Diabétologie
Diabète de type 2 : observance modeste des agonistes du GLP1 en vie réelle après 65 ans
Près de 6 diabétiques de type 2 américains sur 10 et 3 Japonais sur 10 interrompent leur traitement par le semaglutide dans l’année suivant l’initiation de cet agoniste des récepteurs du GLP-1 injectable. Les comorbidités cardiovasculaires et rénales, où ce traitement est de haute valeur ajoutée, sont paradoxalement associées à davantage d’arrêts.

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Dans un contexte d’essor de l’utilisation du sémaglutide pour la réduction du risque cardiométabolique, l’observance thérapeutique conditionne l’efficacité réelle de cet agoniste des récepteurs du GLP-1 (aGLP1). Les études antérieures rapportent des taux élevés d’arrêt pour la classe des aGLP1, mais les données spécifiques au sémaglutide injectable chez les sujets âgés restaient limitées. À partir de bases nationales, cette étude binationale dans 2 systèmes de prise en charge a inclus 327 074 adultes de plus de 65 ans avec diabète ayant initié le sémaglutide injectable : 318 543 aux États-Unis (âge moyen 71,7±5,3 ans ; 55,0 % de femmes) et 8 531 au Japon (77,3±7,3 ans ; 49,8 % de femmes).
Selon les résultats publiés dans le JAMA Cardiology, à 12 mois, 59,5 % des patients américains et 30,8 % des patients japonais ont interrompu tout aGLP1 (définition : interruption ≥60 jours), tandis que 2,8 % et 10,1 % respectivement avaient basculé vers le sémaglutide oral ou un autre aGLP1. L’essentiel tient donc à une fréquence d’arrêt élevée dans deux systèmes de santé très différents, avec un gradient défavorable aux États-Unis où il existe des problèmes de remboursement.
Plusieurs facteurs cliniques sont associés à l’arrêt
Au-delà des taux bruts, plusieurs facteurs cliniques sont associés à l’arrêt. En analyse multivariée, la maladie rénale chronique augmente la probabilité de discontinuation de +2,27 points de pourcentage (IC à 95 % 1,73–2,82) aux États-Unis et de +6,22 points (IC à 95 % 4,21–8,24) au Japon. Un antécédent d’AVC s’accompagnait d’un excès de +1,94 point (IC à 95 % 1,29–2,59) aux États-Unis et de +2,84 points (IC à 95 % 0,34–5,34) au Japon. À l’inverse, l’affiliation conjointe Medicare–Medicaid, indicateur d’un reste à charge moindre, est associée à moins d’arrêts aux États-Unis (−11,89 points ; IC à 95 % −12,32 à −11,46) par rapport à Medicare seul.
Ces signaux convergent vers un double déterminant, individuel et structurel. La tolérance n’était pas directement mesurée, mais des causes plausibles d’arrêt incluent l’intolérance digestive, les ruptures d’approvisionnement et le coût pour le patient ; l’écart de persistance en faveur du Japon pourrait refléter des restes à charge plus faibles. Le fait que les patients avec maladie rénale chronique ou maladie cardiovasculaire interrompent davantage est particulièrement préoccupant, ces groupes étant censés tirer le plus grand bénéfice clinique des aGLP1.
Méthodes, représentativité, implications pratiques et perspectives
Il s’agit d’analyses rétrospectives en « real-world data » à partir d’un échantillon exhaustif de réclamations Medicare (fee-for-service et Advantage) aux États-Unis entre 2018 et 2022 et de la base japonaise DeSC entre 2018 et 2023. Étaient éligibles les adultes ≥65 ans avec diabète initiant le sémaglutide injectable ; la discontinuation était définie par un gap ≥60 jours sans aucun aGLP1. Les caractéristiques ont été comparées par tests de Chi² et t, et les associations estimées par modèles multivariés ; les analyses étaient en « complete-case ». La taille d’échantillon et la nature administrative des sources renforcent la validité externe, mais plusieurs limites doivent tempérer l’interprétation : absence de données sur le reste à charge individuel, sur les prescripteurs et les motifs d’arrêt, incertitude d’extrapolation aux patients plus jeunes, aux non-diabétiques et à l’initiation d’un sémaglutide oral.
Selon les auteurs, ces résultats plaident pour une stratégie proactive de persistance chez les plus de 65 ans : évaluation pré-thérapeutique de la tolérance et de la poly-médication, titration et gestion anticipée des effets indésirables, éducation structurée avec relances programmées les 3 à 6 premiers mois, et réduction du reste à charge (couverture complémentaire, alignement des prescriptions sur les formulaires). Les organisations devraient viser des parcours intégrant pharmaciens et infirmiers, et un suivi rapproché des patients à haut risque cardiovasculaire ou avec MRC.