Endocrinologie
Cancer de la thyroïde : perturbation des rythmes circadiens par la lumière artificielle
Une étude menée sur plus de 464 000 participants et pendant près de 13 ans montre que les personnes vivant dans des régions où la lumière artificielle extérieure est très forte la nuit ont un risque plus élevé de développer un cancer de la thyroïde.
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Les lumières des lampadaires et des vitrines des magasins la nuit peuvent-elles augmenter le risque de développer un cancer de la thyroïde ?
C’est la conclusion à laquelle sont parvenus des chercheurs de l’université du Texas (États-Unis). Dans une étude publiée en ligne dans CANCER, la revue de l’American Cancer Society, ils expliquent que le cancer de la thyroïde, comme le cancer du sein, peut avoir une origine hormono-dépendante, et que celle-ci peut être alimentée par une modification des rythmes circadiens en lien avec les forts éclairages électriques nocturnes.
Un risque 55% plus élevé
Pour parvenir à cette conclusion, les chercheurs ont recruté, en 1995 et 1996, 464 371 adultes américains âgés de 50 à 71 ans, qui ont fait l’objet d’un suivi pendant 12,8 ans en moyenne. Ils ont analysé les données d'imagerie satellite pour estimer les niveaux de lumière la nuit à l'adresse des participants, et ont examiné les bases de données des registres du cancer des États pour identifier les diagnostics de cancer de la thyroïde jusqu'en 2011.
Pendant la période de suivi, 856 cas de cancer de la thyroïde ont été diagnostiqués (384 chez les hommes et 472 chez les femmes). Les chercheurs ont constaté que, par rapport au quintile inférieur de lumière nocturne, le quintile supérieur était associé à un risque 55% plus élevé de développer un cancer de la thyroïde, notamment la forme la plus courante de cancer, appelée cancer papillaire de la thyroïde.
Ils ont noté que cette association entre lumière nocturne et cancer papillaire de la thyroïde était plus forte chez les femmes que chez les hommes. D’autres différences ont été notées : chez les femmes, l'association était plus forte pour les cancers localisés sans signe de propagation à d'autres parties du corps, tandis que chez les hommes, l'association était plus forte pour les stades plus avancés du cancer.
Plusieurs causes envisagées
Des études épidémiologiques supplémentaires sont désormais nécessaires pour confirmer les conclusions de l’étude. Si elles sont confirmées, il sera important de comprendre les mécanismes qui sous-tendent la relation entre la lumière de la nuit et le cancer de la thyroïde. Deux pistes sont envisagées : d’abord, la suppression par la lumière nocturne de la mélatonine, un modulateur de l'activité des œstrogènes qui peut avoir d'importants effets anti-tumoraux. Ensuite, une perturbation par la lumière nocturne de l'horloge interne du corps (ou des rythmes circadiens), ce qui constitue un facteur de risque pour divers types de cancer.
"En tant qu'étude observationnelle, notre étude n'est pas conçue pour établir un lien de causalité. Par conséquent, nous ne savons pas si des niveaux plus élevés de lumière extérieure la nuit entraînent un risque élevé de cancer de la thyroïde ; cependant, étant donné les preuves bien établies qui soutiennent le rôle de l'exposition à la lumière la nuit et de la perturbation du rythme circadien, nous espérons que notre étude motivera les chercheurs à examiner plus avant la relation entre la lumière la nuit et le cancer, et d'autres maladies, explique le Dr Xiao, auteur principal des travaux. Récemment, des efforts ont été faits dans certaines villes pour réduire la pollution lumineuse, et nous pensons que les études futures devraient évaluer si et dans quelle mesure ces efforts ont un impact sur la santé humaine."











