Onco-Digestif
Cancer : 1ère démonstration du bénéfice de l’activité physique sur la survie
Chez les patients opérés d’un côlon stade III ou II à haut risque, trois ans d’activité physique encadrée débutés quelques semaines après la chimiothérapie réduisent de 28% le risque de récidive ou de décès et semblent prolonger la survie globale.

- Rani Nurlaela Desandi/istock
Des études précliniques ont montré que l'exercice physique pourrait réduire la croissance du cancer. De plus, des études observationnelles ont montré que les patients atteints d'un cancer colorectal qui pratiquent davantage d'activité physique récréative après leur traitement ont un risque moindre de rechute et de décès.
Les mécanismes possibles à l'origine de ces associations comprennent les effets de l'exercice physique sur les facteurs de croissance métaboliques, l'inflammation et la fonction immunitaire. Toutefois, il n'existe pas de preuves définitives de ce bénéfice évoqué.
Première étude randomisée dans le cancer du côlon
Pour combler cette lacune dans la recherche, le Groupe canadien d'essais sur le cancer (CCTG) a lancé l'essai CO.21 Colon Health and Lifelong Exercise Change (CHALLENGE), un essai randomisé de phase 3 comparant les effets de la fourniture de matériel d'éducation à la santé seul ou associé à un programme d'exercice structuré de trois ans chez des patients atteints d'un cancer du côlon qui avaient terminé une chimiothérapie adjuvante.
Selon les résultats présentés au congrès annuel de l’American Society for Clinical Oncology, et publiés dans le New England Journal of Medicine, à 7,9 ans de recul médian, l’exercice physique régulier abaisse l’incidence du critère principal (rechute, deuxième cancer ou décès) : HR = 0,72 (IC à 95 0,55-0,94 ; p = 0,02) soit 80,3 % de survie sans événement à cinq ans contre 73,9 %. La survie globale suit la même tendance (HR = 0,63 ; 90,3 % à huit ans vs 83,2 %). Les gains apparaissent dès la première année et concernent surtout la récidive hépatique (3,6 % vs 6,5 %) et les seconds cancers (5,2 % vs 9,7 %).
Maintien de l’exercice physique à 3 ans
Deux bras étaient comparés après le dernier cycle de chimiothérapie : programme d’exercice aérobie-renforcement (150-300 min/semaine, suivi individualisé sur trois ans) versus brochures d’éducation santé.
Les critères intermédiaires sont également atteints : hausse durable de l’activité modérée-vigoureuse de 10 MET-h/sem, amélioration de la VO₂pic et du score physique SF-36. Le taux annualisé d’événements musculo-squelettiques grimpe à 18,5 % (vs 11,5 %), sans impact notable sur l’adhésion (19 % de perdus de vue dans chaque bras) ni sur le poids ou le tour de taille, suggérant des mécanismes métaboliques et immunitaires plutôt que l’amaigrissement. Aucun signal défavorable cardiovasculaire ou cancérologique n’est détecté.
Une évolution des pratiques et des remboursements
Méthodologiquement, l’étude tire sa force d’une randomisation de phase 3 et d’un suivi décennal, mais sa lente inclusion (15 ans) et la sélection de patients en bon état général limitent la généralisation. L’absence de groupe strictement sédentaire et le soutien comportemental intensif réservé au bras exercice peuvent minimiser l’effet réel.
Selon les auteurs, la différence absolue de 6 points à cinq ans rivalise avec celle d’adjuvants pharmacologiques récents. La prescription d’activité physique supervisée devrait donc devenir un standard post-adjuvant, à condition que les systèmes de soins financent coachs, plateformes de télésanté et évaluations fonctionnelles. Les futures recherches viseront à débuter l’entraînement plus précocement (néoadjuvant, per-chimiothérapie), à identifier les signatures biologiques prédictives de réponse et à déterminer le « dose–effet » optimal pour concilier efficacité oncologique et tolérance musculo-squelettique.