Cardiologie

Cardiopathies : plus de 2 millions de patients prennent du cannabis aux USA

Les effets du cannabis sur la santé cardiaque ne sont pas suffisamment étudiés, mais des études observationnelles suggèrent un lien alarmant entre consommation de cannabis et augmentation du risque cardiaque.

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  • 21 Jan 2020
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    Alors même que de plus en plus d'États américains commencent à légaliser le cannabis à des fins médicales et récréatives, et que de plus en plus de produits à base de cannabis sont disponibles à la consommation, les effets cardiovasculaires de cette plante qui contient une bonne centaine de molécules plus ou moins actives ne sont pas bien compris.

    Dans un article de synthèse publié dans le Journal of the American College of Cardiology, une équipe de chercheurs du Brigham and Women's Hospital révèle que plus de 2 millions d'adultes atteints de maladies cardiovasculaires déclarent avoir consommé, ou actuellement consommer, du cannabis. Une consommation qui doit être mieux évalué par les médecins et mieux exploré par les chercheurs, en particulier au plan cardiovasculaire

    Une collaboration pharmacologique

    Les chercheurs ont travaillé avec des cardiologues et des pharmacologues pour mieux comprendre les implications d'une consommation de cannabis.

    Dans leur article de synthèse, les auteurs décrivent les différentes modalités pharmacologiques selon lesquelles les nombreux composants du cannabis peuvent affecter le cœur et les vaisseaux au niveau moléculaire, ainsi que les interactions médicamenteuses que ces composés du cannabis peuvent avoir avec les médicaments couramment administrés en cardiologie.

    Des études observationnelles

    D’une revue extensive de la littérature, il ressort que différentes études observationnelles suggèrent un lien entre cannabis et diverses maladies cardiaques.

    La fumée de cannabis contient un grand nombre de substances chimiques cardiotoxiques identiques à celles que l'on trouve dans les cigarettes, ce qui fait craindre leur toxicité pour le cœur, au même titre que l’on a démontré qu’elles sont toxiques pour les poumons. L'inhalation de cannabis peut augmenter le rythme cardiaque et la pression artérielle et participer ainsi au développement d’une maladie coronaire et de son risque principal : l’infarctus du myocarde. La consommation de cannabis a également été associée à des anomalies du rythme cardiaque, notamment à la fibrillation auriculaire.

    Différentes études observationnelles ont montré que les fumeurs de cannabis étaient trois fois plus susceptibles d’avoir un accident cérébrovasculaire, tel qu'un accident vasculaire cérébral. De plus, dans une étude, parmi les 334 patients qui avaient eu un accident vasculaire cérébral avant 45 ans, 17 % étaient des consommateurs de cannabis.

    La recherche expérimentale est bridée

    La consommation de marijuana, tant à des fins récréatives que médicales, augmente rapidement aux Etats-Unis alors que nombre de ses effets cardiovasculaires restent mal connus à ce jour.

    Cela tient à ce que, aux USA, le cannabis est classé comme une drogue de l'annexe I par l'Agence américaine de lutte contre les stupéfiants, ce qui signifie que son utilisation dans la recherche est très limitée et que les chercheurs doivent réaliser un véritable parcours du combattant pour obtenir les autorisations des agences locales, étatiques et fédérales. Il en est de même en France, même si les mécanismes sont différents.

    Au final, même si les différents États américains légalisent son utilisation, il n'est pas possible de procéder à des essais cliniques randomisés pour comprendre ses effets sur la santé, étant donnée le nombre de restrictions en vigueur. Les chercheurs ne peuvent qu’utiliser des données observationnelles de vraie vie pour étudier les effets du cannabis : par exemple en comparant les statistiques sur la santé dans un Etat, avant et après sa légalisation, qu’il s’agisse d’un usage récréatif, médical ou les deux. À mesure que la consommation de marijuana augmente aux États-Unis, de vastes études épidémiologiques pourraient ainsi clarifier la relation entre la marijuana et les risques cardiovasculaires.

    En attendant, les chercheurs encouragent donc les médecins à systématiquement interroger leurs malades sur leur consommation de cannabis, d’autant plus que celle-ci peut interférer avec les effets d'autres médicaments habituellement prescrits en cardiologie.

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    JDF