Socio-professionnel

Fin de vie : face au risque, les patients âgés pas si pressés de mourrir

Selon une étude menée dans un grand hôpital britannique, au moment de son admission d'urgence à l'hôpital, seul un patient âgé très malade sur cinq choisit de ne pas être réanimé en cas d’arrêt cardiorespiratoire.

  • omain LONGIERAS/iStock
  • 09 Septembre 2021
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    Lorsqu’un médecin place dans le dossier médical d’une personne un ordre de ne pas réanimer (NPR), cela signifie que le personnel médical qu’il ne doit pas tenter de réanimation cardiopulmonaire (RCP). En France, cette procédure fait l’objet de directives spécifiques et très encadrées, qui nécessitent une discussion entre le personnel soignant et les patients gravement malades au vu de leur affection médicale immédiate.

    Toutefois, malgré les risques élevés d’arrêt cardiorespiratoire, nombreux sont les patients âgés à souhaiter être réanimés quand ils sont confrontés au risque réel. C’est ce que montre une nouvelle étude britannique publiée dans la revue BMJ Supportive & Palliative Care. Menée dans un grand hôpital, elle montre que seul un patient âgé et malade sur cinq prend la décision de non-réanimation lors de son admission aux soins intensifs.

    22% seulement des patients

    Les chercheurs ont souhaité savoir combien de patients âgés admis aux soins intensifs avaient une décision de RCP préexistante, combien en avaient une enregistrée dans le service après leur admission et combien de ceux qui sont décédés avaient déjà une décision de RCP en place.

    Pour le savoir, ils ont examiné les dossiers médicaux de 481 patients âgés de 65 ans et plus qui ont été admis consécutivement dans l'un des six services médicaux aigus d'un grand hôpital universitaire britannique entre mai et juin 2017. L’âge moyen de ces patients était de 82 ans. Le nombre moyen d'affections coexistantes était de 5, et ils prenaient en moyenne 8 médicaments sur ordonnance.

    Au total, une décision de RCP a été enregistrée dans le dossier médical de 22% des patients lors de leur arrivée dans le service. 30 décisions ont été prises en cours de route dans les services de soins d'urgence. 34 avaient été enregistrées lors d'une précédente admission à l'hôpital et 41 avaient été remplies par le médecin de famille du patient.

    Chez les 376 patients restants, 48 (soit 13%) ont eu des discussions sur la RCP dans le service, soit lorsqu’ils étaient seuls (16 patients), soit avec leurs proches (30). Deux patients ont pu en discuter avec leur médecin et leurs proches en même temps. Ces discussions ont abouti à 43 décisions de RCP supplémentaires. Deux autres décisions ont été prises sans discussion, et concernaient des patients souffrant de troubles cognitifs graves et dont les proches n'étaient pas disponibles.

    Changer le regard sur l’ordre de ne pas réanimer

    Parmi les patients suivis, 8% sont décédés. Tous sauf un avaient pris une décision de RCP sur place, mais la plupart de ces décisions avaient été enregistrées pendant l’admission à l’hôpital : 8 dans l'unité d'urgence et 12 dans le service de médecine aiguë lui-même. Parmi les 20 patients décédés dont la décision de DNACPR avait été enregistrée pendant leur admission, le délai moyen entre la décision et le décès était de 4 jours, 7/20 (35%) ayant été prises la veille du décès du patient.

    Même s’il s’agit d’une étude observationnelle, ses résultats "indiquent un faible taux de prise de décision concernant l'utilisation de la RCP en dehors du contexte d'une admission aiguë", écrivent les chercheurs. Selon eux, il est probable que "de nombreuses occasions d'aborder la question de la RCP dans un contexte non aigu ont été manquées".

    "La RCP est une procédure invasive et potentiellement indigne pour laquelle les patients âgés multimorbides ont peu de chances d'avoir un bon résultat ; la plupart des patients âgés qui reçoivent une RCP à l'hôpital meurent avant leur sortie", ajoutent-ils pour plaider pour un changement de pratique "nécessaire". "Cela... n'est susceptible de se produire que par l'éducation des médecins et par l'éducation du public afin que toutes les personnes concernées comprennent la réalité de la RCP et la nécessité de discuter de son rôle bien avant qu'elle ne soit nécessaire", concluent-ils.

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