Infectiologie
Méningite à méningocoque : intérêt des antipsychotiques en add-on
Pour prévenir la dissémination des méningocoques au cours de la méningite, des antipsychotiques ont démontré leur capacité à inhiber les pilis.
- jarun011/iStock
Si la plupart des malades atteints de méningite à méningocoque guérissent avec des antibiotiques, lorsqu'ils sont traités à temps, cette méningite peut provoquer de graves complications (surdité, atteinte du cerveau, épilepsie, déficience mentale…) et dans 50% mener à une mort rapide et brutale par dissémination.
Des chercheurs français ont trouvé comment renforcer le traitement antibiotique contre le risque de dissémination de cette maladie. D’après leur étude publiée lundi 25 mars dans la revue Nature Microbiology, des médicaments antipsychotiques pourraient être très utilisés pour booster l’efficacité des antibiotiques déjà utilisés.
Inhiber le fonctionnement des pilis
Des scientifiques de l’Institut Cochin ont administré des phénothiazines, de la famille des antipsychotiques, sur des souris atteintes de méningite à Neisseria meningitidis. En seulement quelques minutes, ces médicaments ont désactivé les pilis, les poils mobiles de la bactérie. Sans ces appendices, celle-ci ne peut plus se déplacer, s'agglutiner ou s'accrocher aussi facilement aux vaisseaux sanguins.
Les antipsychotiques "réduisent la colonisation méningococcique des vaisseaux humains et préviennent les dysfonctionnements vasculaires, la coagulation intravasculaire et l'inflammation accablante qui caractérisent les infections invasives à méningocoque. Enfin, ils réduisent la létalité", précisent les auteurs de l’étude. Par ailleurs, "si on les donne au début de l’infection, cela réduit les lésions vasculaires et améliore le taux de survie des souris qui n’ont pas reçu de traitement antibiotique".
Peu d’effets secondaires, assurent les chercheurs
Dans le détail, les antipsychotiques limitent l'extension de l’infection mais ne la traitent pas. C’est là que les antibiotiques ont toujours un rôle à jouer : si les antibiotiques classiques sont utilisés avec les antipsychotiques, leur efficacité sera bien meilleure, selon l’étude. Ainsi, les antipsychotiques pourraient perturber les amas existants de la bactérie chez l’homme et les antibiotiques se chargeront ensuite de tuer l’infection.
Quant à ceux qui s’inquiéteraient d’une éventuelle dépendance ou autre aux antipsychotiques, "c’est thérapeutiquement sûr avec peu d’effets secondaires quand on s’en sert avec modération. On a pu le voir depuis les 60 ans et plus que ces médicaments sont utilisés", assurent les auteurs. Si de nouveaux essais doivent encore avoir lieu, les chercheurs de Cochin ont bon espoir que leurs découvertes puissent mener à terme à un traitement plus efficace sur les humains.
Savoir diagnostiquer correctement et à temps la méningite, un véritable enjeu
Dans environ 70% des cas, la méningite bactérienne survient dans la petite enfance, avant l'âge de 5 ans. Chez les adultes, elle se déclenche chez les personnes ayant été en contact avec un malade, ayant des antécédents neurochirurgicaux ou étant immunodéprimées (diabète, alcoolisme, VIH…) d’après l’Organisation mondiale de la santé (OMS).
L’une des formes les plus graves de la méningite bactérienne est la septicémie à méningocoque. Cette dernière se caractérise par une éruption hémorragique et un collapsus circulatoire rapide. Même quand elle est diagnostiquée précocement et qu'un traitement adéquat est instauré, 8 à 15% des patients décèdent, souvent dans les 24 à 48 heures suivant l'apparition des symptômes. Et si elle n'est pas traitée, la méningite à méningocoque est fatale dans 50% des cas. Elle peut également entraîner des lésions cérébrales, une perte auditive ou une invalidité chez 10 à 20% des survivants.
Diagnostic trop tardif
Mais qu’elle soit bactérienne ou virale, la dangerosité de la méningite est due au fait qu’elle soit souvent mal diagnostiquée ou trop tard. D’après une étude britannique réalisée l’été dernier, sur 1000 patients suivis, dans 43% des cas, le virus ou la bactérie responsable de la maladie n’avait pas été identifié. Or, d’après les chercheurs, "le diagnostic rapide d'une cause spécifique de méningite est essentiel pour prescrire les bons antibiotiques si nécessaire, ou éviter les antibiotiques inutiles chez les patients atteints de méningite virale. Les efforts devraient se concentrer sur le traitement des symptômes et accélérer la sortie de l'hôpital, ce qui serait moins pénible pour les patients".











