Addictologie
Overdoses : une mutation est en cours
Après avoir fortement régressé, le nombre des overdoses aux opioïdes a tendance à augmenter, mais les substances impliquées changent. La méthadone est devenue une cause majeure, et les opioïdes médicamenteux, largement sous-estimés, s’annoncent comme une menace considérable.
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La tendance s’est inversée. Alors que l’autorisation de la prescription des traitements de substitution opiacés en 1996 et la politique de réduction des risques ont entraîné une forte diminution de la fréquence des overdoses, on assiste depuis quelques années à une remontée de leur nombre. La dernière enquête DRAMES (Décès en Relation avec l’Abus de Médicaments Et de Substances) réalisée par l’ANSM qui recueille les décès par surdoses en France montre une évolution inquiétante.
La méthadone cause principale
En 2012, 310 décès directement liés aux produits ont été recueillis. Ils concernaient majoritairement des hommes (81 %), l’âge médian étant de 35 ans. 60 % impliquent des médicaments de substitution aux opiacés licites dont 45 % imputables à la méthadone et 15 % à la buprénorphine. Les décès dus à la méthadone progressent puisqu’ils augmentent de 36 % à 45 % entre 2010 et 2012.
Les stupéfiants illicites sont responsables de 34 % des décès par overdoses dont 15 % dus à l’héroïne. Enfin, les médicaments opioïdes licites sont impliqués dans 12 % des décès. La morphine, la codéine, la pholcodine, le fentanyl, l’oxycodone et le tramadol sont les substances les plus souvent impliquées.
Antalgiques opiacés
L’ascension de ces overdoses aux opioïdes médicamenteux qui surviennent dans le cadre de prescription d’antalgiques est un phénomène qui préoccupe les spécialistes des addictions. Ils s’attendent à une progression importante de ces intoxications comparable à celle qui est observée dans les pays anglo-saxons depuis quelques années.
De plus, les chiffres des décès imputables aux médicaments antalgiques opiacés sous-estiment largement l’ampleur du problème et les études récentes réalisées en population générale et non auprès des seuls toxicomanes montrent bien une progression préoccupante du nombre d’accidents.
Obstacles administratifs
Le traitement de substitution reste la méthode de référence pour prévenir les overdoses aux opioïdes. La primo-prescription de méthadone en médecine de ville est une mesure préconisée par de nombreux experts mais qui tarde à être adoptée par les autorités de santé. Certains considèrent en effet qu’elle est à risque car la méthadone est un agoniste complet des récepteurs opioïdes alors que la buprénorphine est un agoniste partiel qui comporte moins de risque d’overdose.
Un accès facilité à la naloxone qui est un antagoniste des récepteurs à la morphine efficace pour traiter les surdoses, est plébiscité et attendu avec impatience par les spécialistes de la lutte contre les addictions. Sa simplicité d’utilisation, sa rapidité d’action, ses modes d’administration, en particulier la voie nasale, font qu’elle peut être utilisée facilement par les témoins d’une overdose.











