Pneumologie

Cancer pulmonaire : pourquoi la HAS ne recommande pas le dépistage par scanner

En mai dernier, la Haute autorité de santé (HAS) s'est prononcée contre le dépistage systématique du cancer du poumon par scanner thoracique chez les fumeurs. Les experts de l'instance publique estiment que son utilité n'est pas établie.

  • ©123RF-nito500
  • 29 Août 2016
  • A A

    Sollicitée par les autorités sanitaires pour donner son avis, la Haute autorité de santé a jugé que "les conditions ne sont pas actuellement réunies pour réaliser le dépistage des fumeurs par scanner thoracique faible dose". La HAS a fondé son évaluation sur une analyse critique et une synthèse des informations issues des essais menés chez les fumeurs. Une synthèse de l’analyse a été publiée dans l’European Journal of Cancer.

    Dans son argumentaire, la HAS estime que les six conditions qui permettent de déterminer si un programme de dépistage est utile et possible ne sont pas réunies.

     

    La maladie

    Pour qu’un dépistage soit valable, il faut nécessairement qu’il y ait une phase pendant laquelle la maladie est détectable alors que les symptômes ne sont pas apparents. Or, dans le cancer pulmonaire qui peut connaître un développement rapide, on connaît mal cette phase.

     

    L’examen de dépistage

    Même si le scanner utilisé pour le dépistage est à faibles doses de rayonnement, c’est un examen irradiant. Par ailleurs, il identifie beaucoup d’anomalies qui ne sont pas malignes. Ces faux positifs nécessitent des investigations parfois invasives.

     

    Les traitements

    Pour qu’un dépistage soit utile, il faut disposer de traitement efficace. Pour le cancer du poumon, les possibilités thérapeutiques sont relativement restreintes. Dans les stades précoces, la chirurgie est certes efficace mais elle n’est pas toujours possible et ne garantit pas l’absence de rechute.

     

    La population à risque

    Les fumeurs les plus à risque sont difficiles à identifier et à atteindre. Le nombre de cigarettes consommées et la durée du tabagisme sont les critères utilisés mais ils ne sont pas parfaitement consensuels. De plus, les fumeurs ont tendance à sous-estimer leur consommation.

     

    La réduction de la mortalité

    L’étude nord-américaine NLST a montré une réduction de la mortalité grâce à un dépistage chez les fumeurs par le scanner thoracique comparé à la radiographie pulmonaire, mais dans le contexte français, cette efficacité n’est pas établie.

     

    Le rapport bénéfices-inconvénients

    Un dépistage doit évidemment présenter plus de bénéfices que de risques. Or, dans le cancer pulmonaire, de nombreux inconvénients ont été identifiés, notamment les explorations diagnostiques invasives qui sont d’autant moins justifiées que la personne n’est pas malade. Enfin, les bénéfices pour les fumeurs restent très incertains.

    L’HAS déclare donc le dépistage non pertinent et recommande de renforcer la lutte contre le tabagisme, en particulier chez les jeunes en les dissuadant de commencer à fumer. Elle préconise le développement de la recherche sur les traitements et les techniques de dépistage. Parmi ces dernières, le dépistage sur un simple prélèvement sanguin semble prometteur.

    Ecoutez...
    Louis-Rachid Salmi, Université et CHU de Bordeaux : « La seule étude pilote menée en France n’a pas abouti à une évaluation complète… »

    Coureau G, et al. Low-dose computed tomography screening for lung cancer in populations highly exposed to tobacco: A systematic methodological appraisal of published randomised controlled trials. Eur J Cancer [Internet]. mai 2016  

    Pour pouvoir accéder à cette page, vous devez vous connecter.