Rhumatologie

Fibrose pulmonaire et maladies auto-immunes : bénéfice d'un anti-fibrosant

En cas de maladies auto-immunes avec pneumopathie interstitielle diffuse fibrosante, le nintedanib, un antifibrosant spécifique, ralentit le taux de déclin de la capacité vitale forcée, avec des effets indésirables gérables chez la plupart des patients.

  • Dr_Microbe/istock
  • 24 Février 2022
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    La pneumopathie interstitielle diffuse (PID) est une manifestation courante des maladies auto-immunes systémiques, notamment la polyarthrite rhumatoïde (PR), la sclérodermie systémique (ScS) et les connectivites mixtes (MCTD). Jusqu'à présent, il n'existait pas de traitement capable de réduire de manière significative le taux de déclin de la fonction pulmonaire en cas de pneumopathie interstitielle diffuse liée à ces maladies auto-immunes et caractérisées par une évolution vers une fibrose pulmonaire progressive.

    Une nouvelle étude randomisée versus placebo, en sus du traitement standard, publiée dans Arthritis & Rheumatology, révèle que le nintedanib, un nouveau médicament antifibrosant visant à prévenir les modifications du tissu pulmonaire, peut aider les patients atteints de pneumopathies interstitielles diffuse (PID), qui sont une manifestation fréquemment associée aux maladies systémiques d’origine auto-immunes, telles que la polyarthrite rhumatoïde.

    Réduction significative du déclin de la CVF

    Parmi les 170 sujets randomisés atteints de pneumopathie interstitielle diffuse liée à des maladies auto-immunes, le taux de déclin de la capacité vitale forcée (CVF) sur 52 semaines est de -75,9 ml/an avec le nintedanib contre -178,6 ml/an dans le groupe placebo (différence de 102,7 ml/an ; IC à 95% 23,2 - 182,2 avec p =0,012).

    Aucune hétérogénéité n'a été détectée dans l'effet du nintedanib par rapport au placebo dans les différents sous-groupes en fonction du traitement ou du diagnostic de PID (p=0,91). Chez les malades souffrant de polyarthrite rhumatoïde, qui représentent 89 des 170 sujets atteints de maladies auto-immunes, le taux annuel ajusté de diminution de la CVF sur 52 semaines est de -79,0 ml/an dans le groupe nintedanib contre -196,9 ml/an dans le groupe placebo (différence de 117,9 ml/an ; IC à 95% : 5,2, 230,7 avec p = 0,041).

    L'événement indésirable le plus fréquent est la diarrhée, signalée respectivement chez 63,4% et 27,3% des malades dans les groupes nintedanib et placebo. Les effets indésirables ont conduit à l'arrêt définitif du traitement chez 17,1% et 10,2% des patients des groupes nintedanib et placebo, respectivement.

    Un essai randomisé

    L'essai INBUILD a recruté des malades atteints d'une pneumopathie interstitielle diffuse et fibrosante autre que la fibrose pulmonaire idiopathique, avec une atteinte pulmonaire fibrosante diffuse d'une étendue >10% sur la tomodensitométrie haute résolution, une capacité vitale forcée (CVF) ≥45% prédite et une capacité de diffusion des poumons pour le monoxyde de carbone ≥30%-<80% prédite. Certains de ces malades avaient une PID dans le cadre d’une maladie auto-immune type PR sclérodermie ou connectivite mixte.

    Les sujets remplissaient les critères définis par le protocole de progression des PID dans les 24 mois précédant le dépistage, malgré une prise en charge thérapeutique jugée optimale selon les recommandations. Les malades ont été randomisés pour recevoir du nintedanib ou un placebo. Le critère principal est le taux de déclin de la capacité vitale forcée (CVF en mL/an) sur 52 semaines en fonction des sous-groupes des PID liées aux différentes maladies auto-immunes et les effets indésirables ont été évalués sur la même durée.

    Possible effet sur les exacerbations

    Les exacerbations aiguës chez les patients atteints d'une PID fibrosante sont des événements rares mais sont classiquement associées à une mortalité élevée. Alors que l'essai INBUILD n'avait théoriquement pas la puissance nécessaire pour montrer un effet du nintedanib sur ce critère, sur l'ensemble de l'essai pourtant, le nintedanib a été associé à une réduction numérique du risque composite d'exacerbation aiguë de la maladie ou de décès : le HR pour ce critère est de 0,67 et la signification statistique est atteinte (p=0,04).

    Des études supplémentaires sont nécessaires pour déterminer l'effet du nintedanib sur les exacerbations aiguës des maladies auto-immunes inflammatoires chroniques.

    En pratique

    Les rhumatologues doivent être conscients des facteurs de risque de la pneumopathie interstitielle diffuse au cours des maladies auto-immunes.

    Dans la mesure où ces traitements réduisent la progression de la maladie pulmonaire fibrosante, il convient de la détecter le plus tôt possible et, donc, mettre en place avec les pneumologues des stratégies de surveillance pour aider à identifier précocement les patients atteints de pneumopathie interstitielle diffuse fibrosante, surveiller sa progression et mettre en place un plan de traitement approprié.   

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