Gynéco-obstétrique
Méningiome et contraception : risque modeste avec le désogestrel et nul avec le lévonorgestrel
Après cinq ans de prise continue, une pilule microdosée au désogestrel 75 µg ferait légèrement monter le risque de méningiome opérable, contrairement aux formulations à base de lévonorgestrel. Un simple arrêt du traitement suffirait à normaliser ce risque en moins d’un an.

- Sopone Nawoot/istock
Les principaux facteurs de risque des méningiomes intracrâniens sont l'âge avancé, le sexe féminin et l'utilisation prolongée et continue de six progestatifs, dont l'acétate de médroxyprogestérone, un contraceptif progestatif seul. Les études précédentes sur les contraceptifs oraux à base de progestatifs, avec ou sans œstrogènes, n'ont pas montré de risque de méningiomes.
Chez les 92 301 Françaises analysées dans le Système National des Données de Santé (SNDS) entre 2020 et 2023, 8 391 ont été opérées d’un premier méningiome intracrânien : elles ont été appariées à dix témoins chacune selon l’année de naissance et le département. Les résultats sont publiés dans The BMJ.
L’exposition contraceptive globale, reconstituée depuis 2006, montre que la prise de désogestrel pendant au moins 1 an confère déjà un sur-risque (OR 1,32 ; IC à 95 % 1,14-1,53) exclusivement porté par les prises continues de cinq à sept ans (OR 1,51) puis supérieures ou égales à sept ans (OR 2,09). Aucune hausse n’est observée pour le lévonorgestrel seul 30 µg ni pour sa combinaison œstro-progestative. Le nombre nécessaire pour nuire (NNH) est de 67 300 utilisatrices, ramené à 17 000 au-delà de cinq ans.
Un effet avéré de l’âge sur le risque de méningiome
Les analyses sur les critères secondaires dessinent la signature des tumeurs hormono-induites : prédilection pour la base antérieure (OR 1,50) ou moyenne (OR 1,90) du crâne, fréquence accrue des localisations multiples, et risque multiplié par 3 (OR 3,30) chez les patientes déjà exposées à un progestatif classé « à haut risque ». L’excès disparaît dès la première année suivant l’arrêt du désogestrel.
L’âge module l’impact absolu : 3,1/100 000 femmes-années chez les 20-44 ans versus 11/100 000 entre 45 et 54 ans, d’où un NNH pondéré de 45 100 avant 45 ans et 8 900 après 50 ans. Aucun signal n’est retrouvé sur la mortalité péri-opératoire ni sur la morbidité immédiate, et le profil hémorragique reste comparable aux témoins. Aucune élévation de risque n’est notée pour les implants ni pour les utilisatrices de lévonorgestrel, même après sept ans, ce qui conforte la sécurité de ce progestatif de deuxième génération.
Aucune élévation de risque n’est notée pour le lévonorgestrel
La robustesse méthodologique tient à la couverture exhaustive du SNDS, à l’exclusion des grossesses récentes et à l’appariement temporel qui limite les biais. Le recours au critère « chirurgie du méningiome » garantit une haute spécificité mais laisse de côté les tumeurs simplement surveillées, source probable d’une sous-estimation du risque global. Les prescriptions non remboursées (environ 2 %) et l’absence de données cliniques fines (indication d’endométriose, observance réelle) constituent les principales limites.
Selon les auteurs, aucun dépistage radiologique n’est justifié avant cinq ans d’utilisation d’une contraception en continu ; toutefois, chez les femmes de plus de 45 ans ou ayant reçu d’autres progestatifs à risque, le choix contraceptif doit être réévalué. La découverte d’un méningiome impose l’arrêt immédiat du désogestrel et une simple surveillance neuro-radiologique, qui suffit souvent à stabiliser ou réduire la lésion.
Au regard du bénéfice contraceptif prolongé et du profil cardiovasculaire favorable du désogestrel versus les œstro-progestatifs, l’équilibre bénéfice-risque doit rester individualisé ; la sensibilisation à la notion de dose cumulée représente une mesure immédiate de santé publique. Les recherches futures devront quantifier le risque avec les formulations combinées au désogestrel, évaluer le fardeau cumulatif des séquences hormonales successives et élucider la signature moléculaire spécifique des méningiomes hormono-induits.