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Le  Semaglutine essuie un échec dans la maladie d’Alzheimer. 

Présentés lors de la 18 conférence sur les essais cliniques dans la maladie d’Alzheimer qui s’est tenu du 1 er au 4 décembre à San Diégo  Etats-Unis), les résultats de deux essais de phase III ont douché l’espoir d’une avancée majeure dans cette pathologie.

  • 05 Décembre 2025
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    La déception est à la hauteur de l’attente, profonde. Le sémaglutine ne sera pas la pilule miracle dans toutes les ères thérapeutiques. Les deux grands essais de phase III de Novo Nordisk, Evoke et Evoke+, ont clairement indiqué que  le semaglutide — indiqués dans le diabète de type 2 et l’obésité — ne ralentit  pas la progression de la maladie d’Alzheimer chez les patients en phase précoce. Ces études, randomisées, en double aveugle, ont porté sur 3 808 adultes âgés de 55 à 85 ans, présentant un trouble cognitif léger ou une démence légère liée à la maladie d’Alzheimer, confirmée par la présence de plaques amyloïdes. Le semaglutide oral (14 mg/jour) a été comparé à un placebo, en addition des soins standards. Le critère principal était l’évolution du score global de cognition et de fonction, mesuré par le changement du score Clinical Dementia Rating – Sum of Boxes (CDR-SB) entre le début de l’étude et 104 semaines. À leur inclusion, les patients avaient un score global de 0,5 à l'échelle CDR (Clinical Dementia Rating), étaient positifs pour les antigènes amyloïdes. Dans cet essai, les patients ont été randomisés pour recevoir soit du sémaglutide 14 mg une fois par jour, soit un placebo, pendant une période de titration de 8 semaines, suivie de 104 semaines de traitement et d'une extension de 52 semaines. Près de 60 % des patients prenaient un traitement concomitant contre la maladie d'Alzheimer, le donépézil (36,3 %) et la mémantine (11,9 %) étant les médicaments les plus fréquemment utilisés.

    Pas de supériorité par rapport au placebo

    Au total, le sémaglutide n'a pas démontré de supériorité par rapport au placebo concernant le critère d'évaluation principal, à savoir la variation du score CDR-SB (Clinical Discology-Sum of Boxes), sur une période de 104 semaines, soit 2 ans. À l’issue de cette période, aucun effet significatif n’a pu être mis en évidence. Le semaglutide n’a pas réduit le déclin cognitif ou fonctionnel par rapport au placebo. 

     Il est vrai que, selon Novo Nordisk, des modifications favorables sur certains biomarqueurs associés à la maladie d’Alzheimer ont été observées. Toutefois, ces changements biologiques n’ont pas eu d’impact mesurable sur l’évolution clinique. Autrement dit, malgré quelques signaux sur les marqueurs, l’espoir d’un bénéfice tangible en termes de cognition et de fonction n’a pas été confirmé. 

    La tolérance du médicament dans ces essais a été jugée conforme à ce qui est connu  chez les patients diabétiques ou obèses. Aucun signal de sécurité particulier n’est ressorti, ce qui confirme le bon profil de tolérance du semaglutide sur ces populations, même âgées ou fragiles.

    Ces résultats constituent un revers significatif pour la classe des analogues du GLP-1 dans la maladie d’Alzheimer. De nombreuses données observationnelles, des modèles précliniques, et des analyses post-hoc d’études chez des patients diabétiques ou obèses suggéraient une activité  biologiquement plausible, à savoir des effets métaboliques, neuroinflammatoires ou vasculaires potentiellement bénéfiques pour la neurodégénérescence. Mais la robustesse méthodologique des essais Evoke / Evoke+ montre que ces hypothèses ne se traduisent pas, dans la réalité clinique, par un ralentissement du déclin cognitif. 

    Cette déception incite à la prudence. Si semaglutide conserve parfaitement sa place dans le traitement du diabète et de l’obésité, il ne peut être proposé — aujourd’hui — comme traitement de la maladie d’Alzheimer. Les patients et leurs familles, souvent espérant une réutilisation “miracle” des traitements métaboliques, doivent être informés à l’évidence que les données actuelles ne justifient pas de recommander le semaglutide dans ce contexte.

    Par ailleurs, ces résultats soulignent les limites de la transposition des effets bénéfiques observés in vitro, en modèles animaux ou en études observationnelles, vers des bénéfices cliniques tangibles dans les maladies neurodégénératives. Le déclin cognitif en Alzheimer reste un phénomène complexe, probablement peu sensible aux seuls effets métaboliques ou anti-inflammatoires des analogues du GLP-1 — du moins aux doses, formulations et stades de la maladie testés.

    De nouveaux essais cliniques en cours

    La recherche doit désormais reposer  sur d’autres approches thérapeutiques — notamment celles ciblant directement les mécanismes amyloïde ou tau, ou les voies neuroprotectrices spécifiques.

    L'oligonucléotide antisens BIIB080, développé par Biogen et Ionis Pharmaceuticals,serait un candidat prometteur pour la réduction de la protéine tau lors d'essais cliniques. Il est actuellement évalué dans le cadre de l'étude de phase II CELIA, dont les résultats sont attendus en 2026.

     

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