Onco-Sein
Cancer du sein RH+ HER2- sans envahissement ganglionnaire : quelle place pour les anthracyclines ?
Cette analyse post-hoc de l’essai TAILORx confirme que seules les patientes HR+/HER2− sans atteinte ganglionnaire, avec un score de récidive (RS) ≥ 31, tirent un bénéfice significatif de l’ajout d’anthracyclines aux taxanes.
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- Rasi Bhadramani/iStock
L’association anthracyclines-taxanes reste le protocole de référence de chimiothérapie pour les cancers du sein localisés HR+ HER2− à haut risque. Cependant, la toxicité des anthracyclines (cardiotoxicité, leucémies secondaires) a conduit à explorer des alternatives.
Plusieurs essais ont rapporté des résultats mitigés quant au bénéfice réel des anthracyclines par rapport à des schémas sans anthracycline, tels que le taxane-cyclophosphamide (TC). Parallèlement, l’introduction des signatures génomiques a permis d’affiner la sélection des patientes candidates à une chimiothérapie.
Les essais TAILORx (N0) et RxPONDER (1–3 N+) ont montré qu’en cas de RS ≤ 25, la chimiothérapie n’apporte pas de bénéfice chez les femmes ménopausées, mais peut être utile chez les patientes non ménopausées. Reste donc la question : parmi celles nécessitant une chimiothérapie, quelles patientes bénéficient réellement des anthracyclines ?
Analyse post-hoc de l’essai TAILORx
Cette étude correspond à une analyse post-hoc des données individuelles de l’essai de phase III TAILORx, qui a inclus des patientes atteintes d’un cancer du sein HR+/HER2− de stade I/II sans atteinte ganglionnaire. Au total, 7 789 patientes avec un RS ≥ 11 ont été analysées, dont 438 ont reçu une chimiothérapie séquentielle T-AC, 2 111 un TC, 1 152 un AC, 247 un CMF et 3 841 aucune chimiothérapie. Dans le sous-groupe avec RS ≥ 31, on retrouvait 306 patientes traitées par TC, 187 par AC, 173 par T-AC, 37 par CMF et 22 sans chimiothérapie. Comparées aux patientes traitées par TC, celles recevant un schéma T-AC étaient plus jeunes, plus souvent hispaniques et préménopausées, avec des tumeurs plus volumineuses, de grade plus élevé, un statut PR plus fréquemment négatif et un RS plus élevé.
Bénéfice des anthracyclines limité aux patientes avec RS ≥ 31
Après un suivi médian de 11,7 ans, chez les patientes avec un RS ≥ 31, l’ajout d’anthracyclines (T-AC) au TC était associé à une amélioration significative de la DRFI à 5 ans (96,1 % vs 91,0 % ; HR = 0,31 ; IC95 % 0,14–0,72) et de la DRFS (HR = 0,49 ; IC95 % 0,26–0,94), ainsi qu’à une tendance non significative en faveur de l’OS (HR = 0,67 ; IC95 % 0,31–1,44). Le bénéfice était similaire chez les patientes pré- et postménopausées et observé dans l’ensemble des sous-groupes, sauf pour les tumeurs T1. Ce gain augmentait proportionnellement au RS. En revanche, aucun avantage n’était constaté pour les patientes avec un RS < 31. Les schémas AC seuls, CMF ou l’absence de chimiothérapie étaient associés à des résultats significativement moins favorables, surtout lorsque le RS était élevé.
Un biomarqueur prédictif du bénéfice des anthracyclines
Chez les patientes HR+/HER2−, sans atteinte ganglionnaire et avec un RS ≥ 31, l’ajout d’anthracyclines aux taxanes améliore significativement les données de survie, en particulier pour les tumeurs > 2 cm, tandis qu’aucun bénéfice n’est observé pour les RS < 31. Ce potentiel gain doit néanmoins être mis en balance avec les risques de toxicité (cardiaque, hématologique) et la disponibilité de nouvelles options comme les inhibiteurs de CDK4/6 dans cette population. Ces résultats suggèrent également que l’oncotype DX pourrait jouer un rôle de biomarqueur prédictif spécifique du bénéfice des anthracyclines, au-delà de sa valeur purement pronostique.