Pneumologie

Cancer du poumon : un rôle protecteur de la glucosamine alimentaire ?

La glucosamine, consommée en compléments alimentaires diminuerait le risque de cancer du poumon et de la mortalité toutes causes confondues. Une volumineuse étude de cohorte évalue ce potentiel effet protecteur chez des consommateurs réguliers de glucosamine alimentaire, malgré quelques biais, surtout liés à l’auto-déclaration des sujets inclus. D’après un entretien avec Fabien ROLLAND.

  • 05 Mai 2022
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    Une étude, dont les résultats sont parus en mars 2022 dans l’European Respiratory Journal, a cherché à évaluer l’intérêt de la glucosamine alimentaire sur le risque de développer un cancer du poumon. Il s’agit d’une étude de cohorte, dont les sujets sont issus de la Bio Bank britannique. Au total, 439 393 participants ont été enrôlés, de 2006 à 2010 et suivis jusqu’en 2020, c’est-à-dire pendant 11 ans, en moyenne. Les auteurs ont mesuré le nombre de sujets ayant déclaré consommer régulièrement de la glucosamine alimentaire et ils ont associé ce résultat au taux d’incidence de cancer du poumon chez tous les sujets ainsi qu’au taux de mortalité par cancer du poumon. Ils ont ajusté leurs résultats en fonction de différents facteurs comme le sexe, la pratique sportive, l’âge ou encore les habitudes alimentaires.

    Une belle étude de cohorte

    Le docteur Fabien ROLLAND, chef de pôle du service de Pneumologie de l’Hôpital de Cannes, explique que les analyses de cohortes sont de plus en plus utilisées car les Bio Bank se développent constamment. Il précise que la Bio Bank anglaise est l’une des plus importants du monde et que cette volumineuse cohorte a permis de rendre un travail intéressant. Il rappelle que la glucosamine alimentaire est un complément alimentaire non vitaminique et non minéral, principalement utilisé dans la prévention de l’arthrose, raison pour laquelle ce produit à l’AMM en France. La glucosamine représente l’un des compléments alimentaires les plus utilisés aux USA, puisque 3% de la population américaine la consomme régulièrement. Sont effet « anti-inflammatoire » sans effet secondaire significatif apporte un bénéfice non négligeable. Fabien ROLLAND précise qu’il n’existe pas d’étude randomisée sur le lien entre glucosamine alimentaire et risque de cancer du poumon. De précédentes études de cohorte auraient montré une diminution de la mortalité toutes causes confondues, par accident cardio vasculaire ou par cancer du poumon chez les consommateurs réguliers de glucosamine. Dans cette étude, sur les 439 000 participants, 82 000 ont déclaré être des consommateurs réguliers de glucosamine. Le risque de cancer pulmonaire et la mortalité par cancer du poumon chez ces sujets étaient significativement inférieurs, avec un odds ratio de 0,84, notamment chez ceux qui avaient des antécédents familiaux de cancer.

    Mais quelques biais

    Fabien ROLLAND souligne que, bien que ce travail soit d’un grand intérêt, il existe un biais lié à l’auto-déclaration des participants. Il rappelle que la Bio Bank britannique représente 5% de la population anglaise, ce qui est peu représentatif de la population générale, ce qui est toujours critiquable dans les études de Bio Bank. Il précise également que cette étude n’est pas randomisée, ce qui ne peut pas éliminer ce biais, malgré l’ajustement selon les différents facteurs. En effet, Fabien ROLLAND relève que les consommateurs réguliers de glucosamine alimentaire sont principalement des personnes attentives à leur hygiène de vie et qui ont donc moins tendance à développer des cancers. D’autre part, dans cette étude, les participants ont simplement coché « oui » à la consommation régulière de glucosamine mais sans préciser le rythme des prises et leur dosage. Une étude réalisée en 2012 avait déjà montré que l’incidence des adénocarcinomes diminuait si a prise de glucosamine était supérieure à 4 fois par semaine. Fabien ROLLAND regrette que, dans cette étude, on ne connaisse pas les doses consommées, ce qui aurait permis de de déterminer s’il existe un effet dose.

     

    En conclusion, la glucosamine alimentaire aurait un effet protecteur concernant le risque et la mortalité par cancer du poumon, chez les consommateurs réguliers. Toutefois, des études randomisées et précisant un éventuel effet dose sont encore nécessaires pour apporter des preuves supplémentaires.

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    JDF