Pneumologie

COVID-19 : des trajectoires de récupération respiratoire après les formes sévères

Un volumineux travail sur la cohorte française RE2COVERI a montré une amélioration des séquelles fonctionnelles et radiologiques au cours de la première année post-infection SARS-CoV2 avec une persistance de séquelles résiduelles, cliniques et radiologiques, pour une proportion significative d'entre eux. D’après un entretien avec Frédéric SCHLEMMER.

  • 23 Mar 2023
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    Une étude française, dont les résultats sont parus en février 2022 dans l’European Repsiratory Journal a fait le point sur les trajectoires de récupération respiratoire après une infection COVID-19 sévère, grâce à la cohorte RE2COVERI. Il s’agit d’une étude pragmatique de suivi à un an, présentée au CPLF le 28 janvier dernier et visible sur le site du CPLF. L’étude est multicentrique, réalisée au sein de 13 centres, dont 8 étaient de l’AP-HP et 5 étaient des établissements hospitaliers (Amiens, Bordeaux, Créteil, Nancy, Versailles). Les patients inclus dans la cohorte ont été évalués entre mai et novembre 2020. Ils ont tous été hospitalisés au moins 7 jours  avec un minimum d’oxygénothérapie de 3l/min pour un SARS-COV2. Ont été exclus les femmes enceintes, les patients insuffisants respiratoires chroniques et ceux n’ayant pas de couverture sociale, mais n’ont pas été exclus les patients ayant une BPCO ou un asthme . Au total, 485 patients ont été inclus : 173 d’entre eux avaient  bénéficié d’une oxygénothérapie simple lors de leur hospitalisation, 96 avaient eu un support respiratoire non invasif (VNI, oxygénothérapie à haut débit ou CIPAP) et 216 avaient été intubés pendant au moins 48 heures. Les caractéristiques des patients de ces 3 groupes ont été observées : il y avait plus de patients en surpoids dans le groupe de patients intubés, qui ont pour moitié bénéficié d’oxygénothérapie à haut débit ou de CIPAP avant l’intubation. Un grand nombre de patients a reçu des antibiotiques  et des anticoagulants et 20% d’entre eux ont bénéficié d’une corticothérapie. La moitié des patients a fait un séjour en soins de suite, de manière plus fréquente dans le groupe des patients intubés.

     

    Des séquelles cliniques et radiologiques

    Le docteur Frédéric SCHLEMMER, pneumologue à l’hôpital Henri Mondor de Créteil et auteur de cette étude, rappelle que, depuis la première vague de la pandémie de COVID-19, il est fortement suspecté que les patients ayant été sévèrement atteints auraient des séquelles respiratoires, telles que celles que l’on observe après d’autres types de SDRA. L’objectif de ce travail a donc été de sélectionner les patients les plus à risque de séquelles et de les évaluer 3 mois après leur hospitalisation et, pour certains, 6 et 12 mois après. Leur récupération respiratoire, les séquelles radiologiques et l’impact sur leur qualité de vie ont donc été évalués en fonction de facteurs prédictifs tels que les comorbidités, l’âge, etc… Les résultats de ce travail ont montré qu’un tiers des patients ont été revus jusqu’à 12 mois, y compris des patients n’ayant bénéficié que d’une oxygénothérapie au cours de leur hospitalisation. Les principales séquelles observées étaient un essoufflement, un ralentissement fonctionnel significatif (capacité vitale inférieure à 80% de la théorique) et des séquelles scanographiques. Les symptômes généraux les plus fréquemment relevés étaient la dyspnée, la fatigue, le syndrome d’apnée du sommeil, une faiblesse musculaire, une toux et des troubles neuropsychiques à type de difficultés de concentration, d’anxiété, de dépression, de syndrome post-traumatique et de troubles de la mémoire. Sur le plan radiologique, plus de 40% de patients avaient des anomalies scanographiques significatives persistantes au cours de leur suivi. Sur le plan fonctionnel respiratoire, un tiers des patients présentait un syndrome restrictif à 3 mois et un sur deux avait une DLCO inférieure à 50%. Tous ces résultats étaient corrélés à la sévérité initiale.

     

    Une trajectoire fonctionnelle respiratoire et des facteurs prédictifs

    Frédéric SCHLEMMER explique que le suivi prolongé de ces patients a mis en évidence des trajectoires fonctionnelles respiratoires, avec une amélioration de la fonction respiratoire importante surtout au cours des 6 premiers mois mais qui peut être observée jusqu’à 12 mois après l’hospitalisation. Sur le pan radiographique, les résultats sont superposables au début mais l’amélioration radiologique est moins sensible ensuite. Frédéric SCHLEMMER souligne que des facteurs péjoratifs ont été mis en évidence, notamment au cours de la baisse de la DLCO, comme le sexe féminin, la présence d’une maladie respiratoire sous-jacente, l’immunodépression, les anomalies scanographiques initiales, une intubation supérieure à 14 jours ou encore la corticothérapie en phase aigüe (attention toutefois au biais d’indication, ces résultats ayant été observés en début de pandémie). Les facteurs prédictifs positifs étaient le sexe masculin  et le surpoids. Toutefois, tous ces facteurs avaient peu d’impact sur l’évolution respiratoire après 3 mois. Ce travail représente donc une description précise des suites des COVID sévères, en caractérisant les patients à risque, qui doivent bénéficier d’un suivi à un an. Aujourd’hui la majorité des patients s’améliore et va bien récupérer, même au-delà de un an. Pour Frédéric SCHLEMMER, un suivi doit être systématiquement proposé aux patients oxygéno-requérants ayant une hospitalisation prolongée pour COVD sévère.

     

     

    En conclusion, les patients ayant été hospitalisés pour COVD sévères et ayant eu besoin d’une assistance respiratoire présentent des séquelles cliniques et radiologiques qui s’améliorent au moins jusqu’à un an après. Un suivi de ces patients est donc incontournable. Un beau travail pour affronter de nouvelles vagues…

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    JDF