Cardiologie
Après infarctus : l’arrêt du double traitement antiagrégant n’est pas sans risque
Dans l’étude ADAPT, l’interruption du double traitement antiagrégant n’est pas sans risque, même 12 mois après mise en place d’un stent, quel que soit le niveau de risque.
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Le maintien d’un double traitement thiénopyridine plus aspirine au-delà d'un an après mise en place d’un stent coronarien réduit le risque d'infarctus du myocarde, mais augmente le risque de saignement par rapport à l'aspirine seule. Le risque associé à l'interruption tardive de la thiénopyridine et les facteurs de risque d’infarctus après arrêt de la thiénopyridine est précisé dans une étude parue dans Circulation.
Une étude randomisée prolongée
Dans l'étude sur le double traitement antiagrégant plaquettaire (DAPT), après la mise en place d’un stent et 12 mois de thiénopyridine (clopidogrel ou prasugrel) et d'aspirine, les patients éligibles sont restés sous aspirine et randomisés en thiénopyridine continue versus placebo pendant 18 mois.
A 30 mois, les patients ont cessé le protocole et ont été suivis pendant 3 mois. L'incidence cumulée d’infarctus du myocarde a été évaluée sur 3 mois après la randomisation (12-15 mois) et 3 mois après l'arrêt du traitement (30-33 mois). Le risque d’infarctus du myocarde dans chacune de ces 2 périodes a été comparé entre les bras randomisés et en fonction des valeurs de score DAPT
Une augmentation immédiate du risque d’infarctus
Parmi les 11 648 patients randomisés, l'incidence cumulative mensuelle d’infarctus du myocarde à 12-15 mois est plus faible avec le maintien de la thiénopyridine versus son arrêt et le traitement par aspirine seule chez tous les malades (0,12% vs 0,37%, p <0,001), ainsi que chez les patients non traités avec des stents actif au paclitaxel (0,13% vs 0,27%, p = 0,02).
Par contre, l'incidence cumulative mensuelle d’infarctus du myocarde est plus élevée après arrêt à 30-33 mois chez tous les patients (0,30% vs 0,15%, p = 0,013) et chez les patients sans stent actif (0,18% vs 0,17%, P = 0,91).
La majorité des infarctus qui sont survenus dans les deux périodes (74% et 76%) ne sont pas liées à la thrombose du stent.
Après une analyse multivariée, le bras de traitement a prédit l’infarctus du myocarde de façon indépendante aux périodes 12-15 mois (p <0.001) et 30-33 mois (p = 0.011).
Au cours de la période des 12-15 mois, les patients ayant des scores DAPT < ou ≥ 2 ont tous deux des taux d’infarctus du myocarde plus faibles avec la prolongation du traitement par thiénopyridine (incidence mensuelle d’infarctus du myocarde 0,16% vs 0,51%, p <0,001 pour les scores ≥2 et 0,08% vs 0,24% P = 0,012, pour les scores <2, interaction p = 0,064).
En pratique
L'arrêt de la thiénopyridine après 12 ou 30 mois de double traitement antiagrégant est associé à une augmentation précoce du risque d’infarctus du myocarde mais, dans la majorité des cas, cette augmentation est sans rapport avec une thrombose de stent.
Le niveau de risque est le plus élevé juste après l’interruption (12-15 mois) du double traitement, et plus faible chez les patients qui n’ont pas été traités avec stent actif.
Bien que des scores DAPT plus élevés identifient des malades qui ont un bénéfice absolu plus important lié à la prolongation du traitement par thiénopyridine (risque ischémique par rapport au risque hémorragique), l'interruption à 12 mois augmente le risque d’infarctus, quel que soit le groupe de score DAPT.
Cette étude témoigne de l’importance d’individualiser le double traitement antiagrégant en fonction du niveau de risque vasculaire. Chez les patients avec risque hémorragique élevé, la thiénopyridine peut être interrompue rapidement (entre 6 et 12 mois), alors que chez les malades avec risque cardiovasculaire élevé, stent actif et risque hémorragique faible, la prolongation du double traitement antiagrégant peut se discuter.








