Onco-thoracique
Lésions primitives et métastases : analyse moléculaire comparée et cinétiques différentes
Une analyse moléculaire comparée de la lésion primitive pulmonaire et des métastases apporte des éléments nouveaux dans la compréhension de la dissémination métastatique du cancer du poumon
- wildpixel/istock
Les métastases sont la première cause de décès liée au cancer du poumon. Cependant, les mécanismes moléculaires sous-jacents au développement de métastases dans le cancer du poumon ont été peu étudiés.
Ce travail réalisé par une collaboration d’équipes scientifiques chinoises rapporte la présence d’altérations génétiques additionnelles au niveau des métastases comparativement à la lésion primitive, ainsi qu’un temps de survenue des métastases suffisamment long pour encourager le dépistage rapproché des récidives du cancer du poumon.
L’analyse présentée ici a porté sur 174 échantillons tumoraux provenant de 47 patients atteints d’un cancer broncho-pulmonaire, parmi lesquels 40 patients avaient des échantillons à la fois de tumeur primitive et de métastases. Les résultats de séquençage du génome entier (Whole Genome Sequencing) ont été comparé à une cohorte indépendante d’adénocarcinomes provenant du Mémorial Sloan Kettering.
Les métastases de cancer du poumon sont enrichies en altérations génétiques.
Sur les 47 patients étudiés, 78.7% avaient des métastases synchrones, les métastases métachrones survenaient entre 4.3 mois et 25.7 mois après le diagnostic de tumeur primitive pulmonaire. Les altérations génétiques retrouvées le plus fréquemment sur la tumeur pulmonaire primitive étaient TP53 (64.4%), EGFR (38.6%), KRAS (8.9%), et KEAP1 (14.9%). Il y avait une concordance entre ces altérations et les altérations retrouvées au niveau des métastases dans 45.6% [7.3%-80.6%] des cas. Les métastases ganglionnaires portaient quant à elle le moins de concordance avec la tumeur primitive.
Les métastases étaient enrichies en mutations dont certaines ont été retrouvées de façon prépondérante : des amplifications de MYC, des amplifications de NKX2-1, des amplifications de RICTOR, des gains dans le chromosome 20 (20p) et des pertes dans le chromosome 11 (11p). ces altérations additionnelles ayant potentiellement un rôle dans le développement des métastases.
Cinétiques différentes
Une modélisation de l’analyse des 40 tumeurs primitives-métastases appariées a permis de mettre en évidence une dissémination plus tardive des métastases, contrairement à une dissémination ganglionnaire plus rapide.
L’analyse a montré que plus de la moitié des métastases de cancer du poumon (61.1%) provenait d’une dissémination tardive (comparativement à d’autres localisation tumorale d’après les analyses de la cohorte du Memorial Sloan Kettering), alors que l’atteinte ganglionnaire étaient plus précoce dans la dissémination de la pathologie. En reconstruisant la phylogénie moléculaire métastatique, l’atteinte ganglionnaire précoce ne semble pas contribuer à la migration tumorale vers d’autres sites métastatiques non ganglionnaire. Ces derniers étant plus proches sur le plan moléculaire de la lésion primitive.
Mutations additionnelles sur les métastases
Ces résultats sont exploratoires et proviennent d’une population asiatique où la distribution des altérations génétiques n’est pas la même que dans les populations caucasiennes. Cependant il est intéressant de souligner que les métastases sont pourvues de mutations additionnelles, ce qui va dans le sens de la théorie de la carcinogénèse multi-étapes avec addition d’altérations génétiques au fur et à mesure du développement tumoral.
La notion que l’envahissement ganglionnaire est précoce, et n’est pas nécessairement un relai vers l’atteinte viscérale à distance peut faire réfléchir sur 2 points : 1) la nécessité de traitement intensif en cas d’atteinte loco-régionale, pour éviter la survenue précoce de cette atteinte ganglionnaire qui peut souvent dans les suites devenir symptomatique ; 2) la nécessité d’une surveillance rapprochée minutieuse des patients pour détecter les métastases à distance, cette surveillance est déjà recommandées par les groupes d’experts nationaux et internationaux.








