Psychiatrie

Dépression résistante : efficacité modeste de l’association à un antipsychotique

Dans la dépression résistante à un 1er traitement antidépresseur, l’adjonction d’aripiprazole à l’antidépresseur augmente la rémission par rapport à son remplacement par le bupropion en monothérapie.

  • kmiragaya/epictura
  • 13 Juillet 2017
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    Dans un suivi de 12 semaines d'un essai clinique randomisé de 1522 patients atteints d'un trouble dépressif majeur (85% d'hommes) ne répondant pas au traitement antidépresseur initial, 29% sont en rémission après adjonction d’un antipsychotique atypique, l’aripiprazole, contre 22% chez qui l’antidépresseur initial a été remplacé par le bupropion, un inhibiteur sélectif de la recapture des catécholamines (noradrénaline et dopamine).

    Cette efficacité de l’adjonction de l’aripiprazole est statistiquement significative mais elle est cliniquement modeste au regard des effets secondaires (prise de poids et risque de mouvement anormaux), ce qui rend cette association discutable.

    Une randomisation des stratégies

    De décembre 2012 à mai 2015, 1522 anciens combattants américains avec un diagnostic de maladie dépressive non psychotique et ne répondent pas à au moins un antidépresseur ont été inclus dans l'étude. Les malades ont été randomisés entre l’une des 3 stratégies testées : remplacement de l’antidépresseur initial par un autre antidépresseur (groupe bupropion, n = 511) ; association de l’antidépresseur initial avec le bupropion (groupe association ; n = 506) ou association avec un antipsychotique atypique, l'aripiprazole (groupe aripiprazole, n = 505).

    Cette stratégie a été appliquée pendant 12 semaines (phase de traitement aiguë) et jusqu'à 36 semaines pour un suivi à plus long terme (phase de continuation). Le critère principal a été la rémission au cours de la phase de traitement sur l’échelle simplifiée en 10 points QIDS-C16. Les critères secondaires comprenaient une réduction d’au moins 50% du score QIDS-C16 ou une amélioration de l'échelle Clinical Global Impression Improvement, les rechutes et les effets indésirables.

    Une amélioration du taux de rémission

    Les taux de rémission à 12 semaines sont de 22,3% (n = 114) dans le groupe remplacement par bupropion, 26,9% (n = 136) pour le groupe association au bupropion et 28,9% (n = 146) pour le groupe association à l’aripiprazole.

    Le groupe association à l’aripiprazole fait mieux que le groupe remplacement par bupropion en termes de rémission (risque relatif [RR], 1.30 [IC 95%, 1.05-1.60] ; p = 0.02), mais les autres comparaisons ne sont pas significatives.

    La réponse est plus importante pour le groupe association à l’aripiprazole (74,3%) que pour le groupe remplacement par bupropion (62,4%, RR, 1,19 [IC 95%, 1,09-1,29]) ou le groupe association au bupropion (65,6%, RR, 1,13 [ IC 95%, 1,04-1,23]). En ce qui concerne la rechute, aucune différence significative n’est observée entre les groupes.

    Une anxiété est plus fréquemment observée au sein des 2 groupes bupropion (24,3% dans le groupe remplacement par bupropion [n = 124] vs 16,6% dans le groupe association à l’aripiprazole [n = 84] et 22,5% dans le groupe association au bupropion [n = 114]). Les effets indésirables sont plus fréquents dans le groupe association à l’aripiprazole et incluent une somnolence, une akathisie et une prise de poids.

    En pratique

    Traditionnellement, moins d'un tiers des malades souffrant d’un trouble dépressif majeur obtiennent une rémission avec leur premier traitement antidépresseur. L’étude de stratégie séquentielle de traitement dans la dépression (STAR​​*D) avait montré que le bupropion, un inhibiteur sélectif de la recapture des catécholamines (noradrénaline et dopamine), était au moins aussi efficace que les autres agents antidépresseurs en remplacement ou en association. Cependant, STAR*D n'avait pas été conçue pour comparer ces stratégies de remplacement ou d’association au bupropion avec les antipsychotiques atypiques qui étaient déjà fréquemment utilisés en pratique comme agents adjuvants dans les dépressions résistantes au traitement.

    Plusieurs études avaient montré l'efficacité de l'aripiprazole en association aux antidépresseurs dans les dépressions résistantes et une étude récente suggère que l’association à l'aripiprazole est plus intéressante que le remplacement d’un antidépresseur initial par un autre, avec une tolérance comparable. Cependant, les essais cliniques de bonne qualité manquaient pour comparer ces stratégies. Dans cet essai clinique randomisé dans la dépression résistante à un traitement antidépresseur initial, l’association de celui-ci à l'aripiprazole augmente statistiquement la probabilité de rémission mais le bénéfice clinique reste modeste et il n'y a pas de différences significatives dans les taux de rechute entre les groupes de traitement.

    Concernant les effets indésirables de ces 2 stratégies, ils ne sont pas négligeables avec plus d’anxiétés dans le groupe bupropion et plus d’akathisie, de somnolence et de prise de poids avec syndrome métabolique dans le groupe association à l’aripiprazole. Cette dernière association dont donc être discutée avec le malade et sa famille et ne peut être mise en place que sous couvert de stratégies de prévention de la prise de poids.

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