Addictologie
Prévention des overdoses : aller plus loin
Le mercredi 31 août 2016, c’est la Journée Mondiale de Sensibilisation aux Overdoses, un problème majeur dans nos sociétés occidentales. L’évolution des comportements addictifs fait que tous les médecins, même ceux qui ne s’occupent pas des toxicomanes, risque d’y être confrontés.
- kmiragaya/pîx-5
Les overdoses sont un problème qui reste majeur avec 11 millions d’années de vie perdues dans le monde en raison de problèmes de santé, de handicap ou de décès par overdose aux opioïdes. Mais les comportements addictifs ont beaucoup évolué ces dernières années et, en 2016, les overdoses à l’héroïne ne représentent pas la principale cause de décès par overdose en France.
Overdose : un risque familial, social et surtout vital
Une overdose correspond à une situation où l’organisme est confronté à une trop forte quantité d’une ou de plusieurs drogues qu’il n’est plus capable de métaboliser.
Le mot « overdose » correspond par définition aux overdoses aux opioïdes, mais toutes les drogues peuvent en pratique causer une overdose, y compris celles qui sont disponibles sur ordonnance.
L’overdose survient le plus souvent lorsque la personne toxicomane s’est trompée de dose, lorsque la pureté de la drogue est meilleure, ou lorsque la personne associe plusieurs drogues.
En France, avant 1996, la situation était grave avec 160 000 héroïnomanes, plus de 20 000 nouveaux cas par an et de nombreuses infections par les hépatites B et C et au VIH liées au partage de matériel. Le pic de décès a été atteint en 1992 avec 557 décès liés aux opioïdes et un risque de décès multiplié par 13.
Plusieurs plans nationaux de réduction des risques
Depuis 1996, les plans de promotion des traitements contre l’addiction aux opioïdes et ceux de réduction des risques et des dommages chez le toxicomane ont eu un impact positif incontestable dans notre pays. En 20 ans, il a été observé une diminution des comportements à risques avec 6 fois moins de patients injecteurs et une réduction des transmissions virales suite aux distributions gratuites de seringues. Concernant le nombre d’overdoses aux opioïdes en France, la réduction des overdoses a été fortement associée à la mise à disposition de la buprénorphine, alors que dans d’autres pays qui ont privilégié la méthadone, la cassure est moins nette.
Les conditions de vie des malades se sont améliorées avec 50% des patients sous traitements de l’addiction aux opioïdes. Ceux-ci ont une meilleure situation sociale, 2/3 ont une meilleure qualité de vie et les trois-quarts estiment « s’en être sortis ». Surtout, les hospitalisations ont diminué et il y a eu 5 fois moins de décès par overdose à l’héroïne, tout ceci aboutissant à des milliers de vies sauvées. Actuellement, les overdoses sont responsables de 4 à 7 fois moins de décès en France par rapport au Royaume-Uni et à l’Allemagne respectivement.
Nouvelles conduites addictives
Ce constat positif ne doit cependant pas masquer que cette « politique nationale de réduction des risques et des dommages », même si elle a aboutit à un nombre de décès par overdose plus bas, celui-ci est resté stable en 2014 et les décès liés aux overdoses à la méthadone et opioïdes médicamenteux (tramadol, morphine) sont en augmentation, l’ensemble des overdose aux opioïdes illicites ou médicamenteux, représentant 8 décès par overdoses sur 10 en Europe.
En effet, les consommations ont évolué, tant chez les usagers de produits illicites que dans la population générale (diversification des consommations, poly-usage). « Si les opioïdes restent les produits les plus à risque d'overdose, ce sont désormais les opioïdes licites qui sont à l'origine de la majorité des overdoses en France et dans d'autres pays », d’après Maurice Dematteis, médecin-addictologue à Grenoble. Chez les usagers de drogues français, 63 décès associés à l'héroïne ont été répertoriés contre 135 avec les médicaments de substitution, dont 107 avec la méthadone (enquête DRAMES - Décès en Relation avec l'Abus de Médicaments Et de Substances 2014). Dans la population générale, 67 décès liés aux antalgiques ont été répertoriés, principalement avec le tramadol et la morphine (enquête DTA - Décès Toxiques par Antalgiques 2014). Par conséquent, « la prévention des overdoses ne concerne pas que les produits illicites et il est important de bien peser l'indication des traitements médicamenteux et d'en assurer un suivi étroit, surtout chez les personnes les plus fragiles sur le plan psychologique afin d'éviter une surconsommation » selon Maurice de Matteis.
Prévention des overdoses : aller plus loin
Face à l’évolution des consommations de drogues, et pour aller plus loin, il convient de modifier les mesures à mettre en place pour la prévention des overdoses selon Pierre Polomeni, médecin-addictologue et chef de service au CHU 93. Ces mesures s’articulent en 4 étapes et la première est bien sur de réduire le risque de premier contact à l’héroïne en menant des actions de prévention primaire chez les jeunes, pour limiter l’accès aux drogues et limiter le passage à l’acte de la première injection. Il faut ensuite apprendre aux usagers de drogues à vérifier la qualité et la puissance des produits qu’ils consomment et encadrer ces pratiques, au mieux dans des salles d’injection supervisées. Il faut encore améliorer l’accès aux soins précoces des usagers de drogues, ainsi que le suivi psychosocial et il faut vraisemblablement privilégier la substitution par la buprénorphine qui semble plus sure que la méthadone. Enfin, il faut favoriser le traitement précoce de l’overdose par la naloxone qui devrait être largement diffusée et utilisée de la même façon que les allergiques avec l’adrénaline.
A l’occasion de la journée des overdoses, nous avons reçu un communiqué de Mohamed Farah, directeur médical pour INDIVIOR France, un des principaux acteurs dans les overdoses qui tiens à rappeler le rôle joué par sa société durant ces 20 dernières années. Tout au long de ces années Indivior s’est associé, tant avec les autorités, les responsables politiques, les militants, qu’avec les professionnels de santé pour contribuer à l’amélioration des connaissances médicales et scientifiques sur les troubles liés à la consommation de drogues, et sensibiliser sur l'intérêt du traitement de l’addiction aux opioïdes. « Nous sommes ravis de pouvoir nous joindre aux principaux acteurs impliqués dans cette démarche pour faciliter l’accès au traitement de qualité des patients souffrant d’une addiction aux opioïdes et présentant des comorbidités, et ainsi réduire la mortalité – notamment la mortalité par overdose ».











