Dermatologie

Psoriasis cutané : pas de bénéfice évident à associer méthotrexate et adalimumab

L’association d’emblée méthotrexate–adalimumab n’améliorerait ni la persistance du traitement par anticorps monoclonal, ni la réponse clinique à celui-ci. La réduction observée des anticorps anti-médicament serait sans impact clinique et la tolérance demeure identique.

  • 05 Jun 2025
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    L’adalimumab, un anti-TNF de type anticorps monoclonal humanisé, voit sa persistance thérapeutique parfois limitée par l’immunogénicité. En rhumatologie, associer une dose de méthotrexate (MTX) hebdomadaire réduit les anticorps anti-médicament (anti-ADA) et améliore l’efficacité. Pour transposer ce concept en dermatologie, les auteurs ont répliqué, au sein du registre britannique BADBIR (2007-2021), le protocole de l’essai OPTIMAP. Au total 1 784 adultes débutant l’anti-TNF ont été étudiés : 231 recevaient simultanément du MTX à dose clinique (médiane 12 mg/sem.), 1 553 étaient sous adalimumab seul.

    Selon les résultats publiés dans le JAMA Dermatology, le critère principal – persistance du traitement par adalimumab à 1 an – s’établit à 79,1% sous bithérapie versus 78,1% en monothérapie (différence brute +1,0 %; IC à 95% –7,0 à +8,9), sans supériorité statistique. Les profils de base étaient superposables : âge médian 44 ans, 42% de femmes et PASI moyen 14. Même après ajustement, l’écart absolu de persistance à 1 an reste marginal (+1 % ; IC à 95% –7 à +9) et bien en-deçà du seuil clinique de 28 % anticipé par OPTIMAP.

    La survie médiane du traitement à 3 ans reste identique

    Les critères secondaires confirment cette neutralité. La réponse PASI75 est obtenue par 49,4% (IC à 95 % 31,5-67,3) des patients avec MTX contre 52,0 % (47,7-56,3) sous adalimumab seul à 1 an et par 37,2 % versus 32,4 % à 3 ans (différences –2,5 % puis +4,9 %, non significatives). La survie médiane du traitement à 3 ans reste identique (52,8 % vs 51,2 %).

    Les concentrations sériques d’adalimumab ne diffèrent pas, alors que les titres d’adalimumab diminuent de 124 UA/mL (IC à 95 % –200,5 à –46,9) avec le MTX, sans traduction clinique évidente. Au terme de 3 ans, les arrêts pour inefficacité concernent 28 % des patients dans chaque groupe, et ceux pour effets indésirables 8 %. La chute moyenne des anticorps anti-ADA n’élève ni les concentrations d’adalimumab ni la probabilité de réponse prolongée.

    Des données observationnelles avec nombreux ajustements

    L’approche méthodologique de « target-trial emulation » apporte une certaine robustesse aux données observationnelles : mêmes critères d’éligibilité, d’initiation simultanée et de suivi qu’un essai randomisé, ajustement sur dix-sept facteurs de confusion par pondération inverse des probabilités et modèles de survie paramétriques flexibles. La taille de cohorte, plus de sept fois celle d’OPTIMAP, associe puissance et représentativité (42 % de femmes, IMC médian 29 kg/m²). Parmi les limites : la dose de MTX qui est hétérogène et souvent modérée, le manque de données de qualité de vie et la pharmacocinétique incomplète.

    Selon les auteurs, ces données confirment que la dose de MTX utilisée est trop faible pour majorer l’efficacité de l’anti-TNF, alors qu’elle alourdit la surveillance. Dans un paysage où les biosimilaires d’ustekinumab ou d’anti-IL-17/23 deviennent accessibles, un switch précoce paraît plus coût-efficace qu’une bithérapie peu rentable. Les futurs essais devront tester des posologies de méthotrexate ≥ 20 mg/semaine, standardiser le suivi pharmacocinétique et mesurer la qualité de vie.

     

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