Addictologie
LSD : le recrutement de l'ensemble du cerveau
Habituellement, une stimulation visuelle est traitée par le cortex visuel. Sous LSD, les fonctions cognitives ne sont plus compartimentées et la stimulation mobilise la quasi-totalité du cerveau.
- agsandrew/pix-5
Basée sur des volontaires sains, l’expérience est controversée, mais elle a le mérite de faire "jaser" et peut-être même, de faire avancer la recherche en psychiatrie. Une équipe de l’Imperial College de Londres (Royaume-Uni) a étudié, pour la première fois, le cerveau de persnnes ayant ingéré du LSD (diéthylamide de l’acide lysergique). Les résultats ont été publiés dans la revue scientifique PNAS.
La recherche autour de cette substance hallucinogène a été arrêtée durant un demi-siècle, en raison de l’augmentation de son utilisation récréative à la fin des années 1960. Depuis une quinzaine d’années, elle redémarre en Europe et aux Etats-Unis, mais reste marginale. Certains chercheurs pensent que le LSD pourrait avoir des effets bénéfiques dans les dépressions résistantes à tous les traitements, d’autres évoquent son efficacité dans le traitement de la maladie alcoolique.
Un feu d'artifice dans le cerveau
Le laboratoire du Dr Robin Carhart-Harris tente de comprendre l’action du LSD, principe actif des champignons hallucinogènes, sur le cerveau. 20 volontaires ayant déjà consommé ces substances ont été sélectionnés et divisé en 2 groupes : un groupe a avalé 75 mg du LSD, l'autre un placebo.
Le cerveau de ces volontaires en mal de sensations fortes a ensuite été analysé par IRM et magnétoencéphalographie, qui permet d’étudier les champs magnétiques émis par les neurones. Les chercheurs ont ainsi pu voir ce qui se passe dans le cerveau des sujets qui expérimentent des hallucinations visuelles. Habituellement, une stimulation visuelle est traitée par le cortex visuel, situé à l’arrière de l'encéphale. Mais sous LSD, cette information mobilise la quasi-totalité du cerveau. Et ce véritable feu d’artifice se déclenche également lorsque les participants ont gardé les yeux fermés. Pour les chercheurs, cette observation suggère qu’ils sont capables de voir des choses simplement grâce à leur imagination.

Source : Neural correlates of the LSD experience revealed by multimodal neuroimaging, PNAS. En haut, le cerveau d'un participant ayant pris un placebo. Seul le cortex visuel est activé. En bas, le cerveau sous LSD. La quasi-totalité de l'organe est mobilisée.
Par ailleurs, ces travaux permettent de mieux comprendre pourquoi le LSD modifie toutes les perceptions sensorielles et l’état de conscience. « Normalement, notre cerveau fonctionne grâce à des réseaux indépendants responsables d’une fonction spécifique comme la vue, le mouvement ou l’ouïe. Mais sous LSD, cette séparation s’écroule et est remplacée par un réseau plus unifié, explique le Dr Carhart-Harris, responsable de ces travaux. Ceci expliquerait l’altération profonde de la conscience fréquemment décrite. Cela pourrait également expliquer ce que les volontaires qualifient de voyage d’introspection et de voyage intérieur durant lequel ils se reconnectent à eux-mêmes et à la nature. Cette expérience est parfois vécue comme mystique ou religieuse et semble être associée à un bien-être, même après que les effets de la drogue s’atténuent. »
Un cerveau plus libre
Cette drogue psychédélique "décloisonnerait" notre cerveau, lui permettant de fonctionner « librement et sans contrainte comme celui des enfants ».
Lors d’une autre expérience, les chercheurs ont également découvert que la combinaison LSD-musique améliorait l’activité du parahippocampe, une zone impliquée dans la formation d’image mentale et de la mémoire. Plus cette région communique avec le cortex visuel, plus le cerveau est capable de générer des visions complexes et notamment se remémorer des scènes de vie.
Pour les chercheurs, ces découvertes pourraient permettre de développer des thérapies pour les troubles psychiatriques, en particulier la dépression.











