Infectiologie
Syphilis et VIH : une seule dose de pénicilline retard suffit pour les stades précoces
Une étude multicentrique montre qu’une injection unique de benzathine pénicilline G est aussi efficace que trois doses hebdomadaires pour traiter la syphilis précoce, y compris chez les patients vivant avec le VIH. Ces résultats confortent les recommandations actuelles et allègent la pratique clinique.

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La syphilis demeure une infection sexuellement transmissible majeure par ses complications neurologiques, cardiovasculaires et obstétricales, ainsi que son lien étroit avec le VIH. Malgré l’usage de la benzathine pénicilline G en dose unique depuis les années 1950, le doute persistait quant à l’efficacité de ce schéma chez les patients coinfectés par le VIH, ce qui conduisait certains cliniciens à préférer trois injections hebdomadaires.
Dans un contexte de résurgence inquiétante de la syphilis, un essai contrôlé, ouvert, mené dans plusieurs centres américains, a randomisé 249 patients présentant une syphilis précoce (primaire, secondaire ou latente précoce) entre, soit une dose unique de 2,4 MUI, soit trois doses hebdomadaires de même intensité.
Selon les résultats publiés dans le New England Journal of Medicine, à six mois de suivi, la réponse sérologique, définie par une séroconversion ou une diminution d’au moins deux dilutions du titre du test de réagine plasmatique rapide (RPR), est obtenue chez 76 % des patients du bras monodose et 70 % de ceux du bras multidose, démontrant la non-infériorité du schéma court. Aucun cas de rechute clinique ni d’échec thérapeutique n’a été rapporté.
Une efficacité identique chez les patients vivant avec le VIH
Parmi les participants, 61 % sont séropositifs pour le VIH, avec un bon contrôle immunovirologique. Les taux de réponse sérologique sont superposables selon le statut VIH : 76 % après une dose et 71 % après trois doses, ce qui écarte la nécessité d’un traitement prolongé dans ce sous-groupe. La distribution selon le stade de la syphilis (19 % primaire, 47 % secondaire, 33 % latente précoce) ne modifie pas les résultats.
Le profil de tolérance est similaire entre groupes, dominé par des douleurs au site d’injection (76 % pour une dose, 85 % pour trois doses). Ces données rassurent sur l’efficacité et la sécurité du schéma simplifié, particulièrement dans un contexte de pénurie récurrente de benzathine pénicilline G, où la rationalisation des doses représente un enjeu majeur de santé publique.
Une étude robuste aux implications pratiques claires
Cet essai randomisé contrôlé, bien que de taille modeste (n = 249), fournit un signal fort : la dose unique est suffisante dans la syphilis précoce, indépendamment du statut VIH. Les limites incluent la courte durée de suivi (6 mois) et la surreprésentation d’hommes (97 %), qui restreignent la généralisabilité aux femmes et aux populations non occidentales. Néanmoins, la rigueur méthodologique, le design multicentrique et la cohérence avec les recommandations des CDC renforcent la validité externe.
Selon les auteurs, ces résultats simplifient la prise en charge, améliorent l’adhésion au traitement et réduisent le risque d’interruptions liées à la douleur ou aux contraintes logistiques des injections répétées. Ils plaident également pour la préservation des stocks de benzathine pénicilline G et pour une recherche renouvelée de molécules alternatives, notamment chez les patients allergiques à la pénicilline ou lors des grossesses.