Onco-Sein
Cancer du sein HER2+ à haut risque : Trastuzumab Deruxtecan comme nouveau standard adjuvant
Présenté en plénière à l’ESMO 2025, l’essai DESTINY BREAST 05, démontre une réduction de 53 % du risque de récidive en maladie invasive du Trastuzumab Deruxtecan comparativement au T-DM1, des patientes HER2+ localisées, considérées à haut risque post traitement néoadjuvant.
- Mohammed Haneefa Nizamudeen/iStock
La prise en charge des cancers du sein localisés, HER2 surexprimé, depuis la publication des données de l’essai KATHERINE, s’oriente vers une approche très majoritairement néo adjuvante. La publication des données récentes à 8 ans confirme le bénéfice du TDM1 vs trastuzumab. Pour autant, on estime à plus de 30 % de risque de rechute en maladie invasive à 7 ans, en cas de maladie résiduelle, notamment ganglionnaire post chimiothérapie néoadjuvante. Sur la base, en autres, des données de supériorités du Trastuzumab Deruxtecan comparativement au TDM1, chez les patientes métastatiques, l’étude DESTINY BREAST 05 s’est intéressée à son positionnement en adjuvant pour ces patientes étiquetées à haut risque.
Une augmentation de 8 % de la survie sans maladie invasive
En pratique, l’étude a concerné 1 635 patientes suivies pour un cancer du sein, HER2 surexprimé, localisé non métastatique, définies comme étant à haut risque de récidive, par la présence d’une maladie résiduelle mammaire et/ou ganglionnaire post prise en charge néoadjuvante. Les patientes devaient être porteuse au diagnostic d’un cancer du sein non opérable (cT4, N0-3 ou cT1-3, N2-3), ou bien opérable avec les caractéristiques suivantes (cT1-3, N0-1).
Elles bénéficiaient d’un traitement néoadjuvant, d’au moins 16 semaines, devant comporter au moins 9 semaines de Trastuzumab -/+ Pertuzumab, et au moins 9 semaines de Taxanes. La randomisation était de 1 : 1. En pratique, 818 patientes ont reçu en adjuvant du T-DXd (5,4 mg/kg) et 817 du T-DM1 (3,6 mg/kg), toutes les 3 semaines, pour 14 cycles. En cas d’indication, selon les pratiques courantes, la radiothérapie était réalisée soit concomitamment, soit de manière séquentielle. La stratification était faite selon l’opérabilité primaire vs inopérable au diagnostic, un simple vs double blocage HER2, le statut des récepteurs hormonaux, la présence ou non d’un résidu tumoral ganglionnaire post traitement néoadjuvant. Le critère de jugement principal était la survie sans maladie invasive, les critères de jugement secondaire la survie sans maladie, la survie globale et la tolérance.
9,6 % de pneumopathie interstitielle
Le suivi médian était de 29.9 mois. L’âge médian était de 50 ans, 82 % des patientes étaient HER2 3+, 71 % RH+. Plus de 52 % des patientes étaient inopérables au diagnostic, et 80 % présentaient une maladie résiduelle ganglionnaire post traitement néoadjuvant, qui comportait pour 78 % des patientes un double blocage HER2, et 50 % des anthracyclines. Pour la radiothérapie 93 % des patientes en ont bénéficié, dont 56 % de manière concomitante.
Le taux de survie sans maladie invasive à 3 ans était de 92,4 % dans le bras T-DXd vs 83,7 % dans le bras T-DM1 (HR 0,47, IC95 % 0,34-0,66, p < 0,0001), soit une réduction de 53 % du risque de maladie invasive.
Ce bénéfice est retrouvé dans tous les sous-groupes. Il s’agissait majoritairement de métastases à distance : 42 pour le bras T-DXd et 77 dans le bras T-DM1, dont 17 vs 25 respectivement au niveau cérébral. Le taux de survie sans maladie invasive spécifiquement au niveau cérébral à 3 ans était de 97,6 % vs 95,8 % respectivement.
Le taux de survie sans maladie à 3 ans était de 92,3 % vs 83,5 % respectivement (HR 0,47, p < 0,0001), les données de survie globale sont immatures, avec seulement 2,9 % d’événements survenus, et des taux à 3 ans de 97,4 % dans le bras T-DXd vs 95,7 % dans le bras T-DM1 (HR 0,61).
La médiane de durée de traitement était de 9,8 et 9,7 mois respectivement, et 72,3 % des patientes du bras T-DXd vs 76,3 % du bras T-DM1 ont bénéficié des 14 cycles adjuvants. La tolérance a été marquée par la présence de toxicité de grade ≥ 3 chez 50,6 % et 51,9 % des patientes respectivement : avec 9,6 % de pneumopathies interstitielles, dont 2 décès dans le bras T-DXd vs 2,5 % dans le bras T-DM1. A noter également 5 décès dans le bras T-DM1, non imputable au traitement.
Au final, sur ces données, le Trastuzmab deruxtecan va probablement rentrer rapidement dans notre pratique adjuvante. Pour autant, au vu de l’agressivité tumorale initiale, avec plus de 50 % des patientes non opérables, se pose la question de savoir s’il est licite de le proposer à toute patiente avec résidu tumoral, même faible, quand on voit la toxicité non négligeable ? Dans la même idée, doit on réaliser les 14 cycles prévus ?








