neurologie
AVC ischémique, la thrombolyse jusqu’à 24 heures est possible !
L’accès à une imagerie avancée s’impose comme la condition principale pour repousser les strictes limites horaires de prises en charge comme en témoigne les résultats de l’étude HOPE.
- Henadzi Pechan/iStock
Dans la prise en charge de l’AVC, chaque minute compte. En ligne de mire, l’un des points les plus contraignants reste la fenêtre thérapeutique strictement limitée de la thrombolyse intraveineuse, classiquement fixée à 4,5 heures après le début des symptômes.
L’étude HOPE, publiée début décembre (JAMA Vol. 334, No. 9 Alteplase for Acute Ischemic Stroke at 4.5 to 24 HoursThe HOPE Randomized Clinical Trial) rebat partiellement les cartes en testant une approche jusqu’ici réservée à des protocoles exploratoires : administrer l’alteplase jusqu’à 24 heures, chez des patients soigneusement sélectionnés grâce à l’imagerie.
HOPE est un essai randomisé multicentrique incluant 372 patients présentant un AVC ischémique aigu avec discordance perfusion-diffusion ou une autre forme d’identification de tissu cérébral « salvable ». Tous étaient non éligibles d’emblée à une thrombectomie.
La thrombolyse était réalisée entre 4,5 et 24 heures après le début des symptômes — une amplitude temporelle qui, en pratique, correspond à une grande partie des patients dont le réveil ou la découverte tardive des symptômes empêchent d’entrer dans les critères habituels.
Résultat principal, l’étude pointe un réel bénéfice fonctionnel pour les patients qui ont bénéficié de la thrombolyse. À 90 jours, 40 % des patients ayant reçu l’alteplase présentaient une autonomie fonctionnelle contre 26 % dans le groupe prise en charge standard.
Cette différence, statistiquement robuste, constitue la première démonstration randomisée à large échelle d’un bénéfice fonctionnel de la thrombolyse au-delà des délais conventionnels, dans une population bien définie par l’imagerie.
Le gain absolu — 14 points de pourcentage — est d’une magnitude comparable à d’autres grands essais ayant modifié les pratiques en neurologie aiguë.
Un bénéfice contrebalancé par un risque hémorragique accru
L’étude observe toutefois une augmentation des hémorragies intracrâniennes symptomatiques : 3,8 % sous alteplase contre 0,5 % dans le groupe contrôle.Ce signal n’est pas inattendu. L’allongement de la fenêtre de thrombolyse augmente mécaniquement le risque de transformation hémorragique, d’autant plus en présence de tissu ischémique déjà fragilisé.
Fait notable, la mortalité globale à 90 jours reste identique entre les groupes, ce qui suggère que le surcroît d’hémorragies n’entraîne pas une pénalisation majeure sur la survie.
À court terme, pour que les résultats de l’étude HOPE soient transposable, trois conditions sont nécessaires ;
-Un accès systématique à une imagerie avancée (IRM diffusion-perfusion ou scanner avec perfusion) s'avère incontournable. Elle permet d’identifier la pénombre et d’exclure les infarctus déjà étendus. La pénombre ischémique désigne, rappelons-le, le tissu cérébral périphérique présentant une altération fonctionnelle, mais potentiellement récupérable
Après un événement ischémique, la zone de pénombre peut persister plusieurs heures grâce à l’irrigation sanguine des artères collatérales, de sorte que la présence d’une pénombre implique une possibilité de survie cellulaire et une amélioration du résultat clinique
-Une capacité organisationnelle optimale avec une filière AVC fonctionnant 24/7, une lecture experte des images et une décision rapide.
-Une sélection rigoureuse des patients sans indication de thrombectomie, sans contre-indications à la thrombolyse, et dont le profil d’imagerie suggère une réelle récupérabilité.
Une évolution logique de l’histoire de la thrombolyse
HOPE s’inscrit dans un mouvement général, à savoir l’abandon progressif des fenêtres temporelles rigides, au profit d’une sélection guidée par l’imagerie
C’est le même principe qui a conduit à élargir la thrombectomie mécanique jusqu’à 24 heures.
Il n’est donc pas surprenant que la thrombolyse suive cette dynamique — même si son rapport bénéfice/risque reste plus délicat que celui de la thrombectomie.
Au final, HOPE est l’étude la plus solide à ce jour montrant qu’une thrombolyse IV tardive peut améliorer significativement la récupération fonctionnelle, dans un cadre strictement sélectionné. À moyen terme, il est plausible que la thrombolyse jusqu’à 24 h devienne une option validée dans les centres disposant d’une filière d’imagerie avancée.








