Pédiatrie

Prématurité : pas d’intérêt des corticoïdes contre la dysplasie broncho-pulmonaire

Bien que sans effet indésirable majeur, l’hydrocortisone administrée 2 à 4 semaines après la naissance ne réduit pas de manière significative le risque de dysplasie broncho-pulmonaire chez le prématuré. Les corticoïdes ne devraient donc pas être utilisé dans cette indication.

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  • 28 Mar 2022
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    L'hydrocortisone, administrée 2 à 4 semaines après la naissance d’un grand prématuré, ne réduit pas de manière significative l'incidence de la dysplasie broncho-pulmonaire (DBP), selon un essai randomisé et multicentrique.

    Les résultats de l'étude sont cohérents avec ceux d'une étude précédente qui n'avait pas non plus trouvé de différence dans l'incidence de la DBP sous hydrocortisone. L'étude est publiée dans le New England Journal of Medicine.

    Extubation plus précoce

    Parmi les 800 enfants très prématurés de l’étude, 16,6% de ceux qui ont reçu de l'hydrocortisone n’ont pas de dysplasie broncho-pulmonaire modérée à sévère à 36 semaines après les dernières règles chez la mère, contre 13,2% des enfants du groupe placebo (RR ajusté = 1,27, IC à 95% 0,93-1,74),

    Pendant le traitement, un plus grand nombre de nourrissons du groupe hydrocortisone ont été extubés par rapport au groupe placebo (44,7% contre 33,6 % ; RR 1,54, IC à 95% 1,23-1,93), et ils ont passé moins de jours sous ventilation mécanique avant 36 semaines d’aménorrhée (médiane 37 contre 40 jours).

    Cependant, à 36 semaines, il n'y a pas de différences substantielles entre les groupes quant au nombre de nourrissons extubés, à la durée de l'oxygénothérapie supplémentaire ou à la durée d'hospitalisation.

    Une affection en lien avec l’inflammation ?

    La dysplasie broncho-pulmonaire est une affection courante chez les grands prématurés (prévalence de 75% chez ceux nés avant 28 semaine de gestation), qui peut entraîner des problèmes respiratoires persistants sur le long terme.

    De nombreuses études ont évalué l'efficacité des corticoïdes, car l'inflammation contribuerait au développement de la DBP et les corticoïdes ont une efficacité anti-inflammatoire démontrée.  

    La dexaméthasone a été utilisée chez les grands prématurés pour traiter la DBP, mais elle comporterait un risque neurologique pour le nourrisson, avec un risque de déficience cognitive ou de paralysie cérébrale.

    Pas d’effet notable

    L'hypothèse selon laquelle une extubation plus précoce entraînerait une diminution secondaire de l'incidence de la dysplasie broncho-pulmonaire ou du décès n'est pas confirmée dans cette étude.

    En ce qui concerne l'innocuité de l'hydrocortisone, aucune différence n'a été constatée entre le groupe traitement et le groupe placebo sur le taux de survie sans déficience neuro-développementale modérée à sévère (36,9% contre 37,3% ; RRa 0,98, IC à 95% 0,81-1,18).

    Il faut noter que la dexaméthasone a également été administrée à une proportion non négligeable de nourrissons dans chaque groupe : 39,7% dans le groupe hydrocortisone et 42,1% dans le groupe placebo.

    Un essai en double-aveugle

    Cet essai en double aveugle, versus placebo, a été mené dans 19 centres universitaires des États-Unis. Les nourrissons étaient inclus s'ils avaient un âge gestationnel estimé à moins de 30 semaines, s'ils étaient âgés de 14 à 28 jours postnatals et s'ils recevaient une ventilation mécanique par sonde endotrachéale.

    Ont été exclus ceux qui présentaient des affections congénitales majeures, qui avaient pris de l'indométhacine ou de l'ibuprofène 48 heures avant le début de l'essai et qui avaient reçu un traitement précédent par glucocorticoïdes.

    Au total, 800 nourrissons ont été randomisés dans les groupes hydrocortisone et placebo. L'hydrocortisone a été administrée pendant 10 jours, en commençant par 4 mg/kg pendant les 2 premiers jours et en diminuant progressivement jusqu'à 0,5 mg/kg les 2 derniers jours. Les nourrissons du groupe placebo ont reçu une solution saline.

    Seuls deux tiers des patients admissibles ont été inscrits à l'essai, et de nombreux patients ont été traités à la dexaméthasone, ce qui constitue une limite à l'étude.

    Les corticoïdes inutiles

    Dans un éditorial associé, des experts soulignent que la cause de la dysplasie broncho-pulmonaire est multifactorielle et qu’il est très peu probable qu'une seule intervention thérapeutique ait un effet significatif sur le résultat.

    Compte tenu des résultats des différentes études, dont celle-ci, ils recommandent de cesser de chercher la solution miracle et de s’orienter plutôt vers une combinaison de traitements. Malgré les nombreux essais randomisés et contrôlés, ils considèrent que l’on est encore loin de déterminer la formulation, le moment, le dosage et la durée appropriés des corticoïdes dans ce groupe de prématurés vulnérable.

    En conséquence, leur conclusion est que chez les prématurés, les corticoïdes ne devraient pas être administrés pour prévenir la dysplasie broncho-pulmonaire.

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    JDF