Politique

Présidentielles : les médecins optent pour un second tour Fillon-Macron

Tous les sondages le montrent, les médecins sont ancrés à droite et au centre. La politique menée depuis 5 ans les a confortés dans leurs intentions de vote. 

  • vverve/epictura
  • 21 Avril 2017
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    Dimanche 23 avril 2017, les médecins et leurs patients ne glisseront pas les mêmes bulletins dans l’urne. A 48h du premier tour de l’élection présidentielle 2017, les derniers sondages (1) créditent Emmanuel Macron (23%) devant Marine Lepen (22,5 %), François Fillon (19,5 %) et Jean-Luc Mélenchon (19 %). Mais du côté des médecins, les votes seront beaucoup plus serrés. En très grande majorité, ils donneront leurs voix au candidat des Républicains et d’En Marche !

    Vote de mécontentement ou d’adhésion, ces intentions confirment l’ancrage à droite et au centre de cette profession. Elles illustrent également la colère des médecins à l’encontre du Parti socialiste en raison de la politique santé menée depuis 5 ans par le gouvernement. De fait, François Fillon n’a cessé de répéter tout au long de sa campagne qu’il abrogerait le tiers payant généralisé une fois élu, et qu’il favoriserait la libre installation des médecins libéraux. Un discours, certes plus modéré du côté d’Emmanuel Macron, mais qui semble lui aussi porter ses fruits. Décryptage du Pr Patrick Hassenteufel, professeur de science politique à l’Université Versailles-Saint-Quentin et Sciences Po Saint-Germain-en-Laye.

    Où se situent les médecins sur l'échiquier politique ?
    Pr Patrick Hassenteufel : Il faut d’abord préciser que les donnés dont nous disposons concernent essentiellement les médecins libéraux. Mais globalement on constate la persistance d’un ancrage à droite, en particulier d’une droite que l’on peut qualifier de gouvernement, mais également au centre. Ces affinités ne sont pas nouvelles. En 2007, les médecins ont plus voté pour Nicolas Sarkozy et François Bayrou, et en 2012 le vote pour François Hollande était plus important mais nous étions face à un candidat socialiste plus modéré qu’en 2007.

    J’ai retrouvé un sondage réalisé avant les élections de 2012 où était testé l’hypothèse Dominique Strauss-Kahn. Ce dernier a recueilli 36 % des intentions de vote des médecins, ce qui montre le spectre électoral va de la droite de gouvernement jusqu’au centre gauche.

    Ecoutez l'intégralité de l'entretien avec le Pr Patrick Hassenteufel 

    Les médecins voteront-ils donc tous à droite et au centre dimanche ?
    Pr Patrick Hassenteufel : Les enquêtes montrent que deux candidats captent l’essentiel des intentions de vote, ce sont François Fillon et Emmanuel Macron. Le vote pour François Fillon est particulièrement élevé pour les plus de 50 ans tandis que les intentions de votes pour Emmanuel Macron sont plus fortes chez les moins de 40 ans. En outre, ces jeunes générations sont les plus féminisées.

    Donc il y a tout de même un glissement vers le centre gauche et la gauche dans les jeunes générations. Cela s’expliquent notamment par le fait qu’elles ont une aspiration moins forte à l’exercice libéral, et qui sont au contraire plus attachées au salariat.

    Pour autant, le parti socialiste a peu séduit les médecins, notamment en raison de la politique santé menée depuis 5 ans.
    Pr Patrick Hassenteufel : Oui, il y a phénomène classique de vote sanction. Mais celui-ci ne concerne pas seulement la gauche. En 2012, les intentions de vote en faveur de Nicolas Sarkozy ont été nettement moins élevées qu’en 2007 (48 % contre 36 %), ce qui a traduit le mécontentement concernant la loi HPST. Et si on remonte encore plus loin dans le temps en 1997, il y avait une baisse très vote des votes pour la droit de gouvernement en conséquence du plan Juppé.

    Cette année, le vote contre le gouvernement en place est renforcé par le fait que Benoït Hamon ne rassemble pas l’ensemble de son camp socialiste, et qu’Emmanuel Macron est soutenu par quelques personnalités socialistes. On peut donc penser que l’électorat des médecins est plutôt de gauche modérée et va donc se tourner vers Emmanuel Macron.

    Les médecins hospitaliers seront-ils plus attirés par la gauche ?
    Pr Patrick Hassenteufel : Le salariat et l’appartenance à la fonction publique correspond généralement à un vote plus marqué à gauche, ce qui veut en effet dire que les médecins hospitaliers votent plus souvent à gauche que les médecins libéraux. Mais cela ne veut pas dire qu’ils sont massivement à gauche. L’hypothèse que je fais est que François Fillon aura moins d’intentions de vote parmi les médecins hospitaliers, mais que ces derniers se tourneront vers Emmanuel Macron et dans une moindre mesure pour les autres candidats de gauche.

    Malgré cet ancrage à droite, peu de médecins voteront Marine Le Pen ?
    Pr Patrick Hassenteufel : Effectivement, c’est une constante depuis 2002. Les intentions de vote pour l’extrême droite sont bien plus faibles que dans le reste de l’électorat. Nous sommes autour de 5 %. Il existe un lien assez fort entre le niveau de diplôme et le vote Front National. Moins on est diplômés, plus on vote Front National. Or la profession médicale étant une profession particulièrement diplômée, cela n’est pas surprenant de voir des intentions de vote très faible.

    (1) Sondage Ipsos Sopra-Steria pour le Cevipof et Le Monde

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