Onco-sein

Cancer du sein métastatique HER2+ : retour sur l’anticorps conjugué vedette de 2021

Après avoir été une des présentations phares de l’ESMO 2021, le NEJM publie les résultats de DESTINY-03, confirmant la réduction du risque de progression de plus de 70% du Trastuzumab Deruxtecan comparativement au Trastuzumab Emtansine dans les cancers du sein métastatiques HER2+.

  • ThitareeSarmkasat/iStock
  • 29 Mars 2022
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    Actuellement, environ 20% des cancers du sein diagnostiqués sur-expriment le récepteur HER2.  La prise en charge en phase métastatique repose sur une association de chimiothérapie par Taxane et double blocage HER2 (Pertuzumab-Trastuzumab), suivie du Trastuzumab Emtansine (TDM1), dont les données de survie sans progression sont de 9.6 mois et 30 mois pour la survie globale.

    Le développement de l’anticorps conjugué, le Trastuzumab Deruxtecan, combinant un anticorps monoclonal humanisé anti-HER2, relié via un tétrapeptide à une charge inhibitrice de la Topoisomérase 1, a déjà donné des résultats remarquables, via l’étude DESTINY-01, avec une médiane de survie sans progression de 16.4 mois, chez des patientes lourdement pré-traitées. DESTINY-03 pose quant à elle le positionnement de cette molécule en 2éme ligne.

    Un bénéfice majeur en survie sans progression

    Publiée par J. Cortès et al, dans le New England Journal of Medicine, l’étude de phase III, DESTINY-03, comparant le Trastuzumab Deruxtecan au Trastuzumab Emtansine chez des patientes suivies pour un cancer du sein métastatiques HER2+, après taxanes et trastuzumab, tient toutes ces promesses avec un bénéfice de plus de 70% en survie sans progression.

    En pratique, entre Juin 2018 et Juin 2020, 524 patientes présentant un cancer du sein HER2 surexprimé, métastatique, déjà pré traitées par Taxane et trastuzumab en phase avancée ou évoluant ou récidivant à moins de 6 mois d’un traitement néo/adjuvant, ont été randomisées selon un schéma 1 :1 : 261 dans le bras Trastuzumab Deruxtecan (5.4 mg/kg toutes les 3 semaines) et 263 dans le bras Trastuzumab Emtansine (3.6 mg/kg toutes les 3 semaines).

    La population, homogène dans son ensemble, présentait pour environ 50% des récepteurs hormonaux positifs, une atteinte cérébrale considérée stable (23.8% dans le bras Trastuzumab Deruxtecan et 19.8% dans le bras Trastuzumab Emtansine), 50% avait reçu une ligne antérieure en phase métastatique, et 60% du Pertuzumab au préalable. Les patientes étaient stratifiées selon le statut hormonal, un traitement antérieur par Pertuzumab, une atteinte métastatique visérale. Le critère de jugement principal était la survie sans progression, définie en aveugle par un comité indépendant, les critères de jugement secondaire la survie globale, le taux de réponse objective, et la tolérance.

    Un bénéfice dans tous les sous-groupes avec une toxicité mieux anticipée

    Avec un suivi médian de 16 mois, l’étude est positive concernant son critère de jugement principal : la médiane de survie sans progression du bras Trastuzumab Deruxtecan est non atteinte vs 6.8 mois dans le bras Trastuzumab Emtansine, (HR 0.28, IC à 95% : 0.22-0.37 ; p<0.001). A 12 mois, 75.8% et 34.1% des patientes respectivement sont en vie en l’absence de progression tumorale. Ce bénéfice est retrouvé dans tous les sous-groupes : HR à 0.33 chez les patientes traitées par une ligne antérieure vs 0.28 pour ≥2 lignes, HR à 0.38 en cas de métastases cérébrales vs 0.27 en l’absence.

    Les données de survie globale ne sont pas matures, mais le taux de survie globale à 12 mois est évalué à 94.1% dans le bras expérimental vs 85.9% dans le bras standard (HR 0.55, IC à 95% : 0.36-0.86). Le taux de réponse objective est nettement en faveur du Trastuzumab Deruxtecan : 79.7% des patientes vs 34.2% pour le Trastuzumab Emtansine, dont 16.1% en réponse complète vs 8.7% respectivement. Seulement 1.1% des patientes du bras expérimental sont progressives d’emblées contre 17.5% dans le bras standard.

    Concernant la tolérance, les résultats sont à pondérer à la durée d’exposition au traitement : 14.3 mois pour le Trastuzumab Deruxtecan vs 6.9 mois pour le Trastuzumab Emtansine. L’incidence des effets secondaires tous grades confondus est de 98.1% vs 86.6%, et de grade ≥3 de 45.1% vs 39.8% respectivement. L’incidence des réductions de dose ou d’arrêt de traitement pour toxicité est par contre plus importantes dans le bras expérimental (13.6% vs 7.3%). Enfin le taux de pneumopathie interstitielle est finalement moins important que celui retrouvé dans Destiny-01 : 10.5% tous grade confondus vs 1.9% respectivement.

    Au final, cette publication ne fait qu’appuyer le potentiel thérapeutique majeur de cette drogue, dont nous n’avons pas fini d’entendre parler, et notamment son positionnement en 1ère ligne via DESTINY-09.

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