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Dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA) : un implant rétinien redonne une vision fonctionnelle

Chez des patients avec « atrophie géographique » liée à la DMLA forme sèche, le système PRIMA (implant sous-rétinien + lunettes projectrices infrarouges) est une innovation de rupture qui améliore cliniquement l’acuité visuelle à 12 mois, sans altérer la vision périphérique résiduelle.

  • TarikVision/istock
  • 21 Octobre 2025
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    L’atrophie géographique (AG) représente le stade avancé de la dégénérescence maculaire liée à l'âge (DMLA forme sèche) et l’une des principales causes de cécité dans le monde. Les traitements médicaux anti-complément (pegcetacoplan, avacincaptad pegol) ralentissent l’extension des lésions mais n’ont jamais restauré la vision.

    Pour la première fois, des chercheurs ont permis à des personnes atteintes d'une DMLA de retrouver une partie de leur vision grâce à un micro-implant rétinien prothétique. S'il est approuvé pour une utilisation plus large à l'avenir, ce traitement pourrait améliorer la vie de millions personnes atteintes de dégénérescence maculaire liée à l'âge qui perdent la vue.

    Une technique très innovante et 80% des DMLA forme sèche améliorées

    L'implant rétinien est une puce sans fil de la taille d'une tête d'épingle et aussi fine qu'une feuille de film plastique. Il est inséré dans la rétine, remplaçant les cellules qui ont disparu et reçoit des signaux provenant de lunettes et d'une caméra qui projette des images infrarouges sur la rétine artificielle. La caméra est équipée d'un zoom qui permet d'agrandir des images telles que des lettres, ce qui permet aux personnes de lire, bien que lentement, car le zoom ne leur permet pas de voir beaucoup de lettres à la fois. La vision restaurée n'est pas normale : elle est en noir et blanc, floue et le champ de vision est réduit.

    Dans l’étude PRIMAvera, publiée dans The New England Journal of Medicine, la vision de 27 des 32 participants s'est tellement améliorée qu'ils pouvaient lire avec leur rétine artificielle. Parmi les 32 patients évalués à 12 mois, 81 % ont une amélioration d’au moins 0,2 logMAR (IC95 % 64–93 ; p<0,001), estimée à 80 % (IC95 % 66–94 ; p<0,001) après imputation des données manquantes. Le bénéfice s’inscrit au cœur du scotome fovéal tout en préservant la vision périphérique.

    De la phototransduction perdue à la neurostimulation ciblée

    L’ampleur fonctionnelle est robuste : 78 % atteignent ≥0,3 logMAR (≥15 lettres), le gain moyen est de 0,51 logMAR (≈25,5 lettres) à 12 mois, avec un maximum observé de 1,18 logMAR (59 lettres). L’usage au domicile est rapporté par 84 % des participants pour la lecture de lettres, chiffres ou mots ; les réglages numériques (zoom, contraste) permettent parfois d’approcher des équivalents Snellen jusqu’à 20/42, au-delà de la résolution théorique des pixels de 100 μm, probablement grâce aux micro-mouvements oculaires. La vision périphérique « naturelle » demeure, en moyenne, équivalente au baseline après implantation, évitant l’effet « tunnel » d’autres dispositifs grossissants.

    Côté tolérance, 26 événements indésirables graves ont été rapportés chez 19 patients ; 81 % apparaissent dans les 2 premiers mois postopératoires et 95 % se résolvent dans les 2 mois suivant leur survenue. Les complications attendues de la chirurgie sous-rétinienne dominent (hémorragie sous-rétinienne) ; une néovascularisation choroïdienne touche 2 patients (5 %), contrôlée par anti-VEGF au besoin. Aucun signal de dégradation de la périphérie n’est relevé.

    Un essai ouvert, contrôlé sur les valeurs à l’inclusion nécessite une prudence interprétative

    PRIMAvera est une étude ouverte, multicentrique, prospective, monobras, avec contrôle par rapport à la ligne de base. Les participants, porteurs d’atrophie géographique avec acuité ≥1,2 logMAR, sont évalués à 6 et 12 mois avec et sans les lunettes PRIMA ; les critères principaux associent l’amélioration d’acuité ≥0,2 logMAR à 12 mois et la sécurité jusqu’à 12 mois. Ce design reflète un contexte clinique réel et une population avancée de DMLA, ce qui soutient la généralisabilité aux centres pratiquant la chirurgie rétinienne ; néanmoins, l’absence de groupe témoin implanté « sham » et les pertes au suivi (3 décès, 1 retrait, 2 indisponibilités) imposent une lecture prudente des tailles d’effet.

    Selon les auteurs, PRIMA peut être proposé chez des patients DMLA avec atrophie géographique fovéale recherchant une restauration de la vision centrale, notamment lorsque les approches anti-complément, seules ou en association, ne répondent pas à l’objectif fonctionnel. Les implications pour la prise en charge incluent la rééducation visuelle dédiée, l’ajustement des attentes et une coordination étroite entre chirurgiens rétiniens, opticiens et orthoptistes. Les priorités de recherche sont claires : essais comparatifs contrôlés versus dispositifs grossissants/implants télescopiques et meilleures mesures patient-centrées (lecture, mobilité, qualité de vie), suivi ≥24–48 mois pour la durabilité.

    À ce stade, PRIMA constitue une innovation de rupture qui, pour la première fois dans l’atrophie géographique liée à la DMLA, rend une vision centrale utilisable chez la majorité des patients implantés.

     

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