Grossesse
Pesticides : quel danger pour les femmes enceintes exposées ?
Une étude argentine révèle que les femmes enceintes exposées à plusieurs pesticides présentent davantage de complications au cours de leur grossesse.

- Par Stanislas Deve
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A l’heure où l’usage des pesticides en agriculture est de plus en plus critiqué – en témoigne la pétition contre la loi Duplomb visant à réintroduire un néonicotinoïde nocif pour les abeilles, qui a dépassé 1,4 million de signatures –, une nouvelle étude argentine, publiée dans la revue Chemosphere, ravive le débat. Selon une équipe de chercheurs, les femmes enceintes exposées à plusieurs produits chimiques auraient un risque accru de complications pendant la grossesse. Un constat alarmant qui interroge la sécurité des pratiques agricoles actuelles.
Des expositions multiples plus dangereuses qu'on ne le pensait
Publiée par une équipe de l’Universidad Nacional del Litoral (UNL), cette étude, repérée par The Guardian, s’est penchée sur 90 femmes enceintes vivant dans la région agricole de Santa Fe. Les scientifiques ont analysé leur urine et retrouvé des traces d’environ 40 pesticides différents, en particulier les fongicides de la famille des triazoles, très utilisés sur les cultures de soja, maïs ou blé. Au total, 81 % des participantes présentaient au moins un pesticide dans leur organisme, et 64 % en avaient plusieurs.
Or les femmes exposées à plusieurs pesticides étaient plus susceptibles de connaître des complications, notamment de l’hypertension gestationnelle ou un retard de croissance intra-utérin. "Le concept d’exposome, qui englobe toutes les expositions environnementales au cours de la vie, souligne l’importance d’étudier les pesticides en tant qu’ensemble mélangé plutôt que de manière isolée", rappellent les auteurs.
Un risque accru dans les zones rurales
Sans grande surprise, les femmes vivant en zone rurale étaient davantage exposées : 70 % d’entre elles présentaient plusieurs pesticides, contre 55 % en milieu urbain. Or, les complications étaient deux fois plus fréquentes chez les femmes rurales. Mais l’alimentation pourrait aussi jouer un rôle, car les citadines n’étaient pas épargnées.
A noter que ce problème de santé publique n’est pas limité à l’Argentine. Aux États-Unis, une étude menée au Nebraska a révélé que l’exposition à plusieurs pesticides pouvait augmenter de 36 % le risque de cancer du cerveau chez l’enfant.
Pour Nathan Donley, chercheur au Center for Biological Diversity cité par The Guardian, "l’exposition à des mélanges de pesticides est la règle, pas l’exception". Il déplore le manque de réglementation : "On part du principe que tout est sûr jusqu'à preuve du contraire, mais comme peu d'études existent, on ne trouve presque jamais cette preuve". Avant de conclure : "Davantage d’efforts sont nécessaires pour évaluer l’exposition humaine aux pesticides dans les populations vulnérables."