Cardiologie

Infarctus du myocarde et inflammation : plus fréquents, plus précoces et plus meurtriers

Les infarctus du myocarde seraient 2 fois plus fréquents au cours des maladies inflammatoires chroniques systémiques. Ils surviennent souvent avant 50 ans, sont moins bien traités en prévention secondaire et ont un taux de mortalité plus élevé.

  • Irina Gulyayeva/istock
  • 31 Mars 2021
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    Les infarctus du myocarde chez les adultes jeunes sont, à long terme, deux fois plus susceptibles d'être fatals chez les personnes atteintes de maladies inflammatoires chroniques comme le psoriasis, le lupus ou la polyarthrite rhumatoïde.

    La prise en charge des facteurs de risque classique de l’athérosclérose est le plus souvent insuffisante à la sortie de l’hôpital chez ces malades jeunes. Enfin, les calculateurs de risque cardiovasculaire en usage actuellement ne prennent pas en compte le sur-risque associé à l’inflammation chronique. C'est ce que révèle une étude publiée aujourd'hui dans l'European Journal of Preventive Cardiology, une revue de la Société Européenne de Cardiologie (ESC).

    Un suivi de plus de 10 ans

    Au cours d'un suivi médian de 11,2 ans, les patients souffrant de maladies inflammatoires chroniques sont presque deux fois plus susceptibles de décéder que ceux qui n'en souffrent pas.

    Les patients atteints de maladies inflammatoires ont, en effet, 2,68 fois plus de risques de mourir au cours des 11,2 années de suivi par rapport à un groupe apparié sans maladies inflammatoires.

    Un registre des infarctus avant 50 ans.

    L'étude a utilisé les données du registre YOUNG-MI, qui a recruté des patients âgés de 50 ans ou moins, ayant eu un infarctus du myocarde et traités au Massachusetts General Hospital et au Brigham and Women's Hospital, de Boston, entre 2000 et 2016.

    Les chercheurs ont identifié les patients atteints de maladies inflammatoires systémiques et ont ensuite comparé (après appariement) les taux de mortalité chez les 53 patients atteints de maladies inflammatoires à un sous-échantillon de 138 patients ne souffrant pas de ces maladies.

    Parmi les 2 097 patients victimes d'un infarctus du myocarde âgés de 50 ans ou moins, 53 (2,5%) avaient une maladie inflammatoire. Le psoriasis est la maladie inflammatoire chronique la plus fréquente (64%), suivie du lupus (23%), de la polyarthrite rhumatoïde (9%) et d'autres affections (4%).

    Prévention secondaire moindre

    Comme attendu, les patients souffrant de maladies inflammatoires sont plus souvent des femmes. Ils sont également plus susceptibles de souffrir d'hypertension artérielle, mais ont des taux similaires d'hypercholestérolémie et de diabète par rapport aux personnes ne souffrant pas de maladies inflammatoires.

    Or, l'aspirine et les statines, qui sont systématiquement recommandées après un infarctus du myocarde, sont moins souvent prescrit dans cette population à la sortie de l'hôpital.

    L'une des raisons pourrait être la crainte d'interactions médicamenteuses, car ces patients prennent souvent de nombreux traitements dont certains sont des immunosuppresseurs. Une autre raison est la traditionnelle moindre prise en charge des femmes après un infarctus.

    Des calculateurs de risque inadaptés

    Au moins 2% des personnes en Europe et dans le monde sont atteintes de maladies inflammatoires systémiques, qui affectent souvent plusieurs organes. Bon nombre de ces maladies inflammatoires systémiques sont dues à l'auto-immunité. Les maladies inflammatoires peuvent survenir à tout âge, mais elles se déclarent souvent au début de l'âge adulte.

    Les personnes atteintes de maladies inflammatoires systémiques ont un risque accru d’infarctus du myocarde, mais cette étude révèle que cette atteinte est plus précoce et de moins bon pronostic. Les calculateurs actuels, qui sont utilisés pour évaluer le risque cardiovasculaire des personnes et déterminer leur éligibilité à un traitement préventif, sous-estiment le risque cardiovasculaire chez les patients atteints de maladies inflammatoires systémiques. Une adaptation avait été proposée par l’American College of Rheumatology dans la polyarthrite rhumatoïde mais elle devrait être étendue aux autres maladies inflammatoires et validée de façon multidisciplinaire.

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