Onco-digestif
Adénocarcinome gastrique avancé HER2-+ : résultats très prometteurs d'une triple association
En première ligne thérapeutique, le triplet pembrolizumab, trastuzumab et chimiothérapie à base de cisplatine plus capecitabine montre une efficacité jamais obtenue dans les adénocarcinome gastriques HER2-positif
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Chez les patients ayant un adénocarcinome gastrique ou de la jonction oeso-gastrique (JOG) avancé HER2-positif, le traitement de référence en première ligne est l’association d’une fluoropyrimidine (5-FU ou capecitabine) et de l’anticorps anti-HER2 trastuzumab depuis les résultats il y a plus de dix ans de l’essai ToGA.
Récemment, les résultats des essais de phase III ChekMate 649 et ATTRACTION-4 rapportés à l’ESMO 2020 ont également montré le bénéfice de l’ajout d’une immunothérapie par anticorps anti-PD1 (en l’occurrence le nivolumab) à la chimiothérapie de première ligne dans les adénocarcinomes gastriques ou de la JOG avancés. Tester la combinaison d’une immunothérapie à l’association trastuzumab + chimiothérapie apparaît donc logique afin d’améliorer le traitement des cancers HER2-positif.
Les résultats actualisés de l’essai multicentrique de phase Ib/II PANTHERA (NCT02901301) évaluant l’efficacité de la triple combinaison pembrolizumab + trastuzumab + chimiothérapie (cisplatine plus capecitabine) en première ligne de traitement des adénocarcinomes gastriques ou de la JOG avancés ont été communiqués au congrès virtuel de l’ASCO GI fin janvier 2021 et montrent des résultats d’efficacité, en termes de réponse objective (RO) et de survie, très prometteurs et bien supérieurs à ceux qu’avaient rapportés l’étude princeps ToGA.
Plus de 3/4 des patients en réponse objective
Dans la partie phase 1 de cet essai multicentrique sud-coréen, une association thérapeutique comportant du pembrolizumab 200 mg IV à J1, du trastuzumab 6 mg/kg IV (après une dose de charge de 8 mg/kg) à J1, de la capecitabine 1000 mg/m2 de J1 à J14 per os et du cisplatine 80 mg/mg à J1 toutes les 3 semaines a été retenue pour la phase 2. Le critère d'évaluation principal de la phase 2 était le taux de RO selon RECIST et les critères secondaires la survie sans progression (SSP), la survie globale (SG), la durée de RO, la tolérance et l'analyse des biomarqueurs prédictifs par NGS (Next-Generation Sequencing) ciblé.
43 patients ont été traités avec un suivi médian de 18,2 mois. Le taux de RO était de 76% (dont 16% de réponse complète et 60% de réponse partielle) amenant à 4,6% de chirurgie secondaire et le taux de contrôle tumoral de 97,7%. Plus de la moitié des patients (56%) ont eu une réduction de taille de plus de 50% de leur masse tumorale. Les médianes de SSP et de SG étaient respectivement de 8,6 mois et 19,3 mois. Au moment de l’analyse, 6 patients avaient fini les deux années de traitement sans progression et 3 étaient encore sous traitement. Aucun patient n'a arrêté le pembrolizumab en raison d'effets indésirables immuno-médiés.
Ces résultats sont très impressionnants comparés à ceux de l’étude ToGA qui rapportait à l’époque un taux de RO de 47% et des SSP et SG médianes de 6,7 mois et 13,8 mois respectivement avec la combinaison trastuzumab + chimiothérapie, en gardant tout de même en tête que cette étude incluait des patients avec amplification de HER2 par FISH mais dont 22% avaient une faible expression de HER2 en IHC (0, 1+). Ce sous-groupe de patients FISH+/IHC 0-1+ a été montré comme ne bénéficiant pas de l’ajout du trastuzumab à la chimiothérapie et les patients FISH+/IHC 2-3+ avaient une SG médiane encore meilleure, de 16 mois.
Des biomarqueurs prédictifs de réponse au triplet identifiés
A noter, qu’aucun patient n’avait une tumeur MSI-H/dMMR ou EBV-positive, ces caractéristiques moléculaires étant connues comme étant des biomarqueurs de réponse à l’immunothérapie. Le statut PD-L1 (49% des patients ≥ CPS 1 et 12% des patients ≥ CPS 10) n’avait ici aucun impact sur la survie. En immunohistochimie (IHC), le score tumoral de HER2 était 3+ chez 70% des patients et 2+ chez les 30% restant mais seulement 8 des 31 patients analysés en NGS avaient une amplification de HER2 (≥ 4 copies du gène). Cette amplification de HER2 était associée à une meilleure survie que celle des patients sans amplification (SSP médiane de 22 mois vs 7,7 mois, p=0,0275). Une amélioration de la SSP a été également observée chez les patients avec une altération de la voie RTK/RAS comparés à ceux sans altération (SSP médiane de 13,8 mois vs 4,9 mois ; p=0,001).
L’efficacité du triplet pembrolizumab + trastuzumab + chimiothérapie serait donc basée sur l’amplification de HER2, indépendamment du statut PD-L1.
Une étude pour confirmer l’intérêt de l’ajout du pembrolizumab à l’association trastuzumab + chimiothérapie et valider les biomarqueurs prédictifs d’intérêt
Suite à ces résultats très prometteurs, l’évaluation de cette triple association se poursuit déjà en phase 3 dans l’essai KEYNOTE-811 (NCT03615326), actuellement en cours, qui la compare à l’association trastuzumab plus chimiothérapie en première ligne. Dans cette étude de phase 3 qui prévoit d’inclure plus de 730 patients, la chimiothérapie est, au choix de l’investigateur, soit une association de 5-FU et cisplatine, soit du XELOX® (capecitabine et oxaliplatine) (ou du SOX, S-1 et oxaliplatine dans la cohorte japonaise).
Le critère principal d’évaluation est double, incluant à la fois la SSP et la SG. Une analyse des biomarqueurs est bien évidemment prévue dans cette étude de phase 3 pour confirmer l’intérêt de l’amplification de HER2 et des altérations de la voie RTK/RAS suggéré par l’étude PANTHERA, mais également pour continuer d’évaluer l’impact de l’expression de PD-L1 et de la charge mutationnelle tumorale ou TMB (tumor mutational burden).
https://ascopubs.org/doi/abs/10.1200/JCO.2021.39.3_suppl.218?af=R











