Onco-Dermato
Sarcome de Kaposi de l'immunocompétent : actualité pronostic & thérapeutique
Les sarcomes de Kaposi (SK) de l’immunocompétent regroupent les SK classiques et endémiques touchant les patients originaires du pourtour méditerranéen et d’Afrique sub-saharienne, respectivement. Un traitement systémique est indiqué dans les formes étendues ou avec localisations systémiques. Les traitements conventionnels se basent sur les études des SK de l’immunodéprimé et comprennent principalement le paclitaxel, la doxorubicine liposomale et l’interféron alpha (IFNa), avec un meilleur profil d’efficacité et de tolérance de la doxorubicine.
- Ankabala/iStock
Les sarcomes de Kaposi (SK) sont des maladies hétérogènes liées à une prolifération de cellules endothéliales infectées par le virus HHV8. On oppose les SK de l’immunodéprimé, iatrogène ou associé au VIH, aux SK de l’immunocompétent, qui regroupent les SK classiques (SKC) et endémiques (SKE) touchant respectivement les patients originaires du pourtour méditerranéen et d’Afrique sub-saharienne.
Bien que l’évolution des SKC et EKS soit souvent indolente et puisse être traitée localement, il existe des formes systémiques ou localement étendues pour lesquelles un traitement systémique est indiqué (Lebee et al European Journal of Cancer 2019).
Quels traitements systémiques ?
Par analogie avec les SK de l’immunodéprimé, les principaux traitements conventionnels actuels chez l’immunocompétent comprennent en première ligne l’interféron alpha pegylé (IFNa) le paclitaxel et la doxorubicine liposomale (DL) sans qu’ils aient été véritablement évalués dans ces formes (Cianfrocca et al Cancer 2010, Kreuter et al Cancer Investigation 2005, Di Lorenzo et al Journal of Investigative Dermatology 2008, Tourlaki et al Journal of Dermatological Treatment).
Afin d’évaluer l’efficacité et la tolérance des 3 traitements systémiques les plus utilisés dans les SKC et les SKE, nous avons mené une étude rétrospective multicentrique dans 3 centres experts en onco-dermatologie. Cent-dix patients ont été inclus dont 69 SKC (62,7 %) et 41 SKE (37,2 %) avec un suivi médian de 75,7 mois après l’initiation d’une première ligne de traitement systémique. La réponse globale au traitement en première ligne était respectivement de 82,8 %, 80 % et 56,5 % pour le paclitaxel, le DL et l’IFNa, avec une tendance significative à une moindre réponse de l’IFNa par rapport au DL (p = 0,04). Une toxicité était retrouvée dans 47,5 % des cas, plus fréquemment avec l’IFNa (51,2 %) et le paclitaxel (47,8 %) qu’avec le DL (30,4 %) (p = 0,031), sans différence significative pour les effets indésirables graves.
Par ailleurs, des études récentes ont également montré l’efficacité des anti-angiogéniques (Ramaswami et al Clinical Cancer Research 2022) et des anti-PD1 (Delyon et al Lancet Oncology 2022) dans les SK de l’immunocompétent.
Spécificité et pronostique des sarcomes de Kaposi classique et endémique
Dans notre étude, les patients atteints de SKE présentaient des atteintes plus sévères avec de plus fréquentes localisations systémiques par rapport aux SKC, en particulier ganglionnaire, et moins fréquemment digestif et pulmonaire, dès le diagnostic (36,6 % vs 14,9 %) puis durant le suivi (56 % vs 25,4 %).
Il n’était pas observé de différence d’efficacité ou de tolérance des traitements en première ligne entre les SKC et les SKE. Cependant alors que la réponse au traitement au fur et à mesure des changements de ligne se maintenait dans les SKC, cette réponse s’épuisait dans les SKE avec une efficacité globale en troisième ligne de seulement 33,3 % dans les SKE versus 64,7 % dans les SKC.
Durant le suivi, 14 patients sont décédés dont 7 des complications de leur SK. Les critères au diagnostic associées au décès étaient l’existence d’une localisation systémique (HR = 10,41, p = 0,001) ou de nodules cutanés ulcérés (HR = 4,75, p = 0,008). Il n’y avait pas de différence en fonction de la présence d’une atteinte muqueuse ou du type de SK, possiblement par manque de puissance.
Conclusion
La DL, le paclitaxel et l’IFNa sont des traitements efficaces et bien tolérés dans les SK de l’immunocompétent, avec un meilleur profil d’efficacité et de tolérance de la DL. Les facteurs prédictifs de mortalité sont la présence de nodules ulcérés et d’une atteinte systémique au diagnostic, avec une évolution plus sévère dans les SKE.
De nouveaux traitement tels que le pemprolizumab et le pomalinomide ont récemment montré leur efficacité dans les SK et représentent des alternatives thérapeutiques intéressantes chez ces malades.











