Dermatologie

Isotrétinoïne & risque de suicide : de nouvelles données très rassurantes

Une vaste méta-analyse indique, qu’au niveau populationnel, le traitement par isotrétinoïne n’est pas associé à un risque accru de troubles psychiatriques et de suicide.

  • Daniil Dubov/iStock
  • 07 Mars 2024
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    Depuis sa commercialisation en 1984, l’isotrétinoïne fait l’objet d’une surveillance spécifique, notamment quant au risque d’aggravation ou de survenue des troubles de l’humeur.  Et, « bien que le lien entre la prise d’isotrétinoïne et l’apparition de ces troubles n’ait pas été établi, une attention particulière doit être portée à tout signe de changement de l’humeur », rappelle l’ANSM dans un dossier thématique publiée en juillet dernier.

    Les résultats d’une méta-analyse, publiée dans le JAMA Dermatology par une équipe de l’université de Singapour, sont à cet égard très rassurants, puisqu’au niveau populationnel, aucune augmentation du risque de suicide ou de troubles psychiatriques n’est rapportée chez les utilisateurs d’isotrétinoïne par rapport aux non-utilisateurs. Ce risque serait même réduit chez ces derniers 2 à 4 ans après le traitement.

    Plus d’un million et demi de patients inclus

    Les auteurs de ce travail ont colligé les données de 24 études randomisées publiées ayant évalué le risque de suicide et de troubles psychiatriques (risque absolu, relatif et facteurs de risque) depuis la commercialisation de cet anti-acnéïque. Elles portent sur 1 625 891 patients âgées de 16 à 38 ans.

    Le risque absolu de suicide, de tentative de suicide (TS), d’idées suicidaires et d’auto-agressivité est de moins de 0,5% par an.

    Le risque absolu de TS à un an sous isotrétinoïne est de 0,14 %, chiffre à mettre en regard de ceux rapportés dans deux études longitudinales menées chez des adolescents tout-venants (0,83 % et 1,3 %).

    De même, le risque absolu de dépression à un an sous isotrétinoïne est de 3,83 %, comparable à ce qui a été observée dans deux études antérieurs (3,3 % et 5,72%.  

    Il n’y a pas d’association entre le risque de TS durant le traitement et l’utilisation d’isotrétinoïne (risque relatif de 0,84, IC 95 % 0,77-0,95).

    A l’issue du traitement, le risque de TS est réduit chez les utilisateurs d’isotrétinoïne versus les non-utilisateurs : risque relatif 0,92 (IC 95 % 0,84-1) à deux ans, RR de 0,86 (IC 95 % 0,77-0,95) à 3 ans et de 0,85 (IC 95 % 0,72-1) à 4 ans.

    Concernant plus largement les troubles psychiatriques l’isotrétinoïne n’est pas associée à un risque accru (risque relatif de 1,08, IC 95 % 0,99-1,19).

    Les analyses de méta-régression montrent que le risque de dépression à un an est moindre dans les études ayant inclus des sujets plus âgés, et le risque de suicide à un an plus élevé dans celles ayant inclus un pourcentage plus notable de garçons.

    Des relations complexes

    Comme le rappellent les auteurs de ce travail, les relations entre isotrétinoïne et troubles de l’humeur sont complexes et peuvent être influencées par de nombreux biais. Notamment, il est possible que les sujets les plus à risque de ce type de troubles n’aient pas reçu ce traitement, ce qui peut faire sous-estimer le risque. A l’inverse, le suivi plus étroit des patients traités par isotrétinoïne pourrait conduire à une détection plus fréquente des troubles psychiatriques, ce qui toutefois n’a pas été les cas dans cette méta-analyse.

    Malgré ces données rassurantes, les patients doivent toujours bénéficier d’une prise en charge globale psychodermatologique.  Les praticiens doivent ainsi toujours rechercher et évaluer les éventuels signes de détresse psychologique avant et durant le traitement.

     

     

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