Médecine générale
Autisme : Trump lance l'opprobre sur le paracétamol pendant la grossesse
Pour satisfaire sa base MAGA, Donald Trump a relayé les infox de Kennedy, son Ministre de la Santé, sur le paracétamol pris pendant la grossesse, l'accusant d'augmenter le risque d’autisme. Si une association a été évoquée dans le passé, ces propos sont largement contredits par la communauté scientifique en l’absence de preuve solide.
- Pixavril / istock
Lundi 22 septembre, Donald Trump a affirmé que la prise de paracétamol par les femmes enceintes augmentait fortement le risque d’autisme chez l’enfant.
"Ne prenez pas de paracétamol. N’en prenez pas. Battez-vous comme une forcenée pour ne pas en prendre", a lancé le président américain lors d’une conférence de presse sur l’autisme. Des propos alarmistes qui ont immédiatement fait réagir la communauté scientifique.
"Aucun lien entre prise de paracétamol par la mère et risque d’autisme"
Le paracétamol est pourtant l’antalgique le plus couramment recommandé pendant la grossesse, contrairement à l’aspirine ou à l’ibuprofène, déconseillés en raison de leurs effets nocifs sur le fœtus. Depuis des décennies, il est prescrit contre la douleur et la fièvre, deux symptômes qui peuvent eux-mêmes comporter des risques pour la mère et l’enfant.
Si certaines recherches ont évoqué un possible lien entre paracétamol et troubles du développement, les preuves restent fragiles et contradictoires. "Les affirmations de Donald Trump sont plus que discutables", commente Andreas Werner, pédiatre et président de l’Association française de pédiatrie ambulatoire, auprès du HuffPost.
Il rappelle qu’une vaste étude suédoise, publiée en 2024 dans JAMA et portant sur 2,5 millions d’enfants, un nombre de cas bien supérieur aux travaux sur lesquels s'appuie le Département de la santé américain, "montre qu’il n’y a aucun lien entre prise de paracétamol par la mère et risque d’autisme, de TDAH et de déficience intellectuelle". "Et les autres études et méta-analyses sur le sujet soit ne donnent rien, soit montrent que cela n’a pas d’incidence."
La FDA, le gendarme du médicament aux Etats-Unis, a d’ailleurs rappelé qu’"aucun lien de cause à effet n’a été établi", même si elle recommande de prescrire "la dose la plus faible, pour la durée la plus courte possible". Mardi 23 septembre, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a de son côté confirmé que "les preuves [d’une association entre paracétamol et autisme] restent incohérentes".
Un consensus médical
Les affirmations de Donald Trump s'appuient néanmoins sur un débat existant parmi la communauté scientifique, et sur plusieurs études. En 2021, une centaine de chercheurs avaient publié une tribune dans Nature Reviews Endocrinology suggérant de limiter l’usage du paracétamol pendant la grossesse, par précaution. Mais les auteurs eux-mêmes soulignaient que des recherches supplémentaires étaient nécessaires pour établir un lien clair.
D’autres études, comme une analyse danoise de 2015 ou une méta-analyse de 2025 mentionnées par le HuffPost, ont entretenu le doute, mais sans apporter de preuves concluantes sur les mécanismes biologiques.
Les effets du médicament ou de la fièvre ?
"Si les scientifiques ne sont pas d'accord sur le sujet, c'est parce qu'ils n'emploient pas les mêmes méthodes, rappelle FranceInfo. Les questionnaires et les critères d'évaluation sont différents. Il est alors difficile de comparer leurs résultats. Et sur le fond, ces études à charge ne tiennent pas compte d'autres facteurs qui peuvent avoir un impact lourd sur le développement du bébé : les virus, la prématurité, les facteurs héréditaires, la prédisposition génétique… Tous ces facteurs sont susceptibles de causer des troubles du spectre autistique."
Par ailleurs, comme le rappelle à l’AFP David Mandell, psychiatre à l’université de Pennsylvanie, il reste difficile de distinguer les effets du médicament de ceux de la fièvre elle-même, sur le risque d’autisme. "On sait que la fièvre peut augmenter le risque de retard et de troubles du développement neurologique", souligne-t-il, appelant à la prudence dans l’interprétation des résultats.
Finalement, les autorités de santé, de l’Agence européenne du médicament à la FDA, maintiennent la même position : le paracétamol demeure l’antidouleur le plus sûr pour les femmes enceintes, à utiliser à faible dose et pour la durée la plus courte possible. Les risques liés au surdosage, notamment pour le foie, sont avérés, mais l’hypothèse d’un lien avec l’autisme n’est pas confirmée.











