Cardiologie
Fibrillation atriale : la dépister et la traiter, oui, mais laquelle ?
En matière de dépistage de la fibrillation atriale (FA), rien n’est simple. La mise en perspective des résultats négatifs de l’étude LOOP avec ceux positifs de l’étude STROKESTOP, pose la question de la définition d’une FA significative sur le plan clinique.
- wingedwolf/istock
Déception au vu des résultats de l’étude LOOP, présentés lors du congrès virtuel de la Société européenne de cardiologie et publiés dans le Lancet. Cette vaste étude, qui avaient inclus plus de 6000 patients à risque de FA, n’a pas réussi à démontrer l’intérêt d’un dépistage pro-actif du trouble du rythme par un enregistreur implantable (ILR pour implantable loop recorder) avec instauration d’une anticoagulation en cas d’épisodes durant plus de 6 mn.
« On sait que la FA est associée à un risque multiplié par 5 d’AVC ischémique et d’un triplement de la mortalité et on sait aussi que de nombreux patients victimes d’un AVC ont une FA non diagnostiquée. Autant d’éléments rationnels pour mettre en place un tel essai », a souligné le Dr Jesper Svendsen, investigateur de l’étude, lors de la présentation des résultats.
Des patients à risque
Les patients inclus dans l’étude LOOP étaient âgés de 70 à 90 ans (74,7 ans en moyenne, 47,2% de femmes), et présentaient au moins un facteur de risque de FA : hypertension artérielle (91,8% des cas), diabète (28%), insuffisance cardiaque ou antécédent d’AVC (17,5%). Ils ont été randomisés 1 :3 pour le dépistage par ILR ou le suivi standard, puis suivis pendant 64,5 mois en moyenne.
Pas de réduction du risque d’AVC et d’embolie artérielle systémique
Comparativement à une prise en charge standard, avec suivi par une infirmière et le médecin généraliste, le recours à l’ILR a certes permis de diagnostiquer plus souvent une FA (chez 32% des 1501 patients du groupe ILR) que la stratégie habituelle (12% des 4503 sujets contrôle, soit bien plus que les 3% attendus, p < 0,001), ce qui a mécaniquement conduit à une plus large prescription d’AOD (30% vs 13%, p < 0,001).
Mais cela ne s’est pas traduit par une réduction du critère d’évaluation (AVC et embolies artérielles périphériques) : 4,5% vs 5,6% dans le groupe témoin, différence non significative (OR 0,80, IC 95% 0,61-1,05, p = 0,11). Pas de différence non plus entre les deux bras de l’étude quant au risque de décès de toutes causes (11,2% vs 11,3%) ou de saignements majeurs (4,3% vs 3,5%).
Quelle durée des épisodes prendre en compte ?
Comme l’a rapporté le Dr Isabelle Van Gelder en commentant les résultats de l’étude LOOP, « l’échec de l’étude tient peut-être en partie au critère de FA retenu : 6 mn, sans symptômes, c’est une FA sub-clinique sans doute sans conséquences sur le risque embolique. Alors que dans le groupe contrôle, les épisodes dépistés par les des praticiens et ayant conduit à un traitement par AOD étaient sans doute plus prolongés ».
L’étude STROKESTOP, publiée le même jour dans le Lancet, qui a elle porté sur des sujets à haut risque âgés de 75 et 76 ans, a souligné les bénéfices d’un dépistage intermittent par ECG pendant 15 jours sur un critère composite (AVC ischémique ou hémorragique, embolie systémique, hémorragie sévère et décès).
Autre élément d’explication : le taux plus élevé qu’attendu du dépistage de la FA en soins courants, conséquence probable d’une meilleure attention portée à ce trouble du rythme. Ce qui finalement est une bonne nouvelle.








