Neurologie

Sclérose en plaque : 1ère molécule efficace dans la forme progressive d’emblée

Dans la sclérose en plaque, un nouvel anticorps monoclonal anti-CD20 entièrement humanisé, l'ocrelizumab, démontre un bénéfice, non seulement dans la forme rémittente mais aussi, et pour la première fois, dans la forme progressive d’emblée.

  • ralwel/epictura
  • 23 Janvier 2017
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    Trois essais publiés dans le New England Journal of Medicine démontrent l’intérêt d’un nouvel anticorps monoclonal anti-CD20 entièrement humanisé, l'ocrelizumab, dans la sclérose en plaque, dans sa forme rémittente, mais aussi dans sa forme d’emblée progressive, ce qui est une première dans cette maladie.

    Efficacité dans la forme rémittente

    Deux essais identiques de 96 semaines, impliquant des patients ayant une sclérose en plaques dans sa forme rémittente, appelés OPERA I et OPERA II, ont évalué l'ocrelizumab, à une dose de 600 mg toutes les 24 semaines, par rapport à l'interféron bêta-1a à une dose de 44 μg trois fois par semaine.

    Les deux essais ont montré un bénéfice significatif de l'ocrelizumab sur le critère primaire, le taux de rechute annualisé, l'ocrelizumab ayant réduit ce taux de 46% ou 47% par rapport à l'interféron bêta-1a. Le pourcentage de patients avec une progression du handicap et le nombre de lésions à l'IRM étaient également significativement plus bas dans le groupe ocrelizumab.

    Efficacité dans la forme progressive d'emblée

    Pour la 1ère fois, dans l'essai ORATORIO versus placebo, et sur des patients atteints de sclérose en plaque progressive d'emblée, une forme de SEP jusqu'à maintenant non accessible à un traitement, le risque relatif de progression du handicap est environ 25% inférieur chez les patients qui ont reçu 600 mg d'ocrelizumab toutes les 24 semaines pendant au moins 120 semaines.

    De plus, le volume total de lésions cérébrales en séquence T2 sur l'IRM baisse avec l'ocrelizumab alors qu’elle augmente sous placebo. Dans la forme progressive d'emblée de la sclérose en plaque, il s'agit du premier traitement à démontrer un ralentissement significatif de la progression du handicap dans un essai de phase 3, ce qui représente donc une nouvelle étude de référence dans ce domaine.

    Des effets secondaires à évaluer sur le long terme

    Bien que l'ocrelizumab offre un nouvel espoir pour les patients atteints de sclérose en plaque progressive d'emblée, les effets secondaires doivent également être pris en compte dans le bénéfice global. Les agents qui ciblent le système immunitaire entraînent souvent un certain degré de suppression immunitaire, rendant potentiellement le malade sensible aux infections et altérant sa protection immunitaire contre le risque de néoplasies.
    La complication la plus redoutée dans la sclérose en plaque, avec les autres immunosuppresseurs utilisés, est l'infection par le virus JC. Celle-ci est en effet cause de la leucoencéphalopathie multifocale progressive. Cette affection n'a pas été observée avec la baisse des cellules B dans ces études.
    Cependant, il semble y avoir un risque plus élevé de réactivation d'un herpès et un possible risque néoplasique, en particulier avec le cancer du sein.
    Ces effets secondaires devront être soigneusement étudiés dans les futurs essais de phase 4 en post-AMM pour bien évaluer l'étendue du risque.

    Implication des lymphocytes B dans la SEP

    La plupart des traitements de la sclérose en plaque ciblent les cellules T, les flux de ces cellules vers le système nerveux central et les fonctions effectrices de ces lymphocytes, mais beaucoup ont aussi des effets associés sur les lymphocytes B. Puisque les lymphocytes B migrent également du sang périphérique vers le SNC chez les patients atteints de sclérose en plaque et que ces cellules y produisent des immunoglobulines, en particulier dans le liquide céphalo-rachidien, ce qui est une caractéristique de la maladie, ils constituent une cible dans cette affection. Plusieurs études de phase 1b et 2 ont validé l'efficacité d’un anticorps monoclonal chimérique anti-CD20, le rituximab, qui cible aussi les lymphocytes B. Ce traitement réduit les rechutes et l'activité IRM chez les patients atteints de sclérose en plaque rémittente mais ne ralenti pas de façon évidente la progression du handicap chez les malades atteints de la forme progressive d’emblée.

    En pratique

    La sclérose en plaques primaire progressive se caractérise par une progression insidieuse du handicap sans rémission au cours des années et une faible activité en IRM, et elle est généralement considérée comme moins inflammatoire et plus neurodégénérative que la forme récurrente de la sclérose en plaque.

    Une explication possible des effets positifs de l'ocrelizumab sur la forme progressive d’emblée, dans l'essai ORATORIO, est que la population de malades étudiée comprenait des patients plus jeunes (âge moyen, environ 45 ans) et ceux ayant une IRM active (plus de 25% avaient des lésions prenant le gadolinium), c’est-à-dire qui avaient une certaine inflammation à un stade précoce et encore réversible de la maladie.

    Cependant, la séparation continue des courbes de progression du handicap au-delà de 52 semaines dans l'essai ORATORIO, une période où l’effet anti-inflammatoire est essentiel, et la poursuite de l’amélioration dans une période où la maladie est relativement non-inflammatoire suggère que d’autres mécanismes d'action peuvent jouer un rôle dans la forme progressive d’emblée de la sclérose en plaques (anticorps anti-myéline, anti-neurones et anti-glie).

     

    Hauser SL, Waubant E, Arnold DL, et al. B-cell depletion with rituximab in relapsing-remitting multiple sclerosis. N Engl J Med 2008;358:676-688.

    Hauser SL, Bar-Or A, Comi G, et al. Ocrelizumab versus interferon beta-1a in relapsing multiple sclerosis. N Engl J Med 2017;376:221-234.

    Montalban X, Hauser SL, Kappos L, et al. Ocrelizumab versus placebo in primary progressive multiple sclerosis. N Engl J Med 2017;376:209-220.

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