Buvez, bougez !

La nouvelle stratégie Coca-Cola pour « lutter » contre l’obésité

Le célèbre fabriquant de soda promeut l'activité sportive et s'emploie à démontrer que l'obésité n'est pas à mettre sur le compte des boissons sucrées, preuves scientifiques à l'appui.

  • Par Suzanne Tellier
  • RICHARD B. LEVINE/NEWSCOM/SIPA
  • 10 Aoû 2015
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    Il existe un point commun entre l’industrie du tabac et celle du sucre. Toutes deux ont tenté pendant des décennies de tordre la science afin de minimiser leur impact sanitaire – parfois avec succès. Les décès massifs liés au tabac ont forcé la première à renoncer à cette sinistre promotion. La seconde, en revanche, n’a pas fini de semer le trouble pour mieux manipuler les populations.

    Sucre et obésité : "aucune preuve probante"

    La preuve avec Coca-Cola. Selon une enquête relayée par le New York Time, la célèbre enseigne de soda investit des sommes colossales dans une nouvelle stratégie de communication autour de la santé. Le message est simple : pour maintenir un poids sain, faites de l’exercice physique, mais surtout, ne comptez pas les calories contenues dans vos plats et boissons.

    Le Dr Coca-Cola estime ainsi que les consommateurs passent trop de temps à calculer les sucres et graisses de leur alimentation au lieu de faire du sport. L’idée est de faire comprendre, de manière insidieuse, que l’obésité ne puise pas son origine dans une mauvaise alimentation, mais bien dans l’absence d’activité sportive. Ou encore, que le sport permettrait d’anéantir les méfaits d’une alimentation douteuse, dont nous pourrions continuer à jouir en toute bonne conscience.

    Ainsi s’exclame le vice-président du groupe, cité par le journal américain : « Le message de la plupart des médias populaires et de la presse scientifique tourne autour de : ‘Oh, ils mangent trop, ils mangent trop, ils mangent trop’, tout en blâmant les fast-food et les boissons sucrées, etc. En fait, il n’y a aucune preuve probante que cela est vrai ».

    Des grands professeurs recrutés

    Pour apporter ses propres preuves probantes, le groupe aurait investi à hauteur d’un million et demi de dollars dans une toute nouvelle « organisation à but non lucratif », Global Energy Balance Network, fondée par deux scientifiques américains de renom. Le premier, de la South Carolina University, a aidé pendant 25 ans à rédiger les recommandations sanitaires nationales sur l’activité physique. Le second travaille à l’Ecole de Santé Publique de la West Virginia University.

    Près de quatre millions de dollars auraient ainsi servi à différents travaux sur les bienfaits de l’activité physique dans le traitement de l’obésité et du diabète. Selon le New York Time, les deux chercheurs ne semblent pas perturbés par la présence de cet investisseur, qui n’interviendrait dans aucune étude et coopérerait en toute transparence.

    Recruter des grands professeurs pour en faire des « marchands de doutes » est une tactique typique des industries qui commercialisent des produits toxiques. Selon une analyse publiée par le journal Plos One et citée par le journal américain, les études financées par Coca-Cola, PepsiCo ou encore the American Beverage Association ont cinq fois plus de chances de ne trouver aucun lien entre la consommation de boissons sucrées et la prise de poids. Et pendant que la « science » prouve l’inoccuité du Coca, l’épidémie d’obésité poursuit sa course aux Etats-Unis, où elle touche plus d'un adulte sur trois. 

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