Rhumatologie

Arthrose des mains : la prise en charge ergothérapeutique ferait jeu égal

Chez 374 Norvégiens atteints d’arthrose digitale banale, un suivi conduit par un ergothérapeute obtient le même taux de réponse OMERACT-OARSI à 6 mois (28 %) qu’un suivi rhumatologique intégrant des infiltrations. L’approche paramédicale s’avère également sûre et moins coûteuse pour le système de santé.

  • 30 Jun 2025
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    L’arthrose banale de la main, de plus en plus fréquente avec le vieillissement, se traite par des mesures non pharmacologiques ; pourtant, la plupart des patients sont encore orientés vers le spécialiste. Dans cet essai ouvert randomisé multicentrique, publié dans The Lancet Rheumatology, 374 adultes (âge moyen 63,6 ans ; 81 % de femmes) ont été randomisés entre, un protocole ergothérapeutique (éducation ergonomique, orthèses de pouce, programme d’exercices, aides techniques) et un protocole rhumatologue (conseils + infiltrations de corticoïdes).

    Évaluées sur le critère principal de la réponse OMERACT-OARSI à M6, l’approche ergothérapeutique est aussi efficace que l’approche médicalisée : 28,6 % de répondeurs dans le bras ergothérapeute contre 28,4 % dans le bras médecin ; différence 0,2 % (IC à 95 –9,6 ; +9,8), OR 1,01 (0,63-1,62) = non-infériorité démontrée (marge 15 %).

    Déléguer sans dégrader

    À 12 mois, la parité persiste pour la douleur (variation EVA –1,5 ± 2,2 dans les deux groupes), la raideur matinale et la force de préhension. Aucun événement indésirable grave n’a été signalé ; 6 % des patients infiltrés ont eu une douleur post-procédure transitoire, contre 4 % d’irritations cutanées liées aux orthèses.

    L’analyse de coût-utilité, prenant la perspective du payeur national, intègre consultations, dispositifs et actes : coût moyen par patient 345 € dans le bras ergothérapeute vs 512 € dans le bras rhumatologue. Au seuil de disposition à payer ≤ 23 255 £/QALY (≈ 27 000 €), la probabilité que l’ergothérapie soit la stratégie la plus efficiente dépasse 75 % ; au-delà, l’écart de qualité de vie (+0,006 QALY à M12 en faveur des infiltrations) peut justifier la prise en charge médicale chez les décideurs acceptant des coûts plus élevés.

    Task-shifting : vers un nouveau parcours main

    L’essai, conduit dans deux hôpitaux norvégiens, a utilisé une randomisation informatisée et une analyse en intention de traiter, limitant les biais de sélection. L’absence d’aveugle est inhérente à l’intervention mais compensée par l’utilisation de critères composites validés. Les participants reflètent la population réelle (âge, sexe, sévérité modérée) ; toutefois, la généralisation à des formes érosives sévères ou aux systèmes de soins sans accès large à l’ergothérapie mérite confirmation.

    Selon les auteurs, les données confortent les recommandations internationales de task-shifting pour l’arthrose des mains habituelle : pour une pathologie chronique à bas risque, le premier recours auprès d’un ergothérapeute bien formé permet d’optimiser les ressources médicales sans sacrifier le résultat clinique. À court terme, l’intégration systématique d’ateliers d’auto-prise en charge ergothérapeutique et d’adaptation fonctionnelle dans les centres d’arthrose de la main pourrait réduire les listes d’attente pour les infiltrations et concentrer l’expertise rhumatologique sur les cas complexes. Les perspectives de recherche incluent la combinaison ergothérapie + biomatériaux injectables, l’évaluation en soins primaires et l’impact à long terme sur la chirurgie de remplacement trapézo-métacarpienne.

     

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