Rhumatologie

Cancer, PR et immunothérapie : pas de surrisque évident de mortalité

L’immunothérapie des cancers chez les personnes souffrant d’une maladie auto-immune, comme la polyarthrite rhumatoïde, reste possible et une éventuelle poussée inflammatoire reste le plus souvent modérée et gérable par les traitements disponibles

  • 04 Avr 2023
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    Les inhibiteurs de point de contrôle, tels que les anticorps anti-CTLA4, anti-PD1 et anti-PDL1, sont de nouveaux traitements utilisés dans l’immunothérapie de certains types de cancer. Cependant, ils peuvent affecter le système immunitaire et provoquer des effets secondaires auto-immuns, ce qui peut être problématique chez les patients atteints de polyarthrite rhumatoïde, ou d’une autre maladie auto-immune.

    Des études ont montré que l'utilisation de ces inhibiteurs de point de contrôle chez des patients atteints de polyarthrite rhumatoïde peut entraîner une aggravation de la maladie, des rechutes et des exacerbations des symptômes inflammatoires.

    L’immunothérapie est possible en cas de polyarthrite rhumatoïde

    Les patients atteints d'une polyarthrite rhumatoïde qui reçoivent des inhibiteurs de points de contrôle immunitaires pour le traitement d'un cancer pourraient également être exposés à un risque accru de mortalité.

    Dans une vaste étude de cohorte rétrospective et comparative publiée dans The Lancet Rheumatology, les patients atteints d'une polyarthrite rhumatoïde préexistante et traités par des inhibiteurs de point de contrôle immunitaire ont un risque de mortalité et d'effets indésirables graves liés à l'immunité similaire à celui des comparateurs appariés.

    Bien que les patients atteints d'une polyarthrite rhumatoïde aient été plus souvent susceptibles de présenter des effets indésirables immunitaires, il s’agirait principalement de poussées légères de polyarthrite rhumatoïde, gérable avec les traitements disponibles.

    Pas de surmortalité

    60 (69%) des patients atteints de polyarthrite rhumatoïde contre 127 (63%) témoins sont décédés (rapport de risque ajusté [HR] de 1,16 [IC à 95% 0,86-1,57] ; p=0.30). 53 (61%) patients atteints de polyarthrite rhumatoïde contre 99 (49%) comparateurs ont eu un effet indésirable lié au système immunitaire tous grades confondus (HR ajusté de 1,72 [IC à 95% 1,20-2,47] ; p=0.058).

    Il y a eu deux (1%) décès (effets indésirables de grade 5) liés à l'immunité en lien avec une myocardite, mais tous deux dans le groupe comparatif. Des poussées de polyarthrite rhumatoïde sont survenues chez 42 (48%) patients atteints de polyarthrite rhumatoïde, et des arthrites inflammatoires chez 14 (7%) comparateurs (p<0.0001).

    Les patients atteints de polyarthrite rhumatoïde seraient moins susceptibles d'avoir une éruption cutanée ou une dermatite (cinq [6%] contre 28 [14%] ; p=0.048), une endocrinopathie (deux [2%] contre 22 [11%] ; p=0.0078), une colite ou une entérite (six [7%] contre 28 [14%] dans le groupe de comparaison ; p=0.094) et une hépatite (trois [3%] contre 19 [9%] ; p=0.043).

    Une large étude de cohorte

    Cette étude de cohorte rétrospective et comparative a été menée au Mass General Brigham Integrated Health Care System et au Dana-Farber Cancer Institute à Boston (MA, USA).

    Les patients atteints d’une polyarthrite rhumatoïde préexistante devaient répondre aux critères 2010 de l'American College of Rheumatology-European Alliance of Associations for Rheumatology (ACR-EULAR). Pour chaque cas de polyarthrite rhumatoïde préexistante, les chercheurs ont apparié jusqu'à trois témoins ne souffrant pas de polyarthrite rhumatoïde en fonction du sexe, de l'année civile, de la cible de l'inhibiteur de point de contrôle immunitaire, ainsi que du type et du stade du cancer.

    Les principaux critères d'évaluations étaient le délai entre la date d'indexation et le décès et le délai avant le premier effet indésirable lié à l'immunité, mesurés à l'aide d'un modèle de risques proportionnels de Cox ajusté. Les décès ont été identifiés par l'examen des dossiers médicaux et des notices nécrologiques.

    11 901 patients qui ont commencé à prendre des inhibiteurs de points de contrôle immunitaires pour le traitement du cancer entre le 1er avril 2011 et le 21 avril 2021 ; parmi eux, 101 répondaient aux critères ACR-EULAR 2010 pour la polyarthrite rhumatoïde. Les auteurs ont apparié 87 patients atteints de polyarthrite rhumatoïde préexistante à 203 témoins ne souffrant pas de polyarthrite rhumatoïde. L'âge médian était de 71-2 ans.

    L’immunothérapie de la polyarthrite rhumatoïde est possible

    Dans certaines études, l'utilisation d'inhibiteurs de points de contrôle chez les patients atteints de cancer et de polyarthrite rhumatoïde a été associée à un risque accru d'événements indésirables graves et d'hospitalisations, mais il n'y a pas de données claires sur un surrisque de décès. Les résultats de cette étude rétrospective suggèrent que cette population de patients peut recevoir en toute sécurité des inhibiteurs de points de contrôle immunitaires pour le traitement d’un cancer associé.

    Il est important de noter que le traitement du cancer chez les patients atteints de polyarthrite rhumatoïde peut être complexe en raison d’interactions potentielles entre le traitement de la polyarthrite rhumatoïde et ceux du cancer, ainsi que des risques associés à l'utilisation de certains traitements anticancéreux chez les patients atteints de polyarthrite rhumatoïde. Une évaluation complète des risques et des avantages est donc nécessaire pour déterminer la meilleure approche de traitement pour chaque patient.

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    JDF