des anomalies modérées de la fonction hépatique se sont produites, mais à un taux similaire dans chaque groupe. Les élévations de gamma-glutamyl-transférase se sont produites plus souvent chez les patients du groupe augmentation de la dose, mais il y a eu seulement un petit nombre d'anomalies de grade supérieur, comparativement au groupe témoin.
En pratique
Malgré l'approbation de la Food and Drug Administration américaine pour des doses d’allopurinol allant jusqu'à 800 mg/jour, les doses au-dessus de 300 mg/jour sont rarement utilisés par les médecins, ce qui peut être lié à l'inertie thérapeutique ou aux craintes d’événements indésirables.
Chez les personnes atteintes de goutte, y compris celles souffrant d'insuffisance rénale, qui tolèrent des doses d'allopurinol (en les ajustant sur clairance de la créatinine), mais ne parviennent pas à atteindre l’objectif thérapeutique, l'augmentation très progressive de la dose pour atteindre le taux d’uricémie cible est efficace et bien tolérée.
La forte prévalence de la maladie rénale chronique dans leur population d'étude, associée à un niveau élevé de comorbidité et à un taux de goutte grave chez 44% des malades est un élément extrêmement rassurant en terme de représentativité des résultats.
Malgré les faibles niveaux d’acide urique atteints, les poussées de goutte n’ont pas été réduites de façon significative par rapport au groupe témoin ce qui incite à avoir une escalade de l'allopurinol qui doit être très progressive en particulier en cas d'insuffisance rénale chronique avec clairance de la créatinine inférieure à 60 ml/minute (les taux moyens d’acide inférieur à 60 mg/l n'ont pas été atteints avant le 7e mois dans l’étude) et le bénéfice est donc obtenu plus lentement.
Pour mémoire, la prescription de colchicine qui est recommandée lors de l’initiation du traitement ou lors de modification de doses, doit elle être surveillée et adaptée en fonction de la clairance de la créatinine.











