Douleur
La façon dont le cerveau contrôle la douleur pourrait permettre de la traiter plus naturellement
Des chercheurs australiens sont parvenus à déterminer quelles zones du cerveau gèrent la douleur en fonction de sa localisation. Ce qui permet de dresser une cartographie précise de la douleur et d'espérer des traitements agissant directement sur la zone cérébrale qui la contrôle.
- Par Sophie Raffin
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- Jacob Wackerhausen/istock
Douleurs musculaires, dorsales, abdominales, neuropathiques… 42 % des Français adultes ont des douleurs chroniques, selon une étude récente de la fondation Analgesia. La prise en charge de ces souffrances est souvent très complexe. Mais, le travail de chercheurs de l’université de Sydney pourrait ouvrir la voie à des traitements plus sûrs et mieux ciblés.
En s’appuyant sur l’effet placebo, ils sont parvenus à établir une carte précise des zones du tronc cérébral qui contrôlent la douleur en fonction de sa localisation dans le corps.
Une carte cérébrale de la douleur plus précise
Pour avoir une vision précise des zones activées lors de la survenue et du soulagement de la douleur, les chercheurs ont exposé différentes parties du corps de 93 volontaires à la chaleur alors qu’ils étaient dans une IRM. Une crème anti-douleur placebo leur était appliquée sur la région du corps touchée tandis que la température est secrètement diminuée. Ce procédé les conditionne à croire que le produit soulage la douleur.
Ensuite, l’équipe a administré le même stimulus douloureux dans une zone traitée avec le placebo et une autre non traitée. Résultat : jusqu'à 61 % des participants ont assuré ressentir moins de douleur dans la zone où la crème placebo a été appliquée à l'origine. "Nous avons constaté que les parties supérieures du tronc cérébral étaient plus actives lors du soulagement des souffrances faciales, tandis que les régions inférieures étaient sollicitées pour les douleurs aux bras ou aux jambes", ajoute le Dr Lewis Crawford, auteur principal.
Dans le détail, les deux régions du tronc cérébral impliquées dans ce processus étaient la substance grise périaqueducale (PAG) et la région rostroventrale du bulbe rachidien (RVM). "Ces zones présentaient des modèles d'activité distincts en fonction de l'endroit où le soulagement de la douleur était dirigé, les parties supérieures du PAG et du RVM étant plus actives pour les douleurs faciales, tandis que les parties inférieures étaient plus actives pour les douleurs aux bras ou aux jambes", précisent les chercheurs dans leur communiqué.
Un effet placebo également mieux compris
Les travaux, publiés dans la revue Science mettent aussi en lumière les mécanismes de l’effet placebo. En s'appuyant sur les IRM réalisées, les chercheurs assurent qu’il n’est pas lié au système opioïde du cerveau, mais à la substance grise périaqueducale latérale. Cette zone serait par ailleurs liée à l’activité des cannabinoïdes.
"Les analgésiques à base d’opioïdes activent généralement les zones centrales du cerveau et peuvent affecter l’ensemble du corps, tandis que le circuit cannabinoïde que nous avons identifié semble agir dans des régions plus ciblées du tronc cérébral”, explique le Dr Crawford. “Cela confirme l’hypothèse selon laquelle les cannabinoïdes pourraient jouer un rôle dans le contrôle localisé de la douleur, sans recourir aux opioïdes."Des découvertes qui ouvrent la porte à des traitements anti-douleur plus efficace
Avoir une carte cérébrale précise des zones qui gèrent la douleur et de leur fonctionnement pourrait aider à développer des traitements plus performants et ne dépendant pas des opioïdes. "Nous avons maintenant un plan sur la façon dont le cerveau contrôle la douleur d'une manière spatialement organisée", précise le professeur Luke Henderson, auteur principal de l’étude. "Cela pourrait nous aider à concevoir des traitements plus efficaces et personnalisés, en particulier pour les personnes souffrant de douleurs chroniques dans une zone spécifique de leur corps.""Savoir précisément où se produit le soulagement de la douleur dans le cerveau nous permet de cibler cette zone ou de vérifier si un médicament agit au bon endroit", ajoute le Dr Crawford. "Cela pourrait mener à des traitements plus précis contre la douleur chronique, sans opioïdes, agissant exactement là où le cerveau s’attend à ce que le soulagement se produise – un progrès considérable dans la prise en charge de la douleur", conclut-il.








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