Pédiatrie
Covid-19 et MIS-C : un nouveau syndrome inflammatoire post-infectieux chez l’enfant
Un syndrome inflammatoire multisystémique et post-infectieux est désormais mieux individualisé chez les enfants guéris d’une infection à SAR-CoV-2. Ce syndrome permettra peut-être de mieux comprendre le retentissement immunologique de cette infection.
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Deux séries américaines rétrospectives, chacune sur près de 200 enfants, publiées dans le New England Journal of Medicine, décrivent les caractéristiques cliniques et biologiques d’un nouveau syndrome inflammatoire de l’enfance qui est apparu pendant la pandémie de Covid-19.
En cohérence avec les cas rapportés dans d'autres pays (près de 1000 cas dans le monde), ces études décrivent un nouveau syndrome inflammatoire post-infectieux de l'enfance.
Un syndrome assez hétérogène
Au fur et à mesure de l'évolution de la pandémie de Covid-19, des cas d’enfants atteints de maladies fébriles inhabituelles ont été rapportés en nombre croissant. Identifiés primitivement comme des syndromes de Kawasaki, ces tableaux post-infectieux ne recouvrent pas exactement le tableau traditionnel, car ils touchent des enfants plus âgés, et peuvent parfois se présenter sous la forme d’un syndrome de choc toxique, d’un syndrome abdominal douloureux aigu, d'une encéphalopathie inflammatoire ou d’un syndrome très fébrile avec marqueurs inflammatoires élevés et atteinte multisystémique. »
Initialement appelé, « pediatric inflammatory multisystem syndrome temporally associated with severe acute respiratory syndrome coronavirus 2 (SARS-CoV-2) », ou « PIMS-TS », l'Organisation mondiale de la santé (OMS) l’a rebaptisé « syndrome inflammatoire multisystémique chez l'enfant » ou « multisystem inflammatory syndrome in children » (MIS-C).
Un syndrome immunologique post-infectieux
Le MIS-C est un syndrome post-infectieux : il survient 2 à 4 semaines après l'infection par le SARS-CoV-2. Ce trouble est peu fréquent (2 personnes sur 100 000 de moins de 21 ans), en valeur absolue et par rapport au nombre d'infection par le SARS-CoV-2 diagnostiquées chez des personnes de moins de 21 ans au cours de la même période (322 sur 100 000). Une proportion relativement élevée de cas est survenue chez des personnes noires, hispaniques ou sud-asiatiques.
Le tableau clinique du MIS-C est hétérogène mais cohérent dans toutes les études américaines et européennes. Il s’agit d’un syndrome inflammatoire multisystémique grave qui peut conduire certains enfants en unité de soins intensifs. La plupart des enfants se sont rétablis avec l'aide des soins intensifs et après un traitement immunomodulateurs (y compris l’administration d'immunoglobuline intraveineuse, de glucocorticoïdes, d’un anti-TNF ou d’inhibiteurs du récepteur de l'interleukine-1 ou 6). Au final, 2 à 4% des enfants sont décédés, le plus souvent en cas de comorbidité ou de retard diagnostic ou thérapeutique.
Un syndrome inflammatoire multisystémique.
Tous les enfants ont une fièvre ou des frissons, 97% souffrent de tachycardie, 80% de symptômes gastro-intestinaux, 60% d'éruptions cutanées, 56% de conjonctivite et 27% de modifications des muqueuses. Une myocardite inflammatoire est souvent fréquente avec un risque de développement d’anévrismes coronaires dans 10 à 20% des cas. Un syndrome proche du Kawasaki serait présent dans 4 cas sur 10.
Des niveaux élevés de troponine et de peptide en particulier ceux qui natriurétique de type B sont fréquents chez les enfants atteints d’un dysfonctionnement cardiaque grave, et la plupart des malades ont des élévations des niveaux de protéine C-réactive, de ferritine, de lactate déshydrogénase et de d-dimères, ainsi que du nombre de neutrophiles. Une anémie, une lymphopénie, une hypoalbuminémie et des troubles de la coagulation sont également fréquents.
Un syndrome distinct du Kawasaki
La comparaison des éléments du tableau clinique et biologique du MIS-C avec ceux du syndrome de Kawasaki suggère que ce nouveau trouble pourrait être distinct. Les patients atteints de MIS-C sont plus âgés et ont un syndrome inflammatoire plus intense et des lésions myocardiques plus importantes que les patients atteints du syndrome de Kawasaki, et la prédominance raciale et ethnique diffère entre les deux affections (40% d’Afro-américain et 36% d’hispaniques dans les séries américaines).
Le traitement est difficile car les médecins sont confrontés à un éventail très large de tableaux cliniques et biologiques qui peuvent retarder le diagnostic et compliquer le choix du traitement. Cependant, la plupart des enfants ont été traités avec des traitements qui étaient validés dans le syndrome de Kawasaki ou dans d'autres troubles inflammatoires de l’enfance.
Un risque probablement plus large
Il est encore tôt pour dire que le tableau rapporté est le tableau définitif car il est probable que ce syndrome est beaucoup plus fréquent, mais dans des formes moins sévères.
Comme le MIS-C survient généralement après l'infection par le SARS-CoV-2 (2 à 4 semaines après), parallèlement au développement d'une réponse anticorps, des réponses immunitaires adaptatives cellulaires ou humorales aberrantes peuvent être impliquées dans son apparition. Il a été montré que les anticorps pouvaient augmenter la gravité de l'infection par un autre coronavirus, le SARS-CoV-1, en déclenchant une inflammation ou en provoquant des lésions d’organes. Par ailleurs, des études génétiques laissent penser que les enfants porteurs de variantes de gènes qui régulent les réponses des lymphocytes T et B ou l'élimination des complexes immuns seraient plus exposés à la maladie de Kawasaki.
Les experts pensent donc que la proximité clinique entre la maladie de Kawasaki et la MIS-C implique une architecture génétique sous-jacente connexe, qui soutient l'hypothèse selon laquelle le nouveau trouble résulte de réponses aberrantes des lymphocytes T ou B au SARS-CoV-2. C’est donc une piste de travail pour mieux comprendre le syndrome de Kawasaki, mais aussi les syndromes immuno-inflammatoires post-Covid-19 qui sont signalés chez l’adulte.











